MARX AU 21ème SIECLE ?

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    Protectionisme et Libre Echange

    Rubrique très importante.

    Voir la rubrique "TRUMP" qui parle du même problème.

    Présentation générale avec un exemple, l'Argentine

    -Nous faisons valoir la position de Marx sur le Libre échange, à laquelle nous n'adhérons pas, parce qu'elle est datée (Marx croyait à l'imminence de la révolution en GB, qui naîtrait du chaos). Nous faisons un retour utile à ce qu'est la Concurrence, comme principe fondateur du capitalisme.

    - et un gros article sur la monnaie coloniale : le Curenncy Board Arrangment" qui figure déjà dans "Colonialisme"

    -Nous proposons un gros article sur "Le protectionnisme à l'ère de Trump"

    Présentation

    Cette question a à voir avec le capitalisme d'Etat (rubrique "désindustrialisation") et avec la nécessité d'une "internationale"....

    Dans la "crise" actuelle, sciemment provoquée par Bruxelles en Europe, des hommes politiques, des tendances politiques souverainistes ou de gauche, préconisent le retour au protectionnisme pour fuir la finance internationale et ses méfaits, pour fuir la concurrence internationale, protéger la production nationale. En toute logique, pour que cela marche, il faudrait pouvoir également fuir les règles du commerce international. Le protectionnisme n'est pas en soi un enfermement économique, puisqu'il a fonctionné jusqu'à la veille des années 80 dans les grandes nations industrielles. Comme on le verra dans le cas de l'Argentine, ce sont les grandes nations industrielles qui aujourd'hui poussent à l'enfermement des nations qui voudraient se protéger, en fermant le recours aux marchés financiers...

    Ce n'est pas une question simple, car derrière le désir de retour au protectionnisme, il y a des motivations justes, d'autres illusoires, et enfin des motivations nationalistes xénophobes et despotiques. Il faut faire le tri et analyser ce qui est posible et impossible dans le contexte capitaliste.

    Au nom de la défense de la zone euro, on entend le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, dire "La volonté d'autonomie des Etats de la zone euro doit s'effacer" (le Monde du 29 juin 2012). C'est inacceptable. L'Etat n'est pas seulement l'Etat bourgeois, en termes marxistes, il est l'expression des compromis entre les forces sociales dans une nation donnée. Et ces compromis ont pris la forme de lois, des codes du travail, du droit civil, du droit pénal, administratif etc...Ils ont également pris la forme d'institutions particulières que nous n'allons pas énumérer ici. On ne saurait donc barrer d'un trait de plume le contenu de ce que représente un Etat particulier. Théoriquement les ouvriers et salariés n'ont pas de patrie. C'est largement faux si l'on prend en compte les acquis sociaux propres à chaque pays. Il faut donc prendre garde au fait que l'Etat n'est pas seulement l'Etat capitaliste des lobbys.

    On ne peut donc accepter l'effacement devant la zone euro. Au profit de qui ? Du Grand Capital allemand, et de la disparition de tout ce qui fut la base d'un système social, médical, éducatif, chèrement conquis. On ne peut pas accepter non plus qu'un pays perde son automonie, et la capacité de faire une politique monétaire indépendante, cette perte ayant valu l'effondrement de tous les pays du sud de l'Europe, de l'Irlande, de l'Islande. On ne peut pas accepter non plus la perte du droit des peuples à une nation indépendante, non colonisée, avec son contrat social et ses principes, une culture autour de ces principes, une histoire.. . Sinon que voudrait dire le droit à l'autodétermination ? Que voudrait dire la lutte d'une nation contre l'envahissement d'une nation despotique, contre une nation fasciste, contre une nation pseudo communiste, contre une nation islamiste... etc Il faut préciser de quoi on parle.

    Précisons brièvement qu'il y a deux sortes de conceptions de la nation:

    -La nation qui s'est construite autour des Lumières : un contrat social constitué de principes politiques et sociaux (la République, les droits de l'homme, l'égalité des citoyens, l'Etat de droit, la notion de "preuve", la justice sociale, la Raison, la liberté de pensée... etc)

    -La nation autour de l'identité nationale (un conglomérat de coutumes, de traditions, de liens de sang lointains), et une religion (conception lepéniste dans la logique des Droites contre la démocratie)

    La demande populaire de protectionnisme s'articule généralement autour de la défense de l'emploi et du refus de fermetures de sites industriels.

    Mais il y a tous ces éléments contradictoires dans la recherche du retour au protectionnisme qui fut la règle pendant tout le 19ème siècle et jusqu'à la mondialisation, de la décennie 1980, sauf pour la GB pendant longtemps, nation dominante libre échangiste.

    Une association internationale des travailleurs, qui serait tant utile, et dont l'absence est un manque absolu, ne peut pas ne pas tenir compte de l'ensemble de ces éléments. De ce point de vue, on ne peut pas liquider la question du protectionnisme en la ravalant au désir de défense d'un nationalisme réactionnaire. L'internationalisme n'a jamais voulu dire la fin des nations (à l'origine: action unitaire entre nations...). Par contre le pseudo internationalisme communiste (de 1915 à 1943) n'a été rien d'autre que la main mise du Komintern sur les organisations communistes affiliées, uniquement dans le but de soutenir la politique nationaliste de l'URSS et ses propres intérêts: la division à l'extrême des organisations de défense des salariés face au Capital international, le soutien honteux au nationalisme allemand du traité de Rapallo jusqu'au pacte germanosoviétique, le soutien honteux à la constitution de l'Etat d'Israël, entre autres choses.

    La question du protectionnisme doit donc se discuter concrètement du point de vue du strict intérêt des peuples et des travailleurs d'un pays ou de plusieurs pays.

    De 2012 à 2017

     

    LE CAS DE L'ARGENTINE.

    (Les Mondes du 25 juin 12, des 7 et 24-8-12)

    Les prévaricateurs, voyous et rapaces mondiaux, regardent avec attention l'Argentine pour tenter de l'asphyxier si elle maintient son désir de protectionnisme, par la voie de son Etat dirigé par Cristina Kirchner. La grande faiblesse de ce gouvernement est de tenter une issue réformiste dans le cadre du capitalisme, sans faire appel à une solidarité internationale. Il y a 40 ans, cette issue était encore possible en nationalisant, par exemple, les grandes sources de richesses du pays, pour en faire une source de revenus à l'exportation, parce que les grands Etats capitalistes ne s'étaient pas encore mis en ordre de bataille, dans la "stratégie du choc", pour casser toute vélléité de ce type. L'Argentine peut-elle tenter à nouveau cette expérience avec la nationalisation de la compagnie pétrolière Repsol ? Nous sommes sceptiques. Aujourd'hui, dans une situation où l'Argentine dépend de son commerce extérieur dans une économie mondialisée pour assurer sa croissance, dans le soja principalement (et quel soja !! fruit de l'empoisonnement d'une partie de la population !) et la viande de boeuf essentiellement, il suffit qu'il y ait un embargo, et c'en est fait.

    Sans appel du peuple argentin à la solidarité des peuples d'Amérique et de l'Europe, et sans discussion sur la nature de la production à faire prévaloir, sur la nature des richesses et des choix de vie à venir, nous ne voyons aucune issue à la situation actuelle. Sauf si tous les peuples d'Amérique latine résistent ensemble, et non pas simplement leurs Etats.

    L'Argentine s'essaye, en tant qu'Etat, à l'alternative du protectionnisme dans le cadre d'une union avec d'autres pays d'amérique latine (le Mercosur, crée en mars 91).

    11 ans après la terrible crise de 2001 en Argentine (où l'existence du Mercosur n'a pas changé la donne), où les banquiers s'étaient saisi, avec l'aval d'un Etat corrompu, des comptes des citoyens pour rembourser le FMI (dit le "Fond de la misère internationale" par les argentins), et après le décrochage justifié du peso vis à vis du dollar, les problèmes réapparaissent comme il est normal : la croissance ralentit, le chômage et l'inflation progressent. La classe riche de l'Argentine profite de la libre circulation des capitaux (qui caractérise la "mondialisation") pour placer son,argent hors du pays. Pour réagir à cela, C Kirchner a rétabli en avril 2012 un strict contrôle des changes. Un marché clandestin d'achat de dollars s'est alors constitué, et le miracle argentin proposé en exemple à la Grèce, ressemble à une peau de chagrin aujourd'hui. Pourquoi ?

    En 2001, l'Argentine devait 75 Mds d'euros au FMI. Le peso était arrimé au dollar, ce qui ruinait le pays. Le défaut de paiement a entraîné un "vol" des comptes bancaires privés des citoyens de la part des banques . En compensation de ce "vol" des avoirs bancaires privés, vers la fin décembre 2001, les victimes s'étaient vu attribuer des titres remboursables à terme, les "corralitos", qui ont circulé comme monnaie, afin que l'Etat reprenne ses droits. Si les citoyens présentaient de suite ces titres au remboursement dans les banques, il y avait une forte décote, ceci pour que les retraits n'aient pas lieu. C'est ainsi que l'Etat a repris ses activités, sur la base de l'espoir du remboursement, après la grande épopée des "assemblées populaires".

    Le gouvernement a décidé de rembourser une partie de cette dette privée. Ce remboursement (soit 1,78 mds d'euros !) s'est achevé en août 2012, mais en laissant des milliers de gens ruinés. L'Etat avait renié une grosse partie de sa dette au FMI, ce qui est bien. Mais on n'agit pas ainsi impunément avec le FMI. L'Argentine n'a toujours pas accès aux marchés des capitaux, parce qu'elle veut garder son indépendance financière, ce qui signifie une asphyxie financière. Donc elle a besoin d'exporter un maximum pour assurer son financement intérieur, si elle veut demeurer un pays capitaliste reconnu, et surtout "être compétitive". Il lui faut donc importer ce qu'elle ne produit pas... Et dans cette histoire, ce n'est pas le Mercosur qui va la tirer l'affaire. Nous voudrions bien que l'analyse en soit faite. Ce n'est pas non plus le Brésil (partie du Mercosur) qui va la tirer d'affaires, empêtré qu'il est dans des affaires de corruption, et ayant passé des compromis pourris; ce n'est pas non plus le Vénézuela, avec son "socialisme" dictatorial et corrompu; ce n'est pas la finance internationale.

    Exporter pour avoir du financement, c'est là où le bât blesse ! Des pays comme les USA, le Japon, l'Europe dont l'Espagne (en rétorsion de la nationalisation de la compagnie pétrolière Repsol)... diminuent leurs importations. L'Argentine manque déjà de pièces de rechange par ex dans l'automobile.

    Pascal Lamy (PS) en bon gestionnaire de l'OMC (comme DSK du PS qui fut directeur du FMI) fustige ce protectionnisme. L'Argentine ferait ostruction aux flux commerciaux ! C'est fou comme le PS défend bien les intérêts du capitalisme !! on ne le dira jamais assez.

