(voir colonisation)
(une video "Razzia sur l'Atlantique" de Nicolas Van Ingen) (info du Monde du 11-3-23)
A propos d'un article de C Jacquier (ADES Grenoble) en date du 14-1-14 sur le livre " Critique de la raison nègre " de Mbembe.
Je n'ai pas lu le livre en question. Je ne peux me saisir de tous les thèmes
abordés par cet article qui est très riche ; j'en choisis quelques-uns.
Cet article est écrit au moment de la sortie du film " 12 Years
a Slave " de Steve McQueen, où enfin les esclaves ont la parole..
Quand Mbembé cite Césaire qui écrivait " qu'on ne
se débarrasserait pas à si bon compte du traitement d'horreur
réservé aux populations d'Afrique subsaharienne
. ",
lors de la traite des noirs, en direction des plantations de sucre et de coton
d'Amérique, peut-être ne mesurait-il pas jusqu'au bout la signification
de ce jugement. A mon avis, la violence qui gît dans nos banlieues n'est
pas seulement le fait du chômage, d'une école qui n'est pas à
la hauteur, d'un habitat qui pose problème, de la drogue qu'on y vend
Il y a aussi et surtout la mémoire inconsciente transmise sur
plusieurs générations de cette horreur, et qui s'exprime, curieusement
pour nous, y compris dans le comportement des enfants noirs adoptés par
des blancs philanthropes. Le regard bienveillant et secourable du blanc vis-à-vis
du jeune noir, est souvent ressenti comme la volonté de réparer
certes mais d'occulter inconsciemment une souffrance irrémédiable,
dans une situation où la pire des exploitations et la pire des horreurs
continuent aujourd'hui dans une Afrique dont les blancs proclament qu'elle émerge,
car son PIB croît !! C'est sans doute là-dessus que je diverge
avec Mbembé. On peut trouver le moyen de vivre avec une souffrance quasiment
ontologique certes, mais celle-ci demeure inconsolable. De plus, sous couvert
de lutte contre le terrorisme, nous avons jeté un voile sur la réalité
africaine, et nous préférons le non-dit, dans le même temps
où l'on prétend " aider " l'Afrique.
La mise en évidence dans l'article de C.Jacquier, de ce qui semble l'essentiel
de l'essai de Mbembé, me paraît être une restitution de ce
qui fut les prémisses du capitalisme actuel ou de notre modernité
barbare. On est d'accord. En effet, les plantations négrières
ont constitué historiquement la médiation entre la société
traditionnelle marchande artisanale européenne et le capitalisme. Jamais
le salariat occidental n'aurait pu se constituer comme main d'uvre aux
ordres, dépourvue de son savoir-faire traditionnel et de ses outils,
dans l'organisation quasi militaire des fabriques industrielles (cf Marx), s'il
n'y avait eu cette préfiguration des usines d'esclaves dans les plantations,
en dehors du monde des corporations artisanales. De ce point de vue, la traite
négrière vers les plantations ne relève pas de l'esclavage
traditionnel et ancien, elle est spécifique et entre dans les préliminaires
du capitalisme moderne, autant dans les formes de travail imposé, que
dans l'accumulation du capital qu'elle entraîne. C'est l'apport fondamental
de Mbembé mis en évidence par C.Jacquier. A juste titre il est
bien précisé que l'esclave n'a pas droit à la reproduction,
j'ajoute qu'il est fait pour durer en moyenne 7 ans, après quoi il faut
le remplacer.
Je passe sur plein de choses importantes, qu'il faudrait discuter, pour en venir
à la question de la " réparation ". Mbembé semble
dire qu'il convient de dépasser cette thématique pour réfléchir
à un monde commun, à une humanité nouvelle. Je critique
ce point de vue.
Il ne s'agit aujourd'hui, à mon avis, ni de poser la question de la réparation,
ni de proposer la réflexion sur une humanité nouvelle, tant que
n'a pas cessé l'horreur de ce que l'on peut appeler " les plantations
modernes ", du moins en Afrique, puisque c'est ce dont il s'agit.
On peut bien sûr les voir partout ces plantations modernes : Les usines
textiles asiatiques (entre autres Bangladesh, Cambodge, Chine
) pour le
compte des occidentaux
Les mines du Katanga, de la RDC, où travaillent
des milliers d'enfants de moins de 16 ans ; les mines d'uranium du Niger ; les
mines d'Afrique du Sud ; les usines automobiles de la Roumanie, du Maroc, du
Brésil
; les plantations sucrières et bananières
du Brésil, des Antilles
. Et partout ailleurs.
