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    Valeur d'usage et forces productives

    1) La valeur d'usage.

    Parlant de la marchandise, Marx lui reconnaît deux aspects, valeur d'échange et valeur d'usage. La marchandise, en tant que valeur d'usage, " est avant tout une chose quelconque, nécessaire, utile ou agréable à la vie…un objet des besoins humains, un moyen d'existence au sens le plus large……….
    La valeur d'usage n'a de valeur que pour l'usage, ne se réalise que dans le procès de consommation……….
    Objet de besoins sociaux, certes, et par là rattachée à l'ensemble social, la valeur d'usage n'exprime cependant pas un rapport de production social " (Critique de l'économie politique, 1859, La pléiade, P 277 sq).
    La valeur d'usage est une condition d'existence nécessaire de la marchandise, mais " comme telle, elle est en dehors du domaine d'investigation de l'économie politique ". En effet l'économie politique ne s'intéresse qu'aux valeurs marchandes. Or un objet ou un service hors de la sphère marchande sont un produit ou une activité, peut-être indispensables à la vie humaine, mais sans connotation marchande. Ils se rapportent aux besoins humains.

    Marx pas plus que d'autres n'en feront leur objet d'étude. C'est pourtant sous la seule existence des valeurs d'usage (matérielles et immatérielles) que l'humanité a vécu la plus grande partie de son histoire.
    Ces valeurs d'usage vont changer de forme et de contenu selon les découvertes techniques, et selon les nouvelles façons de travailler. De nouvelles valeurs d'usage vont apparaître, d'autres vont disparaître. Elles vont refléter la nature des besoins et des mœurs d'une société. Ce qui reste constant, c'est leur fonction de nourrir, vêtir, loger, répondre à l'imaginaire ou au sens artistique de toute société humaine.

    Comment vont s'articuler les " forces productives " à cet ensemble ? Cette question est capitale pour le marxistes, les uns voulant y voir la somme des valeurs d'usage d'une société à moment donné, ou la totalité de la production , les autres la totalité pêle-mêle des valeurs d'usage et des marchandises. Trotsky s'en est saisi et a fait de leur décroissance inévitable en 1933 un cheval de bataille. Il affirmait à cette date dans "le Programme de transition" qu'elles avaient cessé de croître, voyant là le déclin puis la chute annoncée du capitalisme (la Vérité avril 72).

    2)Les forces productives.

    Il nous faut d'abord avant toutes choses tenter de donner une définition à cette expression.Revenons à la remarque de Marx sur les sociétés orientales qui bloquaient les forces productives. De quoi parle-t-il donc ? Et de quoi parle-t-il quand il explique que le caractère révolutionnaire de la bourgeoisie réside dans la libération des forces productives entravées par les corporations ? Marx emprunte cette expression aux économistes classiques mais n'ne donne jamais une définnition.
    Les marxistes, embarrassés par cette expression, ont fait des efforts considérables pour tenter de la raccrocher aux valeurs d'usage. Or Marx en a fait quasiment le moteur de l'évolution des sociétés, le moteur du passage des économies non marchandes aux économies marchandes, le moteur du passage d'un mode de production à un autre, du capital marchand au capital industriel. Il parle, sans aucun doute possible, dans ses textes, des moyens de production de la société marchande, c'est à dire une série d'éléments comme la technique libérée des entraves du contrôle social, le passage du capital marchand individuel au capital marchand des sociétés par actions, la croissance du capital, la productivité du travail, le salariat…Il faut lire tout ce que Marx a écrit pour se convaincre que les forces productives n'appartiennent réellement qu'aux sociétés marchandes et à ce qui en est le moteur. Mais la question n'était certainement pas totalement claire pour lui, puisqu'il emploie les termes "forces productives" pour noter une dite stagnation des sociétés non marchandes, ce qui semble inadéquat.