    Affaire à suivre ! Le "fond de la misère internationale" ne fera aucun cadeau à l'Argentine, et surtout pas l'Europe, devant laquelle le PS français s'apprête à se coucher.

    3 septembre 2012

     

    Le libre Echange et les réfugiés

    La guerre et le chaos organisé au Moyen Orient sont une cause essentielle de l'afflux extraordinaire de réfugiés en Europe.

    Mais pas seulement. Les dictatures en Erythrée, au Soudan provoquent des départs de populations. Mais également, et depuis fort longtemps, le libre échange avec l'Afrique est une cause de ruine et de misère des populations. L'Europe, La Chine, les USA, déversent leurs productions peu chères en Afrique, et interdisent à l'Afrique de produire ce dont elle a besoin, en payant des salaires décents. Il en est ainsi des productions agricoles de base comme des produits utiles de toutes sortes. Le continent africain subit ainsi une sorte d'interdiction de produire, du fait du libre échange avec les grandes puissances. Il est pourtant évident que les pays africains doivent se protéger par des tarifs douaniers. Inversement ils pourraient imposer des prix plus élevés pour les produits miniers, utiles à l'industrie occidentale, s'ils s'entendaient entre eux.

    Oui mais voilà, le chantage à la dette, aux prêts financiers, le verouillage du FMI, les possessions du groupe Bolloré en Afrique de l'Ouest, le CFA en Afrique de langue française, le poids de la Chine et d'autres en RDC... etc etc, font que le libre échange est une réalité quasi incontournable, d'autant que l'extrême gauche européenne la justifie, par des détours de phrases, parce que Marx avait dit que........dans le but finalement de défendre "notre" industrie....(nos portables, nos ordinateurs, nos moteurs de voiture, et autres, qui dépendent des produits miniers africains !).

    En conséquence, la jeunesse n'a aucun avenir en Afrique. Elle tente sa chance vers l'Europe au mépris de la mort.... Dans l'indifférence générale. L'absence d'Internationale des peuples fait le bonheur du capitalisme.

    17 Août 2015

     

    I)A propos du discours sur le libre échange de 1848 de Marx

    II)Libre échange, monnaie à valeur fixe et pillage du Tiers monde

    III)Actualité du libre Echange

     

    I)A propos du discours sur le libre échange de 1848 de Marx

    Actualité de la discussion: affirmation des principes de concurrence pleine et entière et de libre commerce dans le Traité de Constitution européen soumis au vote le 29 mai 2005 en France.

    1) Définition de la libre concurrence.

    La libre concurrence est le principe fondateur du capitalisme. Ce n'est ni le marché, ni la monnaie, ni la "liberté", ni la démocratie. Ce fait est en général totalement éludé, non seulement par les grands de ce monde mais par ce qu'on appelle la gauche, et très largement l'extrême gauche.

    Le principe de la concurrence était connue de tous les peuples puisque les marchands, de ci de là, la revendiquaient, la mettaient en pratique momentanément, surtout dans les ports et dans les foires des grandes villes. Les corporations en Europe, les castes en Inde, l'organisation des métiers dans toutes les sociétés traditionnelles étaient conçues précisément pour éviter la concurrence, dont chacun savait que son existence mettrait en péril les emplois, les artisans, les prix et opposeraient les gens d'un même métier entre eux. Toute l'histoire qui précède le capitalisme veille à ce que la concurrence n'entre jamais dans les métiers. Les manufactures d'Etat dans les sociétés précapitalistes, organisées sur le principe de la division du travail, n'introduisent pas la concurrence. Le seul principe qui régit toute production est la qualité. Tous les règlements royaux ou des organisations de métier veillent à une seule chose: la qualité. Les églises appuient ce principe, comme elles appuient en général l'opposition au prêt à intérêt.

    Au milieu du 17ème siècle, aux alentours de la république de Cromwell en Grande Bretagne, la révolution bourgeoise introduit de fait la libre concurrence; en 1791, un bon siècle plus tard, la loi "Le Chapellier" en France mettra fin aux corporations, introduira la libre entreprise , la concurrence, et condamnera par avance toute organisation des travailleurs entre eux. Notons que Marx verra dans la loi le Chapellier une libération des forces productives.

    Quelle définition peut-on donner à ce principe fondateur ? La libre concurrence établit la règle selon laquelle toute entreprise individuelle peut user à son profit, et comme elle l'entend, de toute organisation du travail et de toute technique susceptibles de lui assurer sur le marché une place prépondérante en lui permettant de rechercher, comme moteur de la production, la baisse des prix. Plus aucune réglementation n'interviendra pour imposer des règles de fabrication, des règles d'organisation, et des règles dans l'utilisation de la technique, comme c'était le cas dans les corporations par exemple. Cela signifie d'une part que la technique n'est plus assujetti désormais à un contrôle social, et d'autre part que la baisse des prix va prendre le pas sur la qualité, dans les objectifs de production. En conséquence, on entre dans l'ère de la guerre entre les entreprises pour la conquête des marché, et on quitte de façon irrémédiable l'idée qu'il faille produire pour satisfaire des besoins. On produira désormais, dans le cadre des secrets de fabrication, pour faire de l'argent et prendre le marché du voisin. Les concepts de rendement, rentabilité, productivité sont introduits au mépris de toute éthique. C'est un renversement moral considérable.

    A partir de là, les techniques n'appartiendront plus au grand public, on entre dans l'ère des brevets.

    Les compagons se transforment en salariés corvéables à merci, sans aucun droit, licenciables à tout moment, soumis à l'entreprise, et dont les qualifications vont peu à peu être totalement détruites sauf pour une petite partie des ouvriers, anciens artisans. L'appel fait aux femmes et aux enfants dans les entreprises stigmatisent ce fait.

    Ces nouveaux principes engendrent l'industrialisation qui, en Grande Bretagne passe par l'introduction du métier mécanique contre le métier à bras dans le tissage, après le filage mécanique. Certes, il faudra la machine à vapeur pour y parvenir, mais sans concurrence, point de passage au machinisme systématique.

    2) Libre commerce et Libre Echange.

    La libre concurrence engendre immédiatement l'exigence, pour les entreprises, du libre commerce, à l'intérieur du pays et à l'extérieur. A l'intérieur tous les péages, au profit des Seigneurs, disparaissent. Plus difficile est d'obtenir le libre commerce à l'extérieur. La Grande Bretagne, la plus avancée industriellement, réclame le libre échange. Elle l'organise unilatéralement entre la nation anglaise et l'Inde, sa colonie, pour ruiner cette dernière, et lui ravir sa production de tissus. En Europe, ce principe est décrié et aboutira à la guerre contre la Grande Bretagne de la part de la France. Si les pays européens ouvraient leurs frontières, ils seraient immédiatement ruinés par la Grande Bretagne. Les Etats allemands, avant l'unification, sous l'influence de List, vont constituer le Zollverein, une protection douanière en 1840. Sans cela, ce serait la ruine totale.

    Les anglais se proclament libre échangistes, c'est à dire sans droits de douane, en 1846 par "l'acte de Peel". Ils n'ont rien à perdre et tout à gagner à cette situation. Mais ce faisant, ils mettent en faillite leurs agrariens en les mettant en concurrence avec les producteurs de blé américains, qui offrent leurs blés à la Grande Bretagne, y compris le transport par bâteaux à vapeur, moins chers que les blés anglais ! Pourquoi les industriels imposent cette mesure ? Ouvertement ils expliquent qu'avec du blé moins cher, on fera du pain à plus bas prix. Ils se déclarent en faveur d'une nourriture à bas prix pour les ouvriers et recherchent l'union avec ces derniers. Ceux-ci ne sont pas dupes et rétorquent que ceci a pour but de maintenir les salaires bas (puisque l'essentiel du salaire sert à acheter du pain) ou même de les diminuer.

    Le libre échange est donc la libre circulation des marchandises sans droits de douane. C'est le contraire du protectionnisme (ne pas confondre le protectionnisme avec l'autarcie, ce que font généralement les esprits mal intentionnés)

    Il faudra attendre les années 1880 pour que le libre échangisme se généralise en Europe avec les USA et le Japon, pour disparaître lors de la première guerre mondiale pour une immense période qui court jusqu'aux années 80.

    C'est dans les circonstances de l'Acte de Peel que Marx prend la parole devant l'Association démocratique de Bruxelles, en séance publique le 9-1-1948, sur la question du Libre Echange. Il s'y déclare "libre échangiste révolutionnaire" !

     

    3)La position de Marx sur le libre échange.

    (les parenthèses en italiques sont de l'auteur du site)

    Marx reprend l'argument des économistes libéraux du 19ème qui tentent de convaindre les ouvriers eux-mêmes du bien fondé du libre échange. Ils disent vouloir soulager la condition misérable de la classe laborieuse (dont ils ne sont pas responsables bien sûr), et faire le pain à un prix moins elevé. "C'est la cherté des vivres qui vous fait misérables et ceci à cause des aristocrates moyennageux qui veulent protéger leurs grains..."

    L'argument de la ruine de l'agriculture ne modifie pas l'attitude des industriels. Ce que veulent ces derniers ce sont des bas prix industriels pour conquérir les marchés européens, donc de bas salaires. Toute l'Europe achètera les biens manufacturés anglais et vendra son grain à la Grande Bretagne.

    Le prix du grain diminuant, ce sont les terres les moins fertiles qui seront abandonnées, donc la rente foncière baissera dans les mêmes proportions (la rente se fixe toujours sur la plus élevée, qui correspond à celles des terres les moins fertiles: voir la question de la rente foncière chez Marx). De nombreux fermiers vont disparaître et s'embaucher dans l'industrie. Les plus gros d'entre eux vont acheter des machines, ils produiront plus (sur les terres qu'ils auront rachetées aux petits fermiers à très bon marché) et à plus bas prix, avec des salaires moindres pour leurs ouvrirers agricoles (Marx décrit là le phénomène de l'exode rural, déjà bien connu en GB, qui se produira massivement en France après la seconde guerre mondiale au 20ème siècle. Il décrit aussi le processus de l'industrialisation de l'agriculture..). Par conséquent la position des fabricants n'a rien de philanthropique.

    Et Marx s'appuie sur Ricardo et son célèbre ouvrage anglais d'économie politique : "Si, au lieu de récolter du blé chez nous,....nous découvrons un nouveau marché où nous puissions nous procurer ces objets à meilleur compte; dans ce cas les salaires doivent baisser et les profits s'accroîte,.......la baisse du prix des produits de l'agriculture.... réduit les salaires non sulement des ouvriers employés à la culture de la terre, mais encore de tous ceux qui travaillent aux manufactures ou qui sont employés au commerce" (Marx, Discours sur le Libre-Echange, 1848, Pléiade, tome I, p 146).