S'il est vrai qu'une partie du salariat européen devient superflue et
est exclue peu à peu de la production, il y a des millions de petites
mains en Asie pour travailler à notre place, et surtout des milliers
d'africains qui, comme des déportés (sous le nom de " réfugiés
" et " déplacés " ), sont contraints de fuir leurs
pays, et vont s'entasser dans des camps, tandis que les femmes sont violées
ou se réfugient dans les forêts pour échapper au viol.
On a dit " plus jamais ça " après la shoah ! Se souvient-on
? La Shoah a relevé d'une extermination industrielle, planifiée,
sous l'autorité d'un Etat bien défini. Mais l'extermination actuelle
de populations, entre autres en Afrique, n'apparaît pas comme étant
le résultat de la décision criminelle d'une instance centralisée,
mais plutôt comme celui d'une absence d'Etat, ou d'un laissez-faire indéterminé,
ou pire d'exactions de brigands ou encore de tueries réciproques de populations
entre elles
(ça c'est le génie de la barbarie moderne). Les
responsabilités semblent en général très diffuses,
sauf à reconnaître, comme au Moyen Orient par exemple, la responsabilité
des USA et de l'Europe dans des interventions meurtrières, ou par les
drones US
A bien y regarder, la guerre civile dans l'ex Yougoslavie n'aurait-elle pas
été une répétition en quelque sorte pour aller vers
des désastres encore plus grands sans qu'un Etat ait appelé à
une extermination précise ? Les Etats occidentaux, par mille canaux,
et sans forcément qu'ils se concertent, savent semer la zizanie et le
feu, comme jeter des anathèmes, désigner des boucs émissaires
possibles, sur la base d'une situation économique et politique difficile,
puis laisser agir le poison, laisser faire les premières horreurs, et
enfin intervenir ensuite pour des motifs dits humanitaires et démocratiques.
Cependant nous avons un exemple actuel qui contredit cela, c'est la Syrie. Cet
Etat décime depuis 3 ans sa population de manière méthodique,
hommes, femmes, enfants ; il torture, affame, exécute, fait photographier
les dépouilles faméliques des martyrs (cf la défection
du photographe syrien " Cesar "
Le Monde du 24-1-14).
La similitude avec les camps de concentration nazis est patente. Et de la même
façon que dans les années 40, la communauté internationale
se tait quasiment devant ce qu'on peut appeler un génocide, mais organise
des simagrées de conférences de paix. Il y a tout lieu de croire
en plus que les armes de la Syrie ne sont pas seulement d'origine russe, mais
occidentale.
En Afrique, les grandes compagnies pétrolières et minières
sèment la pollution, arrosent les voyous au pouvoir, se moquent de la
population locale dont les terres et l'eau sont pollués
. Il suffit
que quelques provocateurs désignent un coupable qui aurait profité
de la situation, une ethnie quelconque, dans une situation de misère
totale, et c'est partie.. Si en plus on peut trouver des " djihadistes
" qui se livrent à des enlèvements, ou à des crimes,
le décor est posé pour la guerre civile
Qui est responsable ? Les responsabilités sont diluées. Ainsi
vont les " génocides " actuels si notre regard reste superficiel.
Cependant, il y a là, derrière l'apparence confuse, un fonctionnement rationnel et une logique imperturbable de notre modernité capitaliste, dont il faut mettre en évidence les rouages :
1)L'exportation massive d'armes venus d'Occident, entre autres vers l'Afrique,
au profit d'hommes d'Etat voyous protégés par les Etats Occidentaux,
armes dont on sait comment elles se répandent dans toute la population
(voir la Libye)
2)L'organisation, de fait, du désordre, de l'incurie, de la famine, par
la destruction méthodique, depuis le début du 20ème siècle,
de l'agriculture traditionnelle et de l'artisanat, par le LIBRE-ECHANGE imposé
de l'extérieur par les grandes puissances. D'apparentes raisons religieuses
ou ethniques expliqueraient ensuite les exactions, pour des motifs de partage
des terres, de l'eau, des puits, du commerce, des parcours de bétail
.etc
3)Tout ceci sur fond du pillage organisé des richesses. Celles-ci s'écoulent
hors de l'Afrique par ses "veines ouvertes " que sont les " corridors
Bolloré " (routes et chemins de fer, pratiquement privés,
contrôlés militairement), qui sillonnent et quadrillent, entre
autres, l'ouest africain, jusqu'aux terminaux dans les ports à conteneurs
construits par Bolloré dans tout le golfe de Guinée. Il suffit
pour en avoir une idée précise de consulter les cartes publiées
par le site " En savoir plus-Bolloré Africa logistics ". Cliquons
avec la souris de nos ordinateurs sur chaque pays de la carte de l'Afrique présentée
par le groupe Bolloré qui exhibe ainsi son savoir-faire et regardons
.