    L'expression "forces productives" est de Smith, mais c'est List (économiste allemand de l'époque de Marx) qui va lui donner un contenu concret. On ne trouve aucune définition chez Smith. Il nous paraît donc utile de revenir à List, qui donne un contenu aux " forces productives " à cheval sur les valeurs d'usage et les moyens de production capitalistes. Ce contenu permet ainsi de comprendre comment l'ambiguité a toujours été maintenue entre valeurs d'usage strictes et marchandises et moyens de production au service du capital. Cette ambiguité tient au caractère de la période où l'expression naît. La transition entre le système artisanal non marchand, le système marchand présent dans les grandes villes et les ports, et le système hyper-marchand de la société industrielle marchande, donnera pendant longtemps des sociétés hybrides (et encore aujourd'hui), surtout si le protectionnisme permet de protéger l'artisanat et la petite entreprise.
    Qu'est ce que List y voit ? (F.List, 1841, Le système national d'économie politique, Capelle). List est un allemand qui va être à l'origine du système de barrières douanières (Zollverein) autour des Etats allemands, avant leur constitution en une seule nation en 1870. Ce système est dirigé contre l'Angleterre qui ruine les artisans des Etats allemands par ses marchandises industrielles. List sera la bête noire des anglais, bien plus que ne le fut Marx, réfugié longtemps en Angleterre ! Marx déteste pourtant positivement List. Il écrit des pages terribles contre lui. En effet List, en défendant le principe des barrières douanières, favorise, selon Marx, l'émergence d'une bourgeoisie nationale et d'une industrie nationale. Marx se proclame " libre échangiste révolutionnaire ", en vue d'accélérer le désordre économique, la faillite sociale, espérant en voir émerger la révolution sociale ( Discours sur le libre échange, 1848, Marx, La Pléiade, Tome I, p 137 à 156, et p 1571-1572 notes).

    List dans son célèbre ouvrage se fait le défenseur du protectionnisme et polémique contre la pensée de Smith et les ravages du libéralisme dans les Etats allemands. Il s'approprie l'expression de Smith sur les " forces productives ", en donne une très forte description, en indiquant que seul un Etat protégé peut défendre et faire croître ses forces productives. On va voir comment List, venant d'une société majoritairement artisanale, donne un contenu très proche des valeurs d'usage à cette expression. Il ne parle pas de la fructification du capital. Que sont les forces productives dans la perspective de List ?


    -Les richesses naturelles exploitées, entrant dans la cadre de la production (et non pas toutes les richesses naturelles en soi).
    -Les hommes au travail ( artisans, paysans, salariés).
    -L'ensemble des moyens de production utiles à la production (outils, machines, bâtiments, la terre; les hommes peuvent y entrer également).
    -La culture, l'éducation, les techniques utilisées dans la production, les conquêtes scientifiques (donc les services publics et privés utiles à la société, dont les sociétés de science et de techniques).

    N'importe quel type de société non marchande peut être décrite dans ce cadre. Marx ne désavouera pas explicitement cette définition mais donnera mission à ces forces de faire croître le capital. Il y mettra également l'ensemble des marchandises, au sujet desquelles Marx émet encore peu de critiques. De plus, comme List, Marx fait entrer dans les forces productives les hommes au travail, essentiellement les salariés ouvriers. Il y ajoute les classes sociales susceptibles de promouvoir la croissance de ces forces: le prolétariat et la bourgeoisie. Nous y retrouvons donc, pêle mêle chez Marx, des valeurs d'usage utiles à l'humanité (mais pas l'ensemble des valeurs d'usage), le salariat, la bourgeoisie dite révolutionnaire, le capital (les moyens de production, la science et les technique) et tout ce qui peut lui être utile. Notion éminemment confuse. Il y a entre autres dans les forces productives tous les éléments d'une collaboration de classes.