    Marx indique ensuite que les prix vont théoriquement baisser, mais des ouvriers seront jetés à la rue sous l'effet de la concurrence toujours plus féroce entre eux, par l'afflux de ceux qui vont se présenter dans les usines. Finalement le libre échange entraîne l'augmentation des forces productives certes, mais la production de plus de machines, l'accroissement de la productivité, l'augmentation du profit, la concurrence entre les travailleurs, la baisse des salaires. les machines vont aussi concurrencer les travailleurs en accélérant la division du travail et en détruisant les spécialités du travail. Les slariés seront des hommes à totu faire et la petite industrie sera ruinée. Les tisserands à la main disparaîtront (les métiers à tisser à bras seront remplacés partout par les métiers mécaniques). Marx évoque la misère des tisserands à bras (Docteur Bworing, discours du 28-7-1835, repris par W.Atkinson, dans principes d'économie politiques de 1840 et Andrew Ure, Philosophie des Manifactures de 1836). Selon ces deux personnages, libre-échangistes passionnés, les principes du travail industriel consistent à se passer du travail de l'homme, pour baisser les salaires en utilisant massivement les femmes et les enfants.

    Les manufacturiers doivent donc toujours rechercher la baisse du prix des moyens de subsistance.

    (Arrêtons nous quelques instants. Le processus décrit par Marx sera freiné par l'organisation des travailleurs en syndicats et partis au 19ème siècle, mais non pas stoppé, les syndicats et partis étant eux-même contaminés par l'idée des bienfaits du machinsime. Et paradoxalement ce processus sera également freiné par la bourgeoisie elle-même qui a institué le protectionnisme pour éviter le chaos social et les faillites en nombre. On peut estimer que l'abandon du protectionisme à la fin du 19ème fut une des causes profondes de la guerre de 14-18, tant les nations se faisaient une concurrence violente au niveau des prix, au sujet des marchés, de la circulation des capitaux, et des colonies. Cette question n'est pas sérieusement discutée tant elle mettrait en danger actuellement les tentatives de revenir à un libre échange généralisé.

    Le plus bel exemple du processus décrit ci-dessus par Marx sera donné par l'industrialisation de l'agriculture et de l'élevage après la seconde guerre mondiale, qui donnera une nourriture à bas prix de très mauvaise qualité et la liquidation des paysans à une rapidité extraordianire. Le machinisme, les pesticides, les hormones, le maïs à hauts rendements et dévoreur d'eau.... puis plus tard la sélection génétique des semences dévoreuses d'eau, d'engrais et d'herbicides, la nourriture frelatée des bêtes d'élevage, la "vache folle", les OGM...permettront une nourriture abondante, à bas prix, dangereuse au maximum, et des salaires relativement bas. La précarité viendra à bout des acquis consentis pendant 20 ans à l'époque de la puissance de l'URSS. Ceci engendrera le fait que 70% de l'eau est dépensée par l'agriculture, et 20% par l'industrie, alors que l'agriculture traditionnelle était économe en eau par principe).

    En conclusion Marx indique que le libre échange, comme la libre concurrence, n'est ni plus ni moins que la liberté totale du capital et l'accélération de l'antagonisme Capital / travail. On retrouve, dit-il, la même chose entre les nations. Il ne peut pas y avoir de fraternité entre elles du point de vue du capital, dans le cadre du libre échange. Cette idée fausse de fraternité vient de la bourgeoisie qui camoufle ses agissements derrière des grands mots.

    Mais Marx n'est pas pour autant pour le protectionisme. Il luttera méchamment et injustement contre List (voir plus haut) qui fut responsable du protectionisme allemand. Le protectionisme est conservateur, dit-il, le libre-échange est destructeur, il dissout les nationalités, et pousse à l'extrême tous les antagonismes, et précipitera la révolution sociale, en conséquence de quoi il se proclame libre-échangiste révolutionnaire ! (la guerre de 14-18, après une longue période de libre-échange, engendrera le fascisme en Allemagne laquelle fut écrasée par les traités de paix... très philanthropiques.... Engels rajoutera que le libre-échange est la voie la plus directe vers "un cul de sac", c'est à dire vers l'impasse. Tous deux acceptent l'idée qu'il convient de précipiter le capitalisme vers un cul de sac, et de demander aux travailleurs de se saborder eux-mêmes par l'exigence du libre-échange...Cette politique du pire va souvent caractériser l'activité du mouvement ouvrier. Le complément à cette politique est la capitulation devant le machinisme et la production industrielle, toujours comme politique du pire....mais comme acceptation du système en définitive)

     

    4)L'actualité de la discussion.

    Face à la proposition du traité de constitution européenne de 2005, dont l'essentiel visait à faire accepter l'idée que la libre concurrence, la libre circulation des capitaux, le commerce sans entraves, constituaient le progrès des nations, et le progrès pour tous, les français ont dit NON à 54%, comme les néerlandais avec plus de 60% des voix. Personne parmi les leaders politiques n'est revenu explicitement à cette discussion ci-dessus tant cela ne fait pas moderne de citer Marx. Pourtant...même si on doit réfuter la conclusion de ce dernier, on peut reconnaître que sa démonstration reste plus que jamais valable. Par instinct d'autodéfense, les salariés ont dit non. Soyons sûrs que les principes dont il est question sont porteurs de guerre. De façon indirecte, ce qui se passe au Moyen Orient illustre cette question. Derrière les pseudo débats sur les ethnies, sur les religions, sur la "démocratie", sur la soi-disant libération des femmes, sur l'intégrisme, sur le terrorisme, sur le droit des juifs à coloniser la Palestine..; etc, il y a tout ce sur quoi on fait silence soit relativement, soit complètement: la nécessité pour l'Occident d'ouvrir de grands marchés de libre-échange à la porte ouest de l'Asie pour y exporter les marchandises capitalistes en surnombre, pour y exploiter librement le pétrole afin de tenter de prolonger l'ère du pétrole à bas prix si bénéfique d'abord à l'industrie, pour interdire les moyens de la dissuasion nuclaire. Il s'agit visiblement du "cul de sac" dont parlait Engels tant du point de vue du pétrole, que du terrorisme dont la preuve est faite qu'on assiste non pas à la multiplication des pains, mais à celle des jeunes, à qui le capitalisme a enlevé tout espoir pour leurs peuples, et capables de se faire exploser avec des bombes dans le monde entier....ce qui sera incontrôlable.

    Dans cette situation, la Chine dite communiste (il convient de le souligner fortement), grâce à ses bas salaires, à son niveau de productivité, lance dans le monde entier ses textiles à bas prix et réclame le libre-échange. Elle tue ainsi le textile déjà bon marché de la Turquie et de la Tunisie, fait affluer les populations de ces pays en Europe, précipitent les salariés européens sur ces productions à bas prix, permettant ainsi une accélération de la baisse des salaires en Europe. Dans le même temps, et de façon complémentaire, l'ouverture de l'Europe, voulue par les bourgeoisies afin de provoquer à terme l'exode rural en Europe de l'est, va engendrer une concurrence extraordinaire entre travailleurs. La baisse des salaires et la hausse de la précarité sont au bout. Le soi-disant contrôle de l'immigration, dont chacun sait qu'il est un leure, va entraîner un marché de clandestins propice encore à la baisse des salaires. Des lendemains qui chantent ?

    Il est certain que les travailleurs doivent trouver les méthodes pour passer par-dessus leurs syndicats et partis traditionnels afin de réfléchir aux moyens de faire échec à ces perspectives terrifiantes, et certainement pas par le terrorisme.

     

    II)Libre échange, monnaie à valeur fixe et pillage du Tiers monde

    LES PRINCIPES DU CURRENCY BOARDS ARRANGEMENT.
    OU " LA SOUMISSION ECONOMIQUE ET MONETAIRE AUX PAYS DOMINANTS ".

    (voir " Définitions et caractéristiques de base " du CBA, en anglais, revue du FMI août 1997. Washington)
    (Nous proposons ci-dessous une synthèse et une interprétation de cet article du FMI et d'autres articles de la presse économique sur ce sujet).
    Introduction :
    Le Currency Board Arrangement (CBA) vient de la période coloniale. Il a été inauguré par la GB dans ses colonies américaines et en Inde, dans la période du 18ème et du 19ème siècles. Cela a constitué un précédent considérable. Toutes les zones monétaires établies ensuite entre une métropole et les colonies relèveront du CBA ou d'une forme approchée, entre autre la zone franc, la zone sterling.
    Il se résume schématiquement en un régime de taux de change fixe avec une très forte restriction des instruments de politique monétaire. Il caractérise la soumission monétaire et économique des colonies à leur métropole.
    Aujourd'hui ce système a été repris et imposé dans le cadre des politiques d'ajustement structurel du FMI. Le CBA constitue la base adéquate pour une libre circulation des capitaux, des pays capitalistes riches vers les pays du Tiers monde dits émergents, en ayant l'assurance de l'élimination des risques inhérents au placement des capitaux dans des économies dites fragiles. Entre autre, le CBA assure, en règle générale, la stabilité monétaire des pays émergents, donc une rémunération importante, au moindre risque, des capitaux occidentaux. De plus il entretient cette stabilité le plus longtemps possible en cas de crise financière, laissant le temps aux capitaux occidentaux de se retire en bon ordre. Seule l'explosion sociale dans les pays émergents peut entraver ces règles.

    Principes de fonctionnement dans la période coloniale.