Quel instituteur présente cela à ses élèves ? "
Chers petits, il y a quelques siècles en arrière on avait inventé
la traite négrière et l'exploitation à mort des esclaves
noirs.. Aujourd'hui on fait la même chose d'une façon différente,
et plus subtile, on exile les africains hors de leurs pays, on les parque dans
des camps de barbelés après qu'il en soit mort une quantité
sur la route de cet exil, après leur avoir donné toutes les raisons
de se tuer entre eux. Pendant ce temps, le pétrole, l'uranium, les diamants,
l'or, le fer, " les terres rares ", s'écoulent vers l'Occident,
tandis qu'on leur prend leurs terres pour cultiver ce qui est nécessaire
pour remplir nos moteurs de voiture, et tandis qu'on détruit ce qui reste
d'agriculture par notre commerce lucratif
Grâce à quoi on
fait croître le PIB de leurs pays " compradore " quand ils nous
" vendent " leurs richesses ! Ne sommes-nous pas géniaux ?
"
Comment dans ces conditions Mbembé veut réfléchir à
une nouvelle humanité qui oublierait en quelque sorte le passé.
C. Jacquier va nous préciser cette question. Cependant, il ne s'agit
pas du passé, mais du présent. Comment fait-on pour oublier le
présent ? Doit-on l'oublier ? Des milliers d'hommes et de femmes veulent
pourtant oublier et partent sur des embarcations en pleine mer à la recherche
du rêve européen et de ses droits de l'homme. Et ils se noient
par centaines avant d'arriver à Lampédusa
. Le nègre
du 21ème siècle est-il vu d'une façon très différente
de la façon dont on le regardait au 17ème siècle ?
Les jeunes noirs de nos cités ne savent pas tout cela dans le détail,
mais ils respirent ce mépris dans la certitude affichée de leur
infériorité d'humains. C'est pourquoi ils ne supportent pas ce
qu'ils interprètent comme des " mauvais regards ", y compris
entre eux, surtout de la part de ceux qui semblent avoir échappé
à cette servitude, celle d'être nègre ! Alors ils crient
vengeance avec d'autres, sans savoir que, ce faisant, ils se détruisent
encore davantage. Faut-il leur répondre qu'ils cèdent à
la victimisation ? Franchement, peut-on oser, dans la mesure où nous
ne faisons rien pour que cesse l'horreur organisée. Que vaut donc notre
humanitarisme ?
Osons appeler à des Etats généraux pour que cesse le
pillage en Afrique, et pour que le libre-échange soit aboli.
AMC le 21-1-2014
Officiellement le ministre de la défense, Jean-Yves le Drian, a fait
une tournée en Afrique début janvier 2014, en Centrafrique, au
Mali, au Niger, au Tchad, au Gabon, au Congo, en vue d'une recherche de solution
militaire dans la région (Le Monde du 5-6-1-14)
Peut-être est-ce aussi pour préserver les intérêts
français, les fameux corridors Bolloré, qui, dans tous
ces pays, vident l'Afrique de ses richesses.
En effet, ces pays jouent un rôle très important, pour conserver,
entre autres à la France ses intérêts économiques,
moyennant un soutien sans faille à ses dictateurs, dans la mesure où
ceux-ci (comme le Tchad au Mali) jouent le jeu de la " paix sociale ",
c'est-à-dire de la chasse aux " terroristes ". Or ces derniers
étendent leur influence et leurs agissements de Djibouti au Sénégal.
En riposte à ces agissements terroristes, la France " redéploie
son dispositif sécuritaire au Sahel " (Le Monde des 5 et 6 janvier2014)
Entre autres, l'arrivée des drones américains, permettant de voir
un homme armée à 8000 m d'altitude et à 15 km de distance,
va permettre à la France d'envisager de mieux s'équiper à
Niamey, au Niger, pour protéger AREVA et faire la chasse à ces
dits terroristes, en collaboration avec les USA (Le Monde du 3-1-13). Cela vaut
bien un voyage en Afrique de Le Drian.