    Si Marx n'a pas jugé utile de donner lui-même une définition, c'est que la définition de List lui convenait et allait de soi. De plus, à l'époque où il écrit, il jugeait très certainement que derrière toute marchandise il y a obligatoirement une valeur d'usage. En effet il définit la marchandise comme étant d'abord une valeur d'usage et ensuite une valeur d'échange. Plus tard il insinuera qu'il peut y avoir des marchandises sans valeur d'usage, mais cela ne constitue pas une préoccupation majeure pour lui, ce qui est normal au 19ème siècle.

    Il en déduisait que, derrière toute croissance marchande, il y a progrès utile à l'humanité, ce qui a déjà été contesté à son époque, mais faiblement (voir Fourrier, Sismondi, Stuart Mill). Lui même a donné des éléments d'une déconnexion possible lorsqu'il dit que les forces productives peuvent se transformer en forces destructives, dans le cadre du machinisme (cf L'Idéologie allemande), mais il ne développe absolument pas cette question, essentielle aujourd'hui.

    Donc, pour en finir avec une définition, on peut dire que la notion de forces productives recouvre à l'origine aussi bien les valeurs d'usage (produits et services utiles à l'humanité) que les marchandises et le capital. L'évolution des unes et des autres va dans le même sens, très largement, sans doutes jusqu'à l'industrialisation de l'agriculture et la formation des grandes entreprises d'armements, c'est à dire la fin du 19ème siècle. Là s'amorce une rupture entre les deux, bien qu'elle ne soit jamais totale.

    Quelles sont les conditions de la croissance des forces productives ? Marx répond: L'accumulation privée des capitaux, la division moderne du travail, l'atelier automatique, la concurrence anarchique, le salariat, la lutte des classes dans le cadre de classes qui profitent de la situation tandis que d'autres périclitent ("Misère de la philosophie",dirigée contre Proudhon , 1847, tome I, p 70). Toujours de ce point de vue, les corporations gênaient, selon Marx, la croissance des forces productives, parce qu'elles entravaient la concurrence (2 lettres sur Proudhon, p 1640 et 1688, tome I des oeuvres à la Pléiade); il était donc justifié que la bourgeoisie prenne le pouvoir. Or l'abolition des corporations, c'est la naissance du capitalisme, la transformation des compagnons en prolétaires et leur exploitation éhontée. Tout se passe donc comme si l'exploitation du salariat était une condition essentielle de la croissance des forces productives (Principes d'une critique, 1857-58, tome II, p 186). Dans ce cadre, Marx fait de la machine industrielle une nouvelle force productive, mais aussi une arme contre les ouvriers (Salaire, 1847, tome II, p 152). A ce niveau la contradiction est totale.


    En fait, Marx a une idée positive du capital, et ceci parce qu'il a, par ailleurs, une théorie sur le développement et le sens de l'histoire : " Bien que borné par nature, le capital tend à un développement universel des forces productives " ( Principes d'une critique, p 251, 252). Marx suppose que le capital, parce qu'il est dans un mode de production étriqué, contient en lui-même son propre dépassement, vers un développement libre, sans entraves, progressif et universel des forces productives, tandis que le plus haut épanouissement de ces dernières va de pair avec le plus riche développement de l'individu (ici pas de rupture entre valeurs d'usage et capital). Mais, il écrit par opposition que le machinisme, les forces de la nature (actionnées par le capital), la science apparaissent au travailleur comme des puissances du capital pour lui prendre son savoir, son habilité, et l'exploiter (Matériaux pour l'économie, 1861-65, tome II p 385, 386). Et encore : La production et les instruments de production, au compte du capital, ne sont pas faits pour un épanouissement toujours plus intense du processus de la vie ; au contraire ils impliquent l'expropriation des producteurs, donc un gâchis de la population valide…(Le Capital, 1867, tome II p 1031).
    On voit à quel point Marx développe la contradiction sans pour autant en tirer des conclusions contraires à son schéma idéologique.