    -Taux de change fixe avec la monnaie de la métropole. Souvent équivalence de la monnaie coloniale avec celle-ci. Dans les colonies américaines, c'est la livre sterling qui circule . En Inde la roupie est égale à la livre.
    -C'est la métropole qui règle la circulation monétaire et assure une dotation limitée de masse monétaire. La colonie n'a pas de système bancaire qui lui permette la création de monnaie " de crédit ". Dans les métropoles, les artisans, commerçants, premiers industriels recourent à des banques spécialisées, ou à la banque de France ou d'Angleterre, pour obtenir du crédit en vue du développement de leurs affaires. Ils présentent un effet de commerce d'un de leurs clients, qui n'est pas encore à échéance, et en demandent le rachat à la banque moyennant un taux d'escompte, ou taux d'intérêt, sur le crédit ainsi obtenu. Dans les colonies, il n'y a pas de banque centrale, pas de banques spécialisées pour réaliser cette opération. Le crédit n'est pas libre. La raison en est bien simple : la colonie ne doit pas faire concurrence à la métropole par le développement de ses activités économiques. C'est la métropole qui décide de la circulation monétaire, qui permet le crédit à un taux élevé et à des personnes choisies.
    -Dans le cas d'une délégation de pouvoir à un gouverneur local, celui-ci n'a pas les moyens de s'adresser à une banque pour obtenir une avance en vue de résoudre un problème social ou secourir un producteur local au bord de la faillite (il en est à peu de même dans les métropoles au 18 et 19ème siècle).
    -L'absence d'un système fiscal autonome complète ce qui précède. La colonie n'a aucune possibilité de financer administrativement ce qui lui paraît nécessaire. La métropole contrôle les ressources fiscales et en dispose. Or elle accorde aux classes riches autochtones le privilège de ne pas payer d'impôts (origine d'une corruption et d'un impunité immense). C'est une façon d'obtenir leur allégeance. Mais cette habitude perdurera.
    -Le rattachement à une monnaie forte n'encourage pas la production locale qui se trouve pénalisée du fait d'une productivité du travail faible. Les prix sont proportionnellement plus élevés dans la colonie pour des productions identiques à celles de la métropole. Une monnaie dont la valeur est adaptée à la productivité locale, doublée d'un système protectionniste, permet de protéger les productions locales. Ici, ce ne sera pas le cas. L'objectif est bien d'éliminer la petite production.
    Les conséquences sont très lourdes pour les colonies :
    -les classes riches peuvent voyager à l'aise et importer ce qui leur est nécessaire, dans le cadre de ce système monétaire et font allégeance.
    -les productions locales sont entravées.
    -le commerce intra-régional est entravé. Dans les colonies anglaises ou françaises, ce commerce était d'ailleurs interdit. La colonie ne devait commercer qu'avec la métropole. Tout commerce en dehors de la métropole était considéré comme relevant de la contrebande.
    -l'absence d'une masse monétaire suffisante interdisait le développement économique sur le même mode que la métropole. La colonie était bien en mal de pouvoir imiter la métropole, assujettie qu'elle était à un libre échange unilatéral :métropole vers colonie. Dans l'autre sens la colonie se heurtait au protectionnisme de la métropole.
    -les rentrées fiscales ne pèsent que sur les paysans, les ouvriers agricoles, les artisans (s'il en reste), les commerçants, les rares petits industriels, les fonctionnaires (avec des passe-droits considérables), les salariés. Les propriétaires terriens, les colons métropolitains, les entreprises de la métropole, exploitant les richesses naturelles du pays, ne payent en principe pas d'impôts


    Principes de fonctionnement à l'époque de l'ajustement structurel.

    1)Pourquoi revenir au CBA ? Le contexte. (voir rubrique"Euro")


    Le CBA ne peut s'appliquer naturellement qu'aux anciens pays colonisés, puisque le système suppose une autorité centrale extérieure au pays (le CBA au sens strict s'est appliqué très vite à la Thaïlande, à la Somalie et aux Etats baltes au moment de la déconfiture de l'URSS). Cette autorité centrale ne peut être qu'un organe émanant des pays riches : ce sera le FMI à partir de 82. Dans les années 60 les derniers pays colonisés s'émancipent politiquement. Dans la décennie 70 tous les pays du Tiers monde vont s'endetter massivement auprès des banques occidentales pour deux raisons. 1) Le taux d'intérêt réel dans ces banques est bas (taux d'intérêt nominal-inflation), 2)le prix du pétrole est élevé, en raison de l'ajustement du prix du pétrole sur l'inflation américaine, ceci étant négocié entre les USA et les pays producteurs de pétrole du MO (C'est ainsi que les USA obtiennent l'allégeance totale de l'Arabie Saoudite, des émirats, de l'Iran et l'Irak dans un premier temps.). Cet endettement aboutit au moratoire de sa dette par le Mexique en 1982, parce qu'elle ne peut plus payer les intérêts de sa dette, et à la mise en difficulté des banques US et anglaises. Les pays du Tiers Monde, en effet, ne parviennent plus à rembourser leurs dettes du fait de la hausse soudaine très forte des taux d'intérêt réels, lorsque les pays occidentaux se mettent à pratiquer des politiques d'austérité qui maîtrisent l'inflation. 1982 est un tournant. Le groupe des 10 mandate le FMI de superviser les demandes d'emprunts venant du Tiers monde et de les conditionner à de rigoureuses politiques d'austérité économique, complétée par d'aussi rigoureuses politiques de restrictions monétaires.
    C'est à ce moment là également que les occidentaux élaborent l'idée que la libre circulation des capitaux, sur tous les marchés, permettrait de faire passer les prêts de capitaux essentiellement par les marchés financiers et non plus directement par les banques. Ainsi, les secousses bancaires des années 80 devraient être atténuées. En 10 ans les occidentaux convainquent les pays du Tiers monde les plus riches que s'ils veulent emprunter et attirer les capitaux étrangers, il leur faudra non seulement accepter le libre échange, une monnaie à valeur fixe, mais avoir des marchés financiers " modernes ", qu'on appellera émergents. C'est la plus gigantesque organisation du pillage en règle et de la soumission politique, économique et monétaire des pays du Tiers monde qu'on n'ait jamais imaginé. Dès lors les capitaux occidentaux vont drainer, par les marchés financiers émergents des pays du Tiers monde, tout le capital nouvellement créé de ces pays (application stricte et terrible de la théorie d'A.Emmanuel), jusqu'à leur ruine, jusqu'au chaos social, jusqu'à réduire la moitié de la population à la misère, et ceci au nom des principes d'orthodoxie économique, que l'on déguise en politiques dites de développement.
    Dans ce contexte le retour au CBA est indispensable.

    2)Le retour au CBA dans les pays soumis à l'ajustement structurel.
    -Il peut y avoir différentes formes de rattachement à une monnaie dominante, plus ou moins souples, toutes visant à la stabilité de la monnaie.

    (Motif : éviter l'inflation ravageuse qui se produit dans les pays du Tiers monde lorsque l'économie ne répond pas aux critères de gestion du capitalisme, c'est à dire une monnaie qui doit permettre de véhiculer du capital sans le déprécier. Ce motif fondamental était parfaitement justifié du point de vue des seules exigences de la circulation internationale du capital. Il apparaît aussi justifié du point de vue des besoins des gens si, pour l'échange, les citoyens utilisent une monnaie dont le rôle est de transporter du capital. En général, ils sont obligés d'utiliser cette monnaie et ils font les frais de l'inflation naturellement... Cependant, pour échanger leurs produits, pour simplement vivre, les gens ont besoin d'une monnaie d'échange qui ne soit absolument pas un véhicule de capital (telles que les argentins viennent spontanément d'en créer), c'est à dire une monnaie régionale. Celle-ci les protégera de l'inflation, mais n'aura aucune valeur internationale de type capitaliste. Ce que subit actuellement l'Argentine permet de reposer la question de la légitimité du protectionnisme, et du rôle néfaste de la monnaie capitaliste).

    On peut envisager aussi le rattachement à un panier de monnaies internationales, à quelques monnaies seulement, à une monnaie forte, au dollar plus précisément. L'Argentine, dont les économistes sont liés de très près aux USA, a fait le choix d'établir l'égalité 1 peso à un dollar en 1991. On peut donc tout payer en dollars, mais chaque citoyen ne peut pas avoir une réserve en dollars qui dépasse un certain seuil (ceci pour éviter la fuite des capitaux, mais cette mesure ne touchera que les.petites gens. Les gens très fortunés trouveront le moyen, du fait de leurs relations, de placer massivement de l'argent à l'extérieur du pays).
    Ce rattachement fixe à une monnaie dominante est très pervers. Les monnaies dominantes ont une valeur fluctuante depuis 73, officiellement depuis les accords de la Jamaïque en 76. Les pays du Tiers monde sont donc liés, par leur monnaie, à toutes les fluctuations internationales. C'est une aggravation par rapport au 19ème. Il faut un acte du parlement pour modifier ce rattachement. On sait que les pays dominants maintiennent la stabilité de leurs monnaies par des politiques de rigueur assez fortes. Les pays soumis doivent donc se livrer également à de bien plus terribles politiques de rigueur pour maintenir non artificiellement le rattachement, dans une situation économique de bien moindre richesse en capital. Sinon, si ce rattachement n'a pas de support économique réel, se créeront des marchés noirs de taux de change ce qui risque de conduire au désastre les politiques du FMI.

    -Ce rattachement maintient des prix intérieurs peu compétitifs, dans une situation où la petite et moyenne production n'est pas protégée.
    -C'est le FMI qui décide de la politique monétaire, donc de l'importance de la masse monétaire, donc de la politique sociale. Retenons bien que la stabilité de toute monnaie dépend aussi de la moindre intervention de l'Etat en matière sociale, c'est à dire de l'interdiction faite à l'Etat de créer de la monnaie pour son propre compte. Ce dernier ne peut envisager une politique sociale que sur la base de prélèvements fiscaux ou d'avoirs importants venant de l'étranger par exemple. De même la création monétaire classique, par les agents économiques qui demandent des prêts aux banques, est strictement limitée et encadrée par un taux d'intérêt élevé. Ce dernier doit se tenir à niveau exceptionnel pour répondre aux attentes des capitaux étrangers qui arrivent sur les marchés financiers émergents.
    -La monnaie de réserve est représentée par la monnaie des pays dominants (dans le cas de l'Argentine, des dollars).Le pays soumis ne peut pas utiliser ces réserves comme il le veut. Ces réserves doivent servir essentiellement à empêcher la dévalorisation monétaire, dans une crise financière.
    -De ce fait la petite et moyenne production est entravée par un manque très important de crédit. Or comme elle subit de plein fouet la concurrence du pays dominant, elle a le plus grand mal à se maintenir ; elle est cependant pourvoyeuse du plus grand nombre d'emplois.
    -La banque centrale est donc presque inutile, comme le dit le FMI, elle n'est qu'une chambre d'enregistrement. Elle ne joue aucun rôle dans la politique monétaire du pays. Elle ne peut, en outre, jamais être un prêteur en dernier ressort, à moins de balayer les accords avec le FMI, de fermer relativement les frontières, et de contrôler les capitaux. Elle doit maintenir les réserves monétaires en excès avant tout. Dans tous les pays occidentaux, une banque centrale, indépendante de l'Etat, devient automatiquement " prêteur en dernier ressort ", et en a les moyens, ce qui permet de surmonter les graves crises sociales éventuelles, ou les catastrophes naturelles. Cela est interdit à un pays du Tiers monde dans la mouvance du CBA.
    La banque centrale ne pourra jamais créer plus de monnaie nationale que le montant des réserves. Celles-ci fonctionnent comme un gage. Ceci s'appuie sur une théorie économique tout à fait fausse et éculée, qui prétend que la monnaie nationale doit être strictement gagée sur l'or (19ème siècle), ou sur une devise étrangère forte. Les USA, tout au long de leur histoire, ont dérogé, dans les faits, à ce principe. Ils ne l'ont jamais appliqué car ils se sont passés de banque centrale pendant tout le 19ème, laissant au système bancaire la liberté de créer de la monnaie comme c'était nécessaire. Il n'y a pas eu d'inflation aux USA, sauf pendant la guerre de sécession ! Ce principe n'a qu'un objectif : étrangler l'économie des pays du Tiers monde.
    -Seuls les prêts du FMI peuvent permettre à l'Etat de faire face à une situation sociale et économique difficile, mais au prix d'un endettement toujours plus important, qui obligera à renforcer les politiques d'austérité (c'est pourquoi les hôpitaux du Brésil n'ont plus de médicaments…entre autre chose), et à réclamer à nouveau une aide extérieure : spirale infernale.
    -L'Etat va donc se livrer à des privatisations d'envergure, non seulement parce que cela est désiré par le FMI, mais pour remplir ses caisses et avoir une marge de liberté dans ses dépenses. De ce point de vue l'équilibre budgétaire demandé est terrible dans une situation où l'Etat ne peut pas se procurer de la monnaie (auprès de la banque centrale par exemple, au titre de l'emprunt intérieur), et a peu de rentrées fiscales. Les acheteurs des entreprises privatisées sont des groupes économiques venus des pays dominants (en Argentine les USA, l'Allemagne, puis l'Espagne possèdent toute l'industrie)
    -Les rentrées fiscales dans les pays du Tiers monde n'ont rien à voir avec celles des pays dominants, où, du fait des révolutions sociales passées, les bourgeoisies ont dû mettre au pas les grands propriétaires fonciers, sous la pression du salariat et de la paysannerie, en leur faisant payer des impôts. Dans tous les pays du Tiers monde, les propriétaires terriens, issus des classes qui ont collaboré avec le colonialisme, ne payent pas d'impôts. De ce fait la bourgeoisie, puis les grands fonctionnaires, ont obtenu les mêmes privilèges. Seuls les salariés, les fonctionnaires, et les paysans payent l'impôt sur le revenu. Tout le monde paye les impôts indirects par contre. En Argentine, le pouvoir a toujours fait appel au cens civique, pour que les " grands " payent des impôts !.
    L'encadrement monétaire et économique imposé par le FMI, particulièrement avec le CBA, signifie clairement la dépendance totale des ex pays colonisés aux pays dominants. Il s'agit, dans ce cadre, de l'étouffement de toute possibilité de suivre une voie industrielle identique à celle des pays dominants ; tout au plus, les pays du Tiers monde peuvent avoir des industries complémentaires (par exemple d'assemblage) à celles des grands groupes occidentaux. : les maquiladoras du Mexique et de toute l'Amérique centrale.
    Si, en outre, la classe dominante des pays du Tiers monde, consciente de n'avoir aucune autonomie, choisit par opportunisme, et parce qu'elle ne veut pas défendre un intérêt national, de se soumettre au FMI, elle va tenter de profiter pour elle-même des emprunts étrangers sans vergogne. Prédatrice au moment de la colonisation, elle devient plus que jamais corrompue avec l'ajustement structurel, parce qu'elle sait qu'elle a tout à perdre à s'opposer aux pays dominants. Il y a des exceptions à cela. Des bourgeoisies même corrompues (celles de la Malaisie, de Taïwan, de l'Arabie saoudite, de l'Iran, de l'Irak….) décident parfois, devant l'excès de domination, des USA entre autre, de réagir violemment, en fermant les frontières, en contrôlant les capitaux, en finançant des groupes terroristes, sans cesser d'exploiter et de terroriser leurs populations.

     

    III)ACTUALITE DU LIBRE ECHANGE

    L'une des choses la plus importante que nous aurions pu conseiller aux révolutionnaires arabes était de faire campagne contre tous les accords de libre échange entre leur pays et l'Europe ou la France; ces accords ayant ruiné leur économie... mais "nos" révolutionnaires bien de chez nous s'y sont refusé.....

     

    Le Monde du 6-12-11: mise en cause de l'accord de libre échange entre le Corée du Sud et les USA.

    Cet accord meurtrier, entre autres dans l'agriculture, avait provoqué le suicide de nombreux paysans ruinés et expropriés par les grands du lobby agricole des USA. Aujourd'hui l'opposition promet d'annuler cet accord si elle l'emporte aux législatives d'avril 2012. Une raison valable pour une fois de voter pour l'opposition !

    Même la magistrature de ce pays a estimé que la souveraineté judiciaire était mise en cause par cet accord !

     

    Les propositions de libre échange entre les USA et l'Europe !

    En discussion actuellement fin 2013, cette perspective est totalement effrayante. Il faut lire à ce sujet le n° du Monde diplomatique du mois de novembre 2013 qui explique dans un article remarquable comment les multinationales US visent de s'implanter en Europe grâce à ce libre échange en faisant disparaître tout acquis social, tout service public, tout Etat de droit.. Ce serait l'implantation directe, sous couvert de la commission européenne, de la "stratégie du choc"... C'est ce qu'on veut nous faire voter en juin 2014: la barbarie en marche.

    Pour avoir une idée de la barbarie aujourd'hui, il faut lire les descriptions de la misère engendrée par la troïka (banque européenne, FMI, commission eurpéenne) en Espagne, en Grèce, au Portugal, en Italie du sud, en Bulgarie, et les décisions du FMI en Tunisie, en Egypte, et dans bien d'autres pays

    L'opposition populaire à cet accord a fini par faire flancher une partie des politiques.

    En 2016, cet accord est au point mort.

     

    PROTECTIONNISME ET LIBRE ECHANGE A L' HEURE DE TRUMP.

    (AMC 5-2-2017)

    Fallait-il l'élection du fascisant Trump pour que ces questions difficiles soient discutées d'une façon plus pertinente ? Peut-être mais pas sûr. Pertinente du point de vue de qui ? Du point de vue de la compétitivité des quelques lobbies dont on dira que celle-ci ne fait qu'exprimer l'avancée du progrès technique ? Du point de vue du porte-monnaie des consommateurs qui peuvent acheter ? Du point de vue de ceux dont l'emploi dépend temporairement des loobys ? Du point de vue des nations dont les productions sont mises en cause par le libre échange ? Du point de vue des besoins humains de tous ? Mais dans ce dernier cas, qui décidera de ces besoins humains ?


    Il faut dire de quel point de vue on se place. Pour défendre l'emploi aux USA, Trump a annoncé, entre autres aux ouvriers du Kentucky, qu'il allait faire mettre des droits de douane à hauteur de 30% du prix des autos, à tout véhicule acheté au Mexique. Ceci dans le but de faire rapatrier aux USA une partie de la production des automobiles. Et, relativement, cela a marché. Au moins temporairement.
    Cela s'appelle établir des barrières douanières pour éviter une nouvelle l'hémorragie des industries automobiles à l'étranger, tandis que les automobiles arrivent bon marché de l'étranger.


    Dans le nord de la France les industries du minerais de fer, de la métallurgie, du charbon, du textile, ont été liquidées sous l'effet de la concurrence des mêmes industries à l'étranger, et de l'industrie du pétrole, qui ont répandu en retour leurs produits à bas prix. Un chômage massif en a été le résultat. Les retombées négatives en termes humains et politiques ont été considérables. Jamais les intéressés n'ont pu se saisir de ces questions, ils ont été mis devant le fait accompli.


    Ces exemples sont intéressants car ils mettent en évidence qu'aux USA, en France (et en Europe), le choix de délocaliser ou de supprimer une industrie qui aurait dû être défendue du point de vue de l'emploi, venait des lobbies nationaux eux-mêmes.
    Le protectionnisme ou le libre- échange sont en effet des politiques imaginées par des hommes du pouvoir, économique et politique. Dans le but d'investir là où le profit sera le plus élevé, face à une concurrence qui peut être dévastatrice pour les capitaux.
    Ces choix ont porté les débuts du capitalisme. Tous libre-échangistes, tels furent les premiers manufacturiers anglais, les grands commerçants, les pionniers du commerce triangulaire, les agrariens de la production esclavagiste de sucre et de coton, les manufacturiers des villes portuaires du grand commerce, et leurs banquiers.


    Ces politiques libre-échangistes furent à la base du colonialisme, de l'affrontement entre les Etats dominants et les régions dominées, des guerres civiles contre les populations autochtones, des guerres pour le partage du monde, de la dévastation du Moyen Orient, et aujourd'hui des combats entre pays industriels de même capacité productive.


    La riposte, quand elle était possible, fut partout l'organisation de frontières douanières, par exemple celles imaginés par l'économiste List en 1840 (Le Zollverein) autour des Etats allemands isolés, contre la Grande Bretagne décidée à y imposer ses produits, et à tuer l'industrie artisanale et le petit commerce, au nom du progrès, de la modernité, et à semer un chômage considérable.
    Les défaites furent multiples. L'Inde, qui n'eût pas le temps de se défendre, fut contrainte au 18ème siècle d'abandonner toute son industrie de tissage du coton, fonctionnant avec des métiers à bras, qui faisait sa notoriété dans le monde entier. Elle fut inondée par les tissages venus des industries mécaniques de la GB ; le peuple indien tomba dans la plus ignoble des misères ; les paysans furent contraints de produire plus de coton que de riz pour les industries anglaises. Cela s'appela le progrès dans le libre- échange. En effet les métiers mécaniques présentent toutes les caractéristiques du " progrès " technique contre les métiers à bras ! Mais en aucune manière ils ne constituent le progrès social, lequel ne peut être qualifié comme tel que par les intéressés.


    L'Egypte tenta de résister, mais la GB bloqua tout commerce dans les ports égyptiens, par la méditerranée et la mer rouge, après 1840, pendant de longs mois, jusqu'à la capitulation de Mehmet Ali. Etc…


    Il en fut ainsi dans le monde entier. Les vainqueurs furent les Etats européens, la GB au premier chef.


    Aujourd'hui les mêmes questions ressurgissent au sein même des pays industrialisés et sont portées par des nationalistes qui, sous couvert de protéger l'emploi contre les productions à bon marché venues de l'extérieur, veulent ethniciser leur Etat et en chasser les éléments impurs, en s'appuyant sur des populations ouvrières tombées dans la déchéance sociale, ou en voie de l'être. Une partie de la population se range dès lors derrière la bannière du protectionnisme, qui sauve leur emploi momentanément. C'est l'effet Trump aux USA. Ce pourrait être l'effet Le Pen en France.

    Cette confusion entre un Etat qui, par mesure de protection, interdirait les fermetures d'entreprises, baillonnerait les actionnaires, interdirait les délocalisations, et un Etat qui justifierait ces mêmes mesures pour des raisons ethniques, et en profiterait pour appeler au pogrom contre les étrangers, cette confusion n'est pas levée par une gauche paresseuse intellectuellement, incapable de faire face aussi bien à l'assaut ethnique lepéniste, qu'à la mondialisation.


    Inversement des populations ouvrières produisant de l'acier en Chine, ou du textile au Bangladesh, au Vietnam, en Indonésie se rangent de fait sous la bannière du libre-échangisme de leurs gouvernements pour pouvoir vendre en Occident, sous peine de voir leurs emplois disparaître.
    Dans l'un et l'autre cas, il n'y a pas d'issue à terme pour les masses populaires, sauf dans la guerre.


    Cependant une chose est sûre, et même si Marx doit se retourner dans sa tombe, on ne peut être libre-échangiste, car le libre-échange est la politique du dominant qui doit écraser le dominé. Les marchandises qui circulent dans ce cadre, ne relèvent pas d'une circulation libre et démocratique, c'est tout le contraire.


    Bannir le libre- échange, revient donc à dire que les frontières doivent s'opposer à la libre circulation des marchandises, en vue de les refouler, car elles détruisent les marchandises locales….Mais qui produit ces marchandises destructrices ? Qu'est-ce donc que ces marchandises qui circuleraient librement en si grand nombre qu'elles seraient des facteurs de destruction ?? Sont-ce des bananes, des oranges, des épices qui viennent agrémenter l'ordinaire des populations qui ne peuvent en produire ? Si ce n'était que cela, où se trouverait ce facteur de destruction ?


    Il s'agit en fait de marchandises produites volontairement en excédent, qui doivent se substituer aux productions locales, en vue de s'approprier un marché par la force, dans le cadre d'une politique planifiée, agrémentée par des escouades de policiers ou de soldats, pour faire de l'argent. Quand le pays visé en a la force, sous la pression des populations, il crée des droits de douane pour refouler ces marchandises. Cela s'appelle donc le protectionnisme. Ce système s'appuie nécessairement sur un gaspillage important de marchandises, puisque certaines doivent rendre d'autres inutilisables, au point où il faudra les détruire.


    Ce couple libre-échange/protectionnisme est capitaliste par essence. Il est fondé sur une surproduction intentionnelle, qui doit être à bas prix, en associant bas salaires et innovations, dans des emplois non garantis.


    Il ne fonctionne pas de façon spontanée, il est agi historiquement d'abord par des marchands qui veulent faire fructifier un capital et prendre du pouvoir dans un périmètre défini, puis par les industriels capitalistes. Cette surproduction n'est pas une conséquence fatale d'un capitalisme qui impose ses lois face à l'impuissance générale, il est agi par des classes sociales (bourgeoisies et propriétaires fonciers) en pleine connaissance de cause.


    Ces questions intéressent-elles les masses populaires ?? Oui, et au premier chef. Mais reste à savoir comment les poser correctement de leur point de vue. C'eût été le travail d'une internationale des travailleurs et des peuples, laquelle a été soigneusement écartée au début du 20ème siècle, au profit de dictateurs prétendant cependant agir pour les masses populaires ! Les difficultés de compréhension actuelles viennent pour partie de là.


    C'est ici que l'intellectuel honnête doit remplir sa mission, si tant est qu'il en ait une…
    De ce point de vue, il faut revenir à l'exemple des industries automobiles aux USA. Car on y trouve un comble de stratégie ignominieuse vis-à-vis de populations séduites, de longue date, par la marchandisation, et par un statut et un standing de vie du travailleur américain octroyé, où la possession de la voiture joue un rôle non négligeable.


    Les grandes sociétés automobiles américaines (GM, Ford, Chrysler…) et les manufactures diverses et variées, se sont construites aux USA fin 19ème siècle et au début du 20ème siècle dans un monde capitaliste largement protectionniste au départ (sauf la GB qui se servait du libre-échange comme d'une voiture bélier), et ont fait l'apogée de ce pays. Puis sous l'effet de la concurrence, ces mêmes sociétés ont créé, avec l'appui des gouvernements successifs, ce qu'on a appelé les " Maquilladoras " (entreprises maquillées) au Mexique, pas moins de 41 groupes d'industries, directement derrière la frontière américaine, d'est en ouest, de Brownsville à San Diego, pour profiter de l'absence des taxes, et des bas salaires des ouvriers mexicains.


    Elles ont en même temps construit un mur de ferrailles de 1130 km, à l'époque des Bush (quand on démantelait le mur de Berlin..) puis Obama, pour empêcher les mexicains d'entrer aux USA. Aujourd'hui Trump veut faire un mur en béton de 3200 km….
    Liberté de circulation des marchandises, interdiction de cette même liberté pour les populations, ainsi va la liberté du commerce.
    Les ouvriers mexicains devaient soit fabriquer des pièces automobiles, soit les assembler, pour que les voitures ainsi produites soient vendues pour 70% d'entre elles aux USA même, à bas prix, sans droits de douane. En même temps en 1994, les USA signaient avec le Mexique et le Canada un traité de libre-échange, à sens unique et bien ficelé pour que n'entrent aux USA que ce que les grandes sociétés désiraient, et pour que le marché mexicain soit inondé de produits agricoles identiques à ce qu'il produisait, en vue de détruire la production locale…. Génial n'est-ce pas ? Les USA exigeaient également la modification des lois sur la terre au Mexique qui interdisaient de céder celle-ci à des étrangers, ainsi que son sous-sol, comme dans maints pays où la possession collective avait eu un sens dans le passé (Japon, Brésil, Afrique….). Ceci dans le but de prospecter librement et de se livrer à l'extractivisme. Sauf que les populations locales ne se sont pas laissé faire.


    Il n'a pas échappé aux ouvriers américains que cette politique équivalait à des délocalisations et faisaient perdre des emplois aux USA même. Et il n'a pas échappé aux ouvriers mexicains qu'ils étaient sous-payés dans les maquilladoras, d'où leurs tentatives en continu d'entrer clandestinement aux USA. Des travaux importants ont été faits sur cette question.


    A noter que si les mafias de la drogue se développent tant au Mexique, c'est sans doute la contrepartie délétère d'une situation pourrie où à la place de la solidarité entre les travailleurs américains et mexicains, la situation n'offre que le poison et l'assassinat.
    On n'a encore jamais vu les masses ouvrières des deux pays unir leurs efforts pour agir en commun, de part et d'autre de la frontière, mais pour demander quoi ?? Des salaires équivalents des deux côtés de la frontière ? Cela nécessite de poser la question des maquilladoras et du mur !


    Pourraient-elles demander une juste répartition des emplois entre les deux pays ?? Or ce sont des emplois d'industries d'exportation qui ne trouvent avantage à être au Mexique qu'en raison des bas salaires….. Les exportations se dirigent principalement aux USA mais aussi dans tout le continent et hors du continent : on trouve en effet les sociétés Nissan, Fiat Chrysler, BMW, Toyota, Volkswagen, Mazda, Honda, Daimler, Audi, et GM et Ford, qui veulent participer à la fiesta des bas salaires.


    Les ouvriers devraient-ils se faire les gestionnaires de la politique automobile et de la concurrence entre groupes ? Sachant que par définition les industries d'exportation de n'importe quel type de marchandises sont en surproduction… Les ouvriers pourraient demander l'ouverture des livres de compte, et poser des questions sur ce monstrueux gaspillage de productions de voitures !
    Encore une fois l'absence d'une solidarité ouvrière organisée, pour des objectifs simples est un terrible manque: des emplois pour des productions utiles avec des salaires semblables.

    Le silence actuel sur ces questions exprime à quel point les travailleurs en général ne contestent pas le système de la marchandisation, aliénés qu'ils sont, par l'espoir de dépasser individuellement leurs conditions sociales.
    On a pris l'exemple de l'industrie automobile qui est le pire exemple qui soit.


    On pourrait aussi prendre l'exemple de l'énergie eu Grèce. Deux entreprises publiques DEI dans l'électricité et Desfa dans le gaz sont en position de force pour produire et gérer presque la moitié de l'énergie utile pour les consommateurs grecs. Leur permettre d'investir dans des énergies renouvelables semblerait relever d'une rationalité conforme aux besoins de ceux-là. Mais c'est sans compter sur le gendarme européen qui exige la " dérégulation ", la mise en concurrence avec des entreprises étrangères, françaises, allemandes, italiennes….dans un libre- échange européen total. C'est ainsi que la production locale ne pourra être préservée, au nom d'arguments financiers et de profit, et au nom, de façon perverse, du " progrès " puisque c'est la France qui devrait intervenir pour les énergies renouvelables ! Les grecs pourraient demander à titre transitoire, des crédits pour leurs entreprises publiques pour mettre en valeur ces énergies…


    Voler ou détruire une production locale, ou agir pour que celle-ci ne puisse se développer, au profit des vampires étrangers, aboutit à interdire l'expression des travailleurs et consommateurs concernés, ou à la rendre très difficile. Ou aboutit à opposer les travailleurs entre eux..
    Il est absolument nécessaire de protéger par des lois une production locale jugée utile. Mais cela ne peut se faire qu'au cas par cas, et nécessite que les populations se saisissent de leurs propres problèmes, définissent ce qui leur est utile pour vivre et travailler, dans le cadre d'un appel aux populations voisines pour qu'elles fassent de même. Cela suppose qu'elles puissent s'élever avec force contre la surproduction organisée, dans tous les domaines pour détruire le tissus social et produire la guerre civile.


    Jusqu'ici les populations résistent à la guerre civile et aux pogromes, vers lesquels on les pousse, mais elles n'en viennent pas à s'interroger sur la nature des productions elles-mêmes, car les directions syndicales et politiques ne s'engegent pas sur ce terrain.

    par exemple, les licenciements dans la dernière usine de production de cigarettes à Riom posent la question de la nature de la production utile aux citoyens. Faut-il défendre une production de cigarettes ? La question est éventuellement "tordue" car on sait que les cigarettes à bas prix vont arriver en masse clandestinement des pays de l'est ou d'ailleurs. Mais il faut en discuter.

    Des délocalisations ont posé et posent problème aujourd'hui. Elles font la une des discussions. Il y a peu, c'était par exemple Renault.

    Elles sont toutes posées dans les mêmes termes. Cela commence par une "nécessaire" restructuration: proposition de travailler plus pour un salaire moindre. Les syndicats refusent, les entreprises délocalisent ou ferment et vont ailleurs, au sein de l'Union européenne ( en Espagne, Roumanie) et au Maroc, pour Renault.

    Autres exemples récents :

    -A Amiens l'usine US Whirlpool de sèche-linges perd de l'argent en France, doit partir pour la Pologne en juin 2018, 290 salariés sont concernés; idem pour sa production de lave-linges partie en Slovaquie, Italie, Pologne. Seules quelques marques comme Brandt, Vedette, restent en France.

    -A Amiens toujours, l'usine US Goodyear de production de pneus a annoncé un licenciement collectif en 2009 concernant 1000 emplois pour aller en Pologne, les salariés ayant refusé la nouvelle grille de salaires

    -A Clairvoix l'usine française, Continental, est partie en 2007 produire des pneus en Roumanie, de même que celle de Hanovre. A Timisoara en Roumanie, Continental a embauché 1300 ouvriers payés 400 euros par mois.

    Ces exemples sont emblématiques.

    -Ils nourrissent la haine de l'Europe, puisque les délocalisations ont lieu en Europe. L'Europe a représenté pour les oligarchies nationales ou internationales un vivier de bas salaires et des droits sociaux extrêmement différenciés. Le "gouvernement" de l'Europe, tout comme le syndicalisme européen, n'ont pas cherché à unifier les conditions sociales d'un pays à un autre, si bien que les travailleurs peuvent aisément être mis en concurrence, en Europe même. La question de l'Europe devait se discuter sur ce terrain là, essentiellement.

    -Les américains possèdaient (possèdent) les deux premières usines. S'opposer à la fermeture ne relève pas de la défense d'un capitalisme national, mais de la seule défense de l'emploi. Qui peut exproprier le capital US ?

    -Les productions de ces entreprises, comme celles de Continental, dépassent (aient) le marché national, elles visaient aussi l'exportation.

    -L'usine de Whirlpool existe déjà à Lodz en Pologne et produit des frigos et des cuisinières pour toute l'Europe, l'entreprise va y ajouter les sèche-linge. De nombreux ukrainiens vont venir y travailler... Les ouvriers étant payés 540 euros par mois (!). L'EUROPE S' EST BIEN CONSTRUITE SUR CETTE DIFFERENCIATION DE SALAIRES. C'est l'aspect principal de la question.

    Comment le gouvernement français pourrait-il interdire la fermeture ? les USA retireraient leurs billes de suite... Les travailleurs peuvent occuper l'usine, mais ils ne le font pas. Pour produire des sèche-linges ?

    De plus, est-ce génial de produire des sèche-linges ?? (Ou des couches de bébé plutôt que des pots ? Ou des emballages sophistiqués plutôt que des sacs en papier...ou produire n'importe quoi pour garantir des emplois)

    Faut-il produire pour l'exportation pour tuer des productions nationales du même type ? Faut-il produire pour une surproduction évidente, les machines étant mises au rebus dès qu'un nouveau modèle apparaît ?

    Quelle peut être une action ouvrière efficace ? Exiger un repreneur pour produire la même chose ? Pour faire quoi ??

    S'il s'agissait d'une production locale pour un marché local, garantie de longue date, concurrencée par une production du même type à quelques km, la réponse serait évidente. Mais dans les cas ci-dessus, jouer l'exigence de la garantie de l'emploi, mordicus, tout seuls, paraît voué à l'échec, car il n'y a aucune ébauche d'organisation de solidarité ouvrière en Europe.

    L'opposition à l'Europe s'est faite sur ses institutions, sur la monnaie unique et ses règles hyper contraignantes, en matière budgétaire, mais ne s'est pas faite sur la question de la différenciation des salaires, sur les conditions de travail.. L'Europe à 27 est une garantie de réserves industrielles de travailleurs immenses, dont les pays sont aux ordres de Bruxelles. C'est de cela dont il s'agit.

    Qui a fait campagne sur l'égalité des salaires et des prestations sociales en Europe ?? Qui a fait appel à une ébauche d'association des travailleurs en Europe ? Qui pose la question "Quels emplois pour quelles marchandises ?", "Quelles productions utiles ?"

    Les réponses ne peuvent être des réponses abstraites. Quelles réponses au cas par cas ?


    AMC le 5-2-17 revu fin avril 17


     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Polémique : Protectionnisme ou libre échange ?

    (polémique avec des cdes du NPA)


    Henri Wilno, dans son papier " ni le protectionnisme ni la mondialisation capitaliste ", comme JM Babaur, ni protectionnisme ni libre échange, raisonnent l'un et l'autre dans le strict cadre des politiques capitalistes entre capitalistes, et refusent de s'ouvrir au foisonnement d'idées et d'expériences qui indiquent que dores et déjà, des parties non négligeables de la population se placent dans le cadre d'une résistance concrète au capitalisme et d'une protection de ce qui est produit, contre les injonctions de la Troïka, du FMI, de l'Europe et des Etats, et contre celle également de " la révolution " avant tout, mais de fait dans le seul cadre du raisonnement capitaliste. Ce qui rend la discussion superficielle.
    Chesnais dans " Carré rouge " semble mettre le doigt sur ce foisonnement. Il ouvre un espace de respiration. Mais une majorité de " marxistes " ne veulent rien voir en dehors de leurs incantations traditionnelles pour la révolution sociale, et pensent qu'il ne peut rien se passer en dehors de, et avant, la " chute " qu'ils attendent….. et s'en tiennent en attendant aux énoncés des gestionnaires capitalistes.

    Pour commencer, Wilno s'abstient de citer ce que Marx écrit en 1848 à la fin de son discours sur le libre- échange. Je cite : " … le système protecteur est conservateur, tandis que le système de libre échange est destructeur. Il dissout les anciennes nationalités et pousse à l'extrême l'antagonisme entre la bourgeoisie et le prolétariat. En un mot, le système de la liberté commerciale hâte la révolution sociale. C'est seulement dans ce sens révolutionnaire que je vote en faveur du libre-échange "
    (souligné par moi).
    C'est parce que Marx croyait que la GB était proche de la révolution sociale qu'il écrivait cela, ce en quoi il s'est totalement trompé ; sinon il pensait clairement que le libre-échange était dévastateur. Il en donne un exemple terrible sur la façon dont l'Inde a été détruite et dépecée par la GB au 18ème siècle. Face à Marx, l'allemand List voyait clairement que la GB désirait s'approprier les Etats allemands pour les empêcher de s'unir et de s'industrialiser, en y déversant ses marchandises, exactement comme elle avait prétendu le faire vis-à-vis du Portugal au début du 18ème , de l'Inde au 18 et 19ème siècle, puis de l'Egypte en 1830, et des Etats américains, provoquant la révolution américaine et l'indépendance.

    Il faut quand même rappeler à Wilno que s'il y eût face à la GB des Etats capables de s'industrialiser, ce fut grâce au protectionnisme. Et ce, jusqu'au début des années 1980. Rien de plus normal que des nations désindustrialisées ou en voie de l'être, dans le cadre du capitalisme, se posent la question par la voie de leurs économistes, face aux impérialismes, du retour au protectionnisme, pour se protéger ou se reconstruire (exemple des pays d'Amérique latine). La question est sérieuse. On ne peut répondre par le " ni..ni " et un mépris rigolard, sans offrir de perspective immédiate pour combattre la mondialisation barbare actuelle, ou en se contentant de dire " il faut d'abord renverser le capitalisme "…Ah oui ? Comment ? Et qu'est-ce que cela veut dire ?..
    Si nous ne sommes pas capables d'offrir des ripostes immédiates, en sachant qu'elles sont précaires, et en le disant, en sachant qu'elles auront des effets pervers, mais en le disant, nous sommes de rigolos, des faiseurs, des baratineurs en théorie, des gens non crédibles. Quand on résiste, qu'il s'agisse d'une classe sociale, ou d'un Etat, on résiste comme on peut, avec les outils qu'on a à disposition. Faire la grève pour des augmentations de salaires dans une économie ouverte à la concurrence, c'est aussi limité et fragile que d'établir un tarif douanier pour protéger des tomates et des fraises.

    Wilno et Babaur veulent la bonne solution, la solution sans faille, à intégrer dans un bon programme idéal…ça n'existe pas. La seule bonne solution c'est de faire reculer l'adversaire. Point.

    Marx pensait également que la dévastation pouvait produire la révolution ! Il ne pouvait imaginer bien sûr que l'humanité connaîtrait non pas la révolution mais le nazisme.
    On est toujours tenté de penser que des situations extrêmes peuvent engendrer des rébellions violentes qui feraient tomber le système. Ce n'est pas ce qui se passe aujourd'hui. Toutes sortes de situations se présentent dont des situations désespérés. Par exemple les Chababs somaliens s'en sont pris, au Kenya, aux foyers les plus représentatifs et corrompus de l'Occident (capitaliste) avec un langage religieux, parce que le langage marxiste n'existe plus et qu'il n'y a plus aucune solution à la misère du peuple, que le terrorisme et le sacrifice (cf " aller jusqu'au bout… ")…..Les dictatures islamistes sont-elles du fascisme ? Pour certains à n'en pas douter. Elles sont en tous cas le produit du libre-échange que nous avons imposé… Des bourgeoisies protectionnistes, interdites par l'impérialisme, auraient-elles été un moindre mal ? Nous le pensons absolument.

    L'Argentine capitaliste et bourgeoise par son gouvernement a imposé la protection de la production nationale tout en exportant son soja aux OGM pour nos porcs, que nous achetons, ce qui lui a permis jusque-là d'engranger des excédents et des devises pour acheter les produits qui lui manquent, car le protectionnisme n'est pas l'autarcie.
    Est-ce une bonne solution ?? C'est la moins mauvaise aux yeux de sa population qui a souffert en 2001. Certains reprochent au gouvernement argentin de n'avoir pas utilisé les excédents pour rendre l'industrie compétitive et d'être tombé dans la corruption. Possible. Mais rendre l'industrie compétitive, c'est affronter les travailleurs dans leurs salaires, leurs emplois, leurs conditions de travail…Le gouvernement a hésité et préféré construire " l'unité nationale "… Il n'y a donc aucune bonne solution. La meilleure pour un réformiste, c'est de gagner du temps. La meilleure pour un révolutionnaire réaliste et démocrate, est de dire " Voilà ce que nous faisons pour résister et gagner du temps face aux rapaces. Ça ne durera qu'un temps. Cela a tel et tel inconvénient. Profitons du temps gagné pour lancer un appel aux autres peuples et établir un plan de bataille commun de résistance… "
    Mais quel plan de résistance ? Les pays d'Am latine ont inventé le MERCOSUR, un genre de marché commun capitaliste de résistance à l'impérialisme… Eh oui.. ; Mais qui est intervenu en Am latine pour faire des propositions concrètes concernant la défense des producteurs et non des capitalistes, en dehors du discours sur la révolution ou la lutte armée ??

    En Europe, les populations les plus atteintes cherchent, pour l'instant, non pas des soulèvements, mais des recompositions et des solidarités qui leur permettent de subvenir à leurs besoins en dehors du marché traditionnel.

    La discussion sur toutes ces questions, entre marxistes (disons-le pour faire simple) est entravée par un certain nombre de clichés du type " tables de la loi " ou " les dix commandements ", clichés qu'ils prennent à Marx, et qui interdisent de penser librement. Continuer de refuser de les mettre sur la table, et d'ouvrir le débat à leur sujet au motif qu'il y a de l'intouchabilité là-dedans, c'est criminel.