Un journaliste du Monde (le 5 et 6-1-14) écrit : " Ce continent, ses liens avec l'Europe, son potentiel économique sont trop importants.. " pour que le gouvernement français renonce à intervenir en Centrafrique.
Dans le même temps des armées de " rebelles ", mercenaires (dont on ne sait exactement par qui ils sont financés) et autres (Le Monde du 16-1-14) s'activent pour fomenter des troubles prenant la forme de conflits religieux. Il suffit pour cela d'exacerber les problèmes concernant le partage des terres, des puits, le parcours des troupeaux, les intérêts parfois opposés entre commerçants et paysans, ou de ratisser un village d'une ethnie particulière, une nuit, à l'aide d'hommes de main. Les responsables religieux attestent dans tous ces pays du caractère purement provocateur de certaines exactions, qui ensuite prennent la forme de vengeance entre les différents groupes de population.
Prenons maintenant une carte de l'Afrique de l'Ouest, revue et corrigée par le groupe sur le site " En savoir plus-Bolloré Africa logistics ", et regardons bien. Nous serons vite convaincus, si nous ne l'étions déjà, que les conflits au Mali, au Niger, en Rép Centrafrique, comme précédemment en Côte d'Ivoire, sont partie prenante d'une stratégie globale de pillage de l'Afrique de l'Ouest. Et si nous détaillons la carte par pays, c'est encore plus convaincant et extraordinaire. C'est même stupéfiant. Les richesses de l'Afrique s'écoulent par ses " veines ouvertes " au travers des " corridors " Bolloré (routes et chemins de fer, pratiquement privés, contrôlés militairement), qui sillonnent l'ouest africain, jusqu'aux terminaux dans les ports à conteneurs construits et accaparés par Bolloré.
De façon parallèle, les enlèvements dans la zone du Sahel,
en Mauritanie, et au Mali, puis un peu plus au sud au Nigéria, au Cameroun,
constituent bien une seule et même réalité, que la politique
prétend nous présenter de façon morcelée, comme
étant le fait de djihadistes, ou de problèmes religieux, ou encore
ethniques. Les ripostes à cela doivent évidemment être expliquées
comme des nécessités humanitaires, ou des interventions visant
la paix pour les populations.
Qu'il s'agisse des présumés djihadistes-terroristes d'un côté
ou des politiciens de l'autre, tous savent regarder une carte, et tous savent
ce qu'ils font, évidemment en définitive contre les populations.
L'uranium du Niger s'évacue vers le Golfe de Guinée, du nord au sud, par le port de Cotonou au Bénin, par l'intermédiaire de corridors et terminaux ouverts, construits, contrôlés, encore une fois, par le groupe français Bolloré, qui a aussi fait appel à Bouygues pour ce faire, et ceci tout au long du golfe.
Le pétrole s'évacue dans tous les grands ports à conteneurs construits et gérés par Bolloré dans tout le golfe de Guinée. Pour cela il faut des bases militaires et une surveillance constante de tout le Golfe, de Nouakchott à Luanda, sur terre, par mer, et par air. Les bases militaires françaises se trouvent à Libreville au Gabon, et à Dakar au Sénégal.
Les corridors ouverts par Bolloré couvrent par ailleurs toute l'Afrique d'un épais maillage, à part le Maghreb, la Somalie et l'Erythrée .Les grands ports sont sous son contrôle et des dizaines et des dizaines de ses filiales couvrent toute l'Afrique (1500 entreprises et 90000 ressortissants français)
L'Armée française, l'aviation, la frégate Corymbe en mer (Le Monde du 20-6-2013) unissent donc leurs efforts pour protéger les intérêts français principalement en uranium et en pétrole, dont le groupe Total, dans toute la région. L'armée française, Bouygues, Vinci et Bolloré unissent en conséquence leurs compétences pour l'acheminement des matières premières pillées en Afrique
Dans ces conditions, on comprend encore mieux que toute contestation à
cet empire se doit d'être assimilée à du terrorisme. Les
djihadistes sont indifféremment et tout à la fois, des nationalistes,
des résistants locaux, des aventuriers, des brigands, des exclus, des
militants religieux, et des trafiquants en tous genres, pour se procurer de
l'argent, acheter des armes et résister à leur façon à
l'envahissement et au pillage. Ils pratiquent ainsi, au nom de tous les africains,
quoi qu'on en dise, la guerre contre les occupants par les enlèvements,
le commerce illicite de drogue, cigarettes et autres, et tentent de construire
un autre maillage de leurs activités d'est en ouest afin de saboter les
intérêts français.
Ils se couvrent, pour ce faire, d'idéologies, entre autres de l'idéologie
religieuse très sommaire, qui a remplacé le marxisme.
Et comme dans toute guerre, la lutte pour le pouvoir est omniprésente,
les idéologies religieuses servent à légitimer l'autorité
ou le despotisme de certains groupes, contre un Occident prédateur, contre
une chrétienté jugée colonisatrice.
Qui donc a appris ce type de comportements extrêmes et violents à
la fraction la plus révoltée des populations démunies de
presque tout, dont les peuples se passeraient, si ce n'est l'Occident ?
Qui sont les vrais barbares, ou les premiers barbares ? Qui a détruit
méthodiquement l'agriculture locale et traditionnelle depuis le début
du 20ème siècle par l'accaparement des terres, le libre- échange,
le servage de la main d'uvre africaine pour les grands travaux ? Qui détruit
et pollue les eaux poissonneuses des rivages de l'Afrique ou empêche les
africains de pêcher ? Qui exporte les déchets les plus dangereux
de notre électronique en Afrique, en particulier au Ghana ? Qui finance
des voyous et aventuriers pour les mettre à la tête des Etats africains
et provoquer des combats dit interreligieux ou inter-ethniques ? Qui provoque
en conséquence, les tueries, les déplacements de population, la
famine, les viols
si ce n'est l'Occident, dont la France pour ce qui nous
concerne !
C'est par Douala, port tenu par Bolloré au Cameroun, que la logistique
de l'armée française est passée pour rejoindre la Centrafrique,
de la base militaire de Libreville au Gabon.
Le sud de la Centrafrique est en effet couvert par les corridors Bolloré.
Et c'est par Dakar, que l'armée française remonte vers le Mali
, et c'est, rappelons-le, au Niger que la collaboration avec les USA avec les
drones va s'effectuer.
Toute la zone sahélienne est donc militarisée ainsi que tout le
golfe de Guinée et les pays alentours, de la Mauritanie à l'Angola.
Outre les richesses pétrolières qui se trouvent non seulement
dans tous les Pays du golfe de Guinée, mais au Tchad, au nord de la Centrafrique
; outre l'uranium au Niger ; outre l'or et le pétrole à venir
au Mali ; outre les minerais rares, diamants et autres dans la dite " République
démocratique du Congo ", on sait maintenant qu'il y a en Centrafrique
du fer, des diamants, du cuivre, de l'or et de l'uranium à l'est
.(Le
Monde du 19-12-13).
Il n'empêche que règnent comme par hasard dans ces pays la guerre
civile, la famine, les viols, la terreur pour les femmes et les enfants, que
les potentats locaux couvrent.
Le déploiement de puissance militaire et économique, et d'organisation
technique, dans un continent dont le sous- sol est riche, relève de la
barbarie pure et simple par l'intermédiaire de la " modernité
" dont nous nous gargarisons.
On comprend donc les vraies raisons des interventions militaires françaises,
même si la situation désastreuse de ces pays, et la terreur des
populations, autorisent à donner d'autres explications à des conflits
qu'on se plait à isoler les uns des autres.
Que faire ? La protection des populations semble être la première
tâche, mais comment, avec qui ?? Aucun Etat, aucune organisation internationale
ou régionale ne semblent être en mesure d'agir pour les besoins
des populations.
Le mot d'ordre d'expropriation de Bolloré d'Afrique paraît être
l'objectif à discuter avec les africains de France et d'Afrique. Mais
comment ? Toute la question est là.
Comment les peuples d'Afrique peuvent se réapproprier, pour eux et non
pour leurs dits Etats, les richesses qui leur appartiennent ? Avec quels organes
de base ?
AMC le 17-1-2014
Le gouvernement ivoirien a accordé en mars dernier la gestion du second terminal à conteneurs d'Abidjan au groupe Bolloré. Ce dernier, associé au premier armateur mondial et à l'inévitable Bouygues, l'a emporté contre deux concurrents, l'un mené par MSC, deuxième armateur mondial, l'autre par CGA-CGM, qui est le troisième. Les groupes écartés crient au favoritisme, car Bolloré gère depuis 2004 le premier terminal d'Abidjan et nombre d'autres ports africains.
Le groupe Bolloré a commencé sa fortune dans le papier, particulièrement le papier à cigarettes, sur les bords de l'Odet, jolie rivière du Finistère, au début du 19e siècle. Le dernier héritier en titre, Vincent, s'est reconverti dans la finance depuis plus de trente ans, puis dans les affaires africaines, chemins de fer, plantations, import-export. Habile à nouer les amitiés utiles ou intéressées, il n'y a pas depuis ce temps de ministre de la Coopération qu'il ne reçoive ou n'embauche, de président africain qu'il ne fréquente, de gendre ou de cousin qu'il ne place dans une de ses multiples sociétés. C'est sur son yacht que Sarkozy a passé ses premières vacances de président, c'est dans son avion privé que Mandela est venu à Paris à l'invitation du précédent.
Depuis dix ans maintenant, sa grande affaire est la privatisation de la logistique et du transport sur tout le continent africain. Comme nombre de rapports officiels locaux et internationaux l'ont démontré, il ne sert à rien d'avoir une concession minière au milieu du continent si on ne peut pas acheminer le matériel et convoyer le minerai. Donc, soutenu par les organismes publics internationaux, particulièrement l'Agence française pour le développement, accueilli à bras et subventions ouverts par ses amis présidents africains, Bolloré propose un service complet : le port, capable d'accueillir des navires calant jusqu'à 18 mètres, les grues et portiques, les entrepôts de stockage et de tri, les chemins de fer ou les flottes de camions et, bien sûr, le personnel pour faire fonctionner tout cela, depuis le docker sur place jusqu'au logisticien rivé à son ordinateur dans la banlieue parisienne, suivant chaque conteneur grâce au satellite.
Tout cela ne serait encore rien sans la grande invention : le corridor logistique. L'Afrique a été morcelée par les colonisateurs, elle est ravagée par la misère, les guerres civiles, les bandes armées, avec ou sans uniforme, mais les richesses tirées de son sol et de son sous-sol par le travail de ses prolétaires doivent passer sans encombre et arriver jusqu'aux ports. C'est le but des " corridors " qui, si on traduit le langage feutré des fonctionnaires de l'ONU et des publicitaires de Bolloré, sont des routes privées, extraterritoriales, ne connaissant ni frontières, ni douaniers, ni check points. Un tel miracle n'est possible que grâce à l'intervention de troupes, officielles ou non, mais efficaces. Il y a ainsi un corridor du cacao, un corridor de l'uranium, un de l'or, etc. Bolloré en contrôle la plus grande partie, grâce entre autres à ses 28 ports et à ses 25 000 salariés dans 45 pays d'Afrique.
Plusieurs champs de pétrole ayant été mis en exploitation au large des côtes africaines, Bolloré s'est sur le même principe lancé dans la logistique de ravitaillement aux forages en mer. Le matériel de forage ou de ravitaillement transite dans les ports Bolloré, lui assurant une rente supplémentaire. Quelques jours à peine avant de recevoir sa nouvelle concession à Abidjan, le groupe Bolloré inaugurait un port de ravitaillement pétrolier de l'autre côté du continent, au Mozambique.
Les techniques logistiques sont modernes, les camions énormes, les navires gigantesques, l'informatique omniprésente. Mais tout cela sert toujours en définitive, comme dans les siècles passés, à exploiter le travail de tout un continent et à en piller les richesses, de plus en plus vite, de plus en plus rationnellement. Et c'est toujours en fait avec les mêmes méthodes, celles de la violence ouverte.
Non seulement Bolloré s'appuie sur les pires dictateurs, et ces derniers le lui rendent bien. Quand les travailleurs du port d'Abidjan, en partie contrôlé par Bolloré, se sont mis en grève en 2009, l'armée est intervenue et a quadrillé le port pendant des semaines, protégeant les 3 000 travailleurs embauchés pour briser la grève et faisant la chasse aux grévistes.
Les médias ont beau prétendre que les entrepreneurs chinois sont
à la conquête de l'Afrique, ce continent reste à ce jour
essentiellement sous la coupe des capitalistes occidentaux, et de Bolloré
en particulier.