(en fin de rubrique, voir une 1ère analyse sur la nature du bolchévisme)
voir "UKRAINE la guerre", et ce que représente Poutine 15 mars 22
Le bolchévisme a sombré comme tous les mouvements communistes ! Pire tous les hommes de gauche ayant pris le pouvoir, après de dures batailles, dans les pays libérés du colonialisme, ou simplement contre la droite, tous ont sombré dans l'opportunisme, ou la dictature, ou dans l'amour du pouvoir.... Les seuls qui n'ont pas sombré ont été assassinés: Lumumba, Sankara..et quelques autres. on les compte sur les doigts d'une main.
C'est donc un problème qui dépasse la question du bolchévisme;
C'est une affaire masculine, de conception masculine qu'on peut caractériser comme suit dans ses croyances:
*La question du contrôle du pouvoir n'a jamais été posée. Aucune instance n'a été chargée, après la prise du pouvoir, de contrôler ce pouvoir. "Contrôlez moi, contrôlez nous pour nous signaler tout glissement, toute erreur, tout acte abusif... etc"
Des hommes de pouvoir non incontrôlés peuvent chuter dans l'arbitraire. Cette option a été écartée...
*au motif que les idées révolutionnaires, bien posées, clairement établies, ne peuvent être perverties, car elles constituent des Vérités intouchables. D'où
le "culte du chef" et la naissance des privilèges. Or les idées révolutionnaires doivent être corrigées, amendées, améliorées... Pour cela il faut établir le principe de la discusssion critique
*au motif également que l'homme qui a combattu et souffert ne peut être gagné par l'appât de l'argent et du pouvoir personnel; l'homme ou les hommes qui conquièrent le pouvoir seraient lucides, la folie du pouvoir ne pourrait les gagner. Le prétendre renvoie à l'idée que "l'ennemi de classe" se cacherait sous ces suppositions.
*La question de l'existence du patriarcat n'a jamais été posée par aucun pouvoir. Le principe d'égalité des hommes et des femmes a été posé mais sans plus comme si la révolution chassait d'elle-même le patriarcat. Or le pouvoir incontrôlé a fait ressurgir la culture du machisme de façon très forte.
-L'alliance avec le féminisme de.A Kollontaï par le pouvoir bolchévique a été purement stratégique pour Lénine. Il avait besoin des voix des femmes. Il n'est pas exclu de plus qu'il en ait été partisan tant que Kollontaï n'ait pas fait valoir sa vision critique du pouvoir.
*Dans l'optique ci-dessus l'adversaire n'est pas respecté, il doit être convaincu, ou être condamné. Il n'a pas droit à l'existence, à l'organisation, à l'écriture. L'adversaire est un ennemi de la révolution. L'irrespect pour une parole autre que celle de la ligne définie par l'instance dirigeante, fait partie d'un pouvoir absolu qui se construit. "La ligne votée" ne peut tolérer que les chefs se trompent, donc ils ne se trompent pas
*De fait l'opposition est généralement condamnée dans tous les cas de figure. Les SR, les anars ont été pourchassés en URSS et éliminés physiquement et intellectuellement. Kolontaï a été pratiquement exilée; Le Che a dû aller porter la révolution "ailleurs" et il en est mort.
*Donc la tolérance est coupable par définition, elle est un concept bourgeois.
*Comme la démocratie peut mettre en question la "ligne", elle est à rejeter. Les bolcheviques y ont substitué "le centalisme démocratique"
*la protestation fait partie de l'indiscipline, c'est une opposition en germe
En quoi tout cela est fondamentalement une affaire d'hommes ?
Dans le monde capitaliste, les femmes tout autant que les hommes ont pu exercer un terrible pouvoir: Elizabeth 1ère en GB, Mme Thatcher...
Dans le combat contre les pouvoirs établis, contre le colonialisme, et contre le capitalisme, ce sont des hommes qui sont montés au créneau (sauf Jeanne d'Arc ??? Mais déguisée en homme...). C'est une conséquence du patriarcat. Seuls des hommes, soutenus par des femmes, avaient les moyens de construire une opposition et de combattre. Et seuls des hommes ont construit une opposition théorique. Les femmes sont passées inapperçues.
Tout ce qui précède vaut pour tous les révolutionnaires même les plus adulés comme ARAFAT le palestinien, et .............le noir sud africain
ce qui suit concerne le bolchévisme
Division impulsée par Marx contre Bakounine, essentiellement pour une question de "pouvoir", de "leaderschip". Le "marxisme"pouvait parfaitement s'enrichir des idées de Bakounine, et former une théorie plus élaborée, plus créative, qui aurait incorporée l'idée du contrôle des masses.
Il manque au marxisme la question de la "démocratie à la base", comme expression du peuple. Lorsque les soviets sont apparus en Russie comme créations spontanées des masses, ils n'ont pas été incorporés à la théorie. La "dictature du prolétariat" était en contradiction avec la potentialité des soviets
-le ver était dans le fruit avec "la dictature de prolétariat" ou du parti, cf Bakounine
-la dictature du parti, le parti unique
-le mépris du peuple, le rejet des soviets
-la croyance dans la Vérité, la croyance dans la Science toute puissante. La toute puissance du savoir contre les besoins du peuple
-le sens de l'histoire et une pensée erroné sur le progrès: peuples inférieurs et peuples supérieurs
-la police politiue pour conserver le pouvoir
-l'alliance avec le nationalisme allemand dès 1922: traité de Gênes et de Rappalo
-Pensée de plus en plus droitière et opportuniste: homophobie, et antisémitisme
-nourrit l'extrême droite
-le pacte germano bolchévique de 39
-le rejet de la démocratie et des classes
-le rejet des anarchistes
Aujourd'hui qui a envahi l'UKRAINE et qui y déverse ses bombes ? Le plus grand oligarquede l'ex URSS: Poutine.
Poutine, comme tous les siens qui sévissent dans le monde occidental, devenu déjà richissime dans le monde communiste stalinien en profitant des ses activités de bureaucrate dans la police, se réclame aujourd'hui de la Grande Russie impériale. Nationaliste revanchard, lié à toute l'extrême droite européenne, il prétend que le gouvernement ukrainien est néo-nazi par projection de ce qu'il est lui-même.
Beau reste de l'URSS, son extrême richesse a été détaillée par Navalny qui le paye cher dans sa prison.
Le 6 mars 2022
A partir d'un épisode peu connu de 1921 en URSS, l'existence éphémère
d'un comité de soutien des affamés de juillet 21 à août
22, qui aboutit à l'expulsion de 160 intellectuels de l'URSS, ressurgit
la question paysanne et celle de la définition du socialisme, sous la
plume de Lénine.
1)L'année 1921, année de tous les dangers.
En février 21 le soviet de Kronstadt vote le refus des réquisitions
et la volonté populaire de décider du devenir du surplus agricole
en dehors des injonctions du parti bolchévique. Ce n'est pas la seule
révolte, il y en a des dizaines d'autres, parfois armées, soigneusement
cachées, et toutes réprimées avec une extrême violence.
Le Parti ne discute pas. Trotsky envoyé par Lénine avant la fonte
des neiges à Kronstadt ne fait pas de quartier.
L'URSS est encore en guerre civile et connait la famine. Le comité de
soutien aux affamés est autorisé avec méfiance en juillet
de la même année. Et c'est cette même année, tout
à fait cruciale, où Lénine réalise que le gouvernement
peut, suite aux diverses insurrections, perdre le pouvoir à partir de
la question paysanne.
N'oublions pas qu'il fait poursuivre en 1921 et 1922 les troupes " makhnovistes
", anarchistes d'origine ukrainiennes, par l'armée rouge, jusqu'à
leur disparition. Makhno qui avait joué un rôle central dans l'élimination
des russes " blancs " de Dénikine, prônait en effet "
des soviets libres " comme les menchéviks et les SR (socialistes
révolutionnaires).
Lénine en bon stratège politique, analyse la situation et propose
un recul calculé sur la question paysanne, en lui donnant une grande
audience : reconnaissance de la nocivité des réquisitions, transformation
des réquisitions en impôts en nature négociés, possibilité
faite à la paysannerie de vendre son surplus agricole sur les marchés.
C'est ce qu'on appellera la NEP (nouvelle économie politique).
Il fait donc des concessions mesurées tout en restant impitoyable sur
le fond : il n'y aura pas de soviets libres. Mais d'une part la paysannerie
doit retrouver le désir et la force de produire et de vivre mieux, et
d'autre part l'URSS doit pouvoir nourrir sa population.
Le comité de soutien n'est qu'une concession provisoire. Les intellectuels
qui l'animent doivent disparaître à terme, d'où leur expulsion,
comme les bandes de Makhno.
2)Le socialisme en URSS à partir de la paysannerie ?Non.
La famine ne peut se traiter en tant que famine, d'un point de vue humaniste,
dans l'esprit de Lénine. Elle n'est qu'un épisode éventuellement
dangereux socialement et qu'il faut traiter en tant que tel.
Ou la famine peut servir d'explosif à " l'ennemi de classe "
pour chasser le gouvernement bolchévique, ou la famine peut servir à
restructurer la paysannerie en chassant sa partie surnuméraire vers le
prolétariat industriel. Dans ce dernier cas, détruire " l'économie
paysanne " grâce à la famine est un processus progressif qui
va dans le sens du socialisme à long terme.
Lénine en a l'idée sous le tsarisme au moment de la famine de
1891, et il ne soutient donc pas un comité d'aide, et à nouveau
en 1921, sauf que la famine due aux réquisitions et à la guerre
civile peut faire perdre le pouvoir aux bolcheviks.. Lénine en conclut
que la tâche des bolchéviks est de construire un capitalisme d'Etat
sous contrôle du prolétariat, c'est-à-dire du Parti.
Lénine ne croit donc pas, et tout le parti bolchevik avec lui, qu'il
sera possible de construire le socialisme avec la paysannerie telle qu'elle
est.
Pour faire alliance avec le prolétariat, celle-ci doit se prolétariser
dans de grandes fermes collectives avec les moyens industriels les plus avancés,
et perdre ses soviets relativement libres. Mais c'est une longue marche. Il
faudra convaincre les paysans d'entrer dans les fermes collectives. Staline
les obligera en 1929, une fois Lénine mort en 1924, il balayera les soviets
paysans et réutilisera la famine pour détruire l'économie
paysanne.
Pour construire le capitalisme d'Etat, l'alliance avec l'Allemagne, pays industriel
( mais interdit de reconstituer son armée du fait de l'interdiction du
traité de Versailles à cette reconstruction), est indispensable,
c'est le traité de Rapallo de 1922.
3)Quel socialisme ?
On a compris depuis longtemps que le socialisme, dans l'esprit des bolcheviks,
ne peut se construire que sur la base du capitalisme le plus avancé :
le capitalisme d'Etat. A savoir les grandes usines industrielles de type capitaliste
avec une forte productivité (Dans " La Révolution trahie
" Trotsky n'aura de cesse d'accuser de trahison Staline qui ne met pas
la " productivité " au sommet des tâches de l'URSS),
et des fermes collectives. Dans ce cadre le prolétariat prendra le pouvoir
et réalisera le socialisme.
Ce qu'on ne savait pas ou mal, c'est l'analyse détaillée que Lénine
fait du processus réel et intellectuel vers l'abolition de toutes les
petites productions, agricoles, artisanales, industrielles, comme étant
contraires au mouvement inéluctable vers la grande production, donc vers
le socialisme (image de la roue qui tourne à l'envers). De ce point de
vue l'étude détaillée de son article sur le " populisme
" en 1898, qu'il reprend dans de nombreux textes et interventions de 1921
est très éclairante. Ce texte disponible et mal étudié,
explicite la pensée de