    Quelles sont les tables de la loi ?
    Ils'agit de :

    -a)La nécessité de la grande industrie en raison de l'amour immodéré de Marx pour l'industrie. Marx tenait cela de l'influence qu'il a subi des St Simoniens sur ce sujet, qui lui fait distinguer, de fait, l'industrie du capitalisme, alors que l'industrie, c'est (comme il l'explique pourtant dans le " Capital ") l'exploitation ouvrière, la militarisation de la production, c'est le salariat, le productivisme, la compétitivité. L'industrie n'est pas une technique, c'est une organisation du travail qui exclut militairement, par définition, que les travailleurs puissent déterminer eux-mêmes " que produire, comment produire, avec quoi produire ". Aujourd'hui, c'est pourtant ce que désirent fondamentalement les gens, contre le charabia qualifié de mensonger sur le communisme

    -b)l'acceptation, de ce fait, de la loi Le Chapelier de 1791, comme étant émancipatrice des rapports sociaux qui entravaient le développement des forces productives.
    Or la loi Le Chapelier est fondatrice du capitalisme, de la libre entreprise, contre les jurandes ou corporations qui avaient décidé de tous temps que la liberté totale des techniques entre les mains de quelques-uns créerait une situation de concurrence et de productivité qui tueraient l'emploi. C'est une position unanime de toutes les sociétés traditionnelles. La question n'est pas de revenir à des sociétés traditionnelles qui portaient également en elles le conservatisme et des formes de réaction. La question est de savoir ce qui, dans ces sociétés, était à sauvegarder, à savoir : une forme de solidarité agricole, la propriété collective de la terre, des formes de démocratie à la base, le refus de produire pour autre chose que pour les besoins des gens, un accord populaire pour des techniques non destructrices….
    Bien sûr étaient à rejeter : la soumission au divin, aux églises, la soumission aux propriétaires terriens et au pouvoir de droit divin, la condition de la femme etc…
    Quant aux nouvelles techniques entre les mains des capitalistes, elles ont été d'abord assassines avant d'être libératrices pour seulement certaines d'entre elles.

    -c)La mission historique donnée au seul prolétariat, partie intégrante du salariat, du fait de sa capacité à combattre jusqu'au bout en raison de son exploitation (la paysannerie a souvent eu les mêmes capacités dans les révolutions et jacqueries paysanne : la révolution mexicaine de 1910 que les marxistes ignorent… La commune de Paris qui représentait le petit peuple et non pas exclusivement le prolétariat). Cette mission est bâtie sur le même mode que la mission attribuée à la bourgeoisie ; celle-ci aurait eu un rôle progressif dans l'histoire (à démontrer). L'émergence de cette dernière de la bourgeoisie marchande impliquée dans la traite des noirs et l'esclavagisme pose quelques problèmes…

    -d) le mépris profond, de ce fait, pour le peuple (artisans, commerçants, paysans…), celui-ci " faisant tourner la roue de l'histoire à l'envers " (dixit Marx)
    C'est l'une de ses grandes divergences avec Bakounine, bien plus essentielle que toutes les autres.
    Ce cliché aboutit aujourd'hui à mépriser toutes les recherches individuelles ou collectives de productions autonomes. Parce qu'elles ne sont pas porteuses du "communisme ", mais du seul individualisme… ce qui nous paraît faux, car pour perdurer, elles ont besoin de solidarité.

    -e)l'idée que le capitalisme était la civilisation la plus élevée dans l'échelle des civilisations, du fait de l'enchaînement déterministe de modes de production, lequel devait produire le communisme dans une construction purement abstraite..

    -f)dans ce cadre, l'idée que les forces productives tirent le monde en avant ( notion jamais définie par Marx mais par List, lequel a fait construire des barrières douanières aux Etats allemands en 1840 contre la GB qui désirait manger tout cru ces Etats, exactement comme elle le fit de l'Inde puis de l'Egypte… ). Forces productives, dont l'élément essentiel est le capital. Une seule fois Marx émet l'hypothèse que celles-ci peuvent se transformer en forces destructrices dans " l'Idéologie allemande ".


    Si on supprimait le productivisme et la compétitivité, il n'y aurait plus de forces productives au sens de List. Les humains produiraient alors des techniques nouvelles seulement pour soulager leur peine, produire mieux, et travailler mieux et moins.

    La discussion sur la question du protectionnisme ne peut avoir lieu de façon rationnelle en raison de ce qui précède. Car les clichés décrits fonctionnent comme des axiomes qui interdisent de faire le tri dans les analyses de Marx ! Celui-ci aurait eu raison sur tout, exactement comme ceux qui jurent sur la bible…

    Soyons sérieux. Si l'Europe s'est constituée au profit du grand capital, si elle a mis en place l'euro, si elle a mis en œuvre la libre circulation des capitaux dans le cadre mondial au profit de la grande finance, si elle pratique la stratégie du choc pour dévaster explicitement certains pays marginaux ou pas, c'est bien pour interdire définitivement toute autonomie économique (évidemment dans le cadre du capitalisme) à toutes les nations européennes.
    Cela veut dire concrètement, toujours dans le cadre du capitalisme, que doivent être interdits pour l'avenir :
    -tous les tarifs douaniers protecteurs
    -Toute politique monétaire libre dans chaque nation ;
    -Toute monnaie représentative du niveau atteint par les forces productives dans chacune d'elle ;
    -Des marchés financiers dont les règles ne seraient pas soumises au centre ;
    -Des banques centrales dépendant de l'Etat ;
    - Des Etats qui tout en restant bourgeois ne seraient pas soumis à l'autorité supérieure du FMI, le " fond de la misère internationale " comme l'ont dit les argentins ;
    -Des nationalisations ayant prétention de réindustrialiser un pays et de créer de l'emploi ;
    -Des productions industrielles ou non industrielles qui se fermeraient au marché mondial, ou dont l'objectif pourrait être l'autosuffisance ;
    -Des normes qui éviteraient, pour maintenir la paix sociale, de casser des productions autonomes, ou des petites productions, ou des productions en vue de la réparation de l'existant….etc

    Cette politique européenne est une dévastation. C'est elle qui produit en réaction des sentiments nationalistes exaspérés et éventuellement xénophobes ravageurs, sur lesquels surfent le FN et tous les mouvements d'extrême droite. Il est donc comique de voir avancer comme argument que c'est le protectionnisme qui développerait le nationalisme. C'est vraiment se foutre du monde.

    Il est comique aussi de voir écrit que le NPA lutte contre la libre circulation des capitaux, non pas en demandant son abrogation avec des arguments percutants, mais avec la taxe Tobin….C'est encore plus se foutre du monde.

    Oui, toute lutte pour la destruction de l'Europe actuelle, pour la destruction de l'euro, pour la protection de la production nationale, va apparemment dans le sens de la réhabilitation des capitalismes nationaux et, abstraitement, pour la préférence des patrons français plutôt que des patrons internationaux…. Mais dire cela, c'est du mécanicisme. C'est passer par-dessus ce qu'on nomme la lutte des classes. Car si une lutte conséquente était menée contre l'Europe et l'euro, avec les arguments qui précèdent, il s'agirait obligatoirement d'une lutte contre les grands lobbys, contre l'impérialisme américain, européen, chinois…en même temps que des mouvements populaires seraient libérés et manifesteraient clairement pour ce qu'ils veulent, à savoir le droit de déterminer qui doit produire, pour qui, comment…
    La question du protectionnisme ne doit pas être présentée comme le droit d'une nation à défendre son industrie, c'est-à-dire sa bourgeoisie, mais comme le droit très général à définir la production utile pour vivre, et pour cela, oui, il faut mettre des barrières douanières contre, par exemple, les tomates industrielles venues d'Alméria à bas prix, contre les textiles d'Asie qui interdisent toute production utile dans les pays importateurs. Et en même temps il faut développer la nécessité de construire l'internationale des peuples : Les salariés du Bangladesh ne doivent pas produire pour casser la production des autres peuples mais doivent produire pour eux-mêmes. Ils doivent cesser de se soumettre aux diktats de leur bourgeoisie prédatrice qui fait du profit sur leur dos, en leur faisant produire contre d'autres peuples ce qu'ils ne pourront jamais s'acheter pour eux-mêmes dans leur propre pays. D'ailleurs, le 23-9- 2013, des dizaines de milliers d'ouvriers du textile ont bloqué les rues au Bangladesh, ont mis le feu aux usines en exigeant un salaire mensuel de 100 dollars. On comptait dans les rues 200 000 ouvriers…. Que valent les arguments selon lesquels le protectionnisme de la part de l'Europe contre des productions asiatiques prendrait les emplois des salariés ?? Ce sont les arguments du FN à l'envers, en clair des arguments pernicieux…

    Refuser l'autonomie des nations européennes et de leurs Etats, certes capitalistes, c'est dire par exemple à la Grèce : " il faut accepter les nouveaux plans économiques, les politiques de misère imposées par le " Fond de la misère internationale " . C'est dire à Chypre " Il faut accepter que vos épargnants soient expropriés, comme le furent les argentins "… C'est faire croire que l'arrivée des capitaux étrangers va faire le bonheur des gens, en désindustrialisant et en cassant l'appareil productif, en commençant par les affamer en leur faisant rembourser des dettes inventées.
    Personnellement je suis pour une mise en question de la grande industrie, mais graduellement, en laissant le temps aux citoyens de déterminer eux-mêmes ce qui serait mieux de produire..

    Le protectionnisme aujourd'hui ne peut vouloir dire que la chose suivante: protégeons les peuples contre les capitaux rapaces, contre le FMI rapace, contre la troïka rapace, nous ne voulons plus ni libre- échange, ni libre circulation des capitaux, ni libre circulation des marchandises, ni l'Europe, ni l'euro, ni productivisme, ni compétition, nous voulons choisir ce que nous voulons produire, pour qui et comment, nous voulons l'expropriation des banques et donner leur gestion à des comités de citoyens. Nous voulons que les peuples décident eux-mêmes ce qu'ils voudront échanger.

    Oui je romps avec la langue de bois, je romps avec les vieilles habitudes, qui au-delà des discours, ne veulent surtout pas donner la parole aux petites gens, aux salariés, aux chômeurs, et ne pas voir ceux qui dores et déjà, travaillent concrètement à construire autre chose sans employer de grands mots.

    Oui les argentins ont des illusions aujourd'hui sur leurs capacités à dépasser les contradictions internes à leur pays, en pratiquant un protectionnisme qui fait pourtant enrager les USA et l'Europe. Oui ils croient illusoirement qu'ils pourront satisfaire à long terme aux exigences du peuple dans leur espace protégé qu'ils ont réindustrialisé. Sauf qu'ils parlent vrai quand ils caractérisent très exactement ce que l'Europe fait à la Grèce (Dans leur journal El Correo). Ils apprendront vite que leur résistance à l'impérialisme sape également leur propre capitalisme national qui produira et produit déjà sa propre gangrène. Mais le peuple argentin sait faire des assemblées populaires. Le souvenir en est vivant, et des usines fonctionnent toujours en coopératives, certes bancales et dans le cadre du capitalisme exploiteur…Alors qu'est-ce qu'on leur dit ?

    Texte du 25-9-13 revu le 8-8-2014 AM Chartier