    De plus, rappelons que, pour Marx, les forces productives évoluent dans une dialectique avec les " rapports de production ", qui suppose que celles-là finiront par balayer ces rapports (rapports de propriété), dans l'ultime phase du développement historique, et, à ce moment là seulement, seront transcendées pour être au service de l'humanité. On y reviendra plus tard, mais notons que ce n'est pas l'abolition de l'exploitation et du salariat qui provoqueront cette transcendance, mais, selon Marx, l'abolition de la propriété privée des moyens de production, ce qui laisse toutes chances au capital de subsister… dans une propriété publique. C'est bien là que gît une grande impasse, selon nous.

    Marx a bien précisé qu'il situait son analyse dans le cadre des économies marchandes, et de celle qui lui paraît la plus développée, le capitalisme, pour parler du grand bond des forces productives. Cela explique la raison pour laquelle, selon lui, les grands Etats du mode de production asiatique font stagner les forces productives. L'étude d'une société fondée autour de seules valeurs d'usage ne l'intéresse pas dans son grand ouvrage "Le Capital", son objet d'étude est le capitalisme.

    Beaucoup de marxistes ont été très embarrassés par ce concept de forces productives. Nous croyons proposer une version à peu près exacte des contradictions dans lesquelles se trouvait Marx, contradictions qu'il surmonte en posant a priori que le capitalisme remplit une fonction progressive (qui comprend et intègre le "progrès") vis à vis de la civilisation. Mais cependant, c'est Marx aussi qui indique que si le prolétariat ne parvient pas à renverser le capitalisme, en s'appropriant le système industriel pour lui-même, celui-là se transformera en barbarie.


    En définitive, Marx a une conception de l'histoire qui intègre la société marchande comme nécessité inéluctable de civilisation. Il n'envisage donc pas la question de savoir si la société non marchande pouvait se transformer de l'intérieur vers un plus grand épanouissement des individus, en abolissant l'exploitation, par exemple par une révolution paysanne contre les abus des prélèvements obligatoires ou le travail forcé, ou par l'expropriation des grands propriétaires fonciers de leurs terres confisquées le plus souvent aux paysans. Il ne l'envisage pas, car ce type de société ne ferait pas croître les forces productives mais les ferait stagner. Une révolution paysanne au profit des paysans n'a donc pas de sens pour lui, et n'offre aucune perspective pour l'humanité.

    L'étude de la révolution de 1910 au Mexique, immédiatement confisquée par la bourgeoisie, aurait pu servir de base à ce questionnement pour les marxistes qui lui ont succédé. Mais fidèles à l'enseignement de Marx, ceux-ci n'ont su que faire de cette révolution, à part la qualifier de révolution prolétarienne bâtarde. Un autre exemple est donné par la révolution russe elle-même, en février 1917, imposant des soviets ouverts à toutes les composantes du peuple majoritairement paysannes. Mais les soviets ont été rapidement bolchévisés par les bolchéviks tandis que les socialsites révolutionnaires (très portés sur la question paysanne) et les anarchistes d'Ukraine étaient écrasés.

    Au Mexique, la question du pouvoir n'a pas été réellement posée en son temps par les paysans qui ne veulent pas assumer le pouvoir central, ce qui demeure fort intéressant; mais par contre, en Russie, cette question était posée en termes de soviets démocratiques. Elle ouvrait des perspectives totalement nouvelles qui restèrent inexplorées, hélas.

     

    Conclusion.

    L'enjeu de cette question:

    Pour l'opposition bolchévique, animée par Trotsky en 1933, l'enjeu était le suivant. Le capitalisme allait à la faillite économique et au fascisme, selon lui. Ou l'URSS se redressait en posant la question de la révolution mondiale, et en agissant en ce sens, et alors une issue existait pour l'humanité. Ou L'URSS s'enfermait, ne dépassait pas ses contradictions (entre autres choses, son insuffisante productivité), et n'avait pas de stratégie pour affronter et vaincre le fascisme, et c'était "minuit dans le siècle". Face à ces deux faillites: celle du capitalisme et celle de la révolution mondiale, Trotsky déclarait que les forces productives avaient cessé de croître et appelait à constuire la IVème internationale sur les décombres de la IIIème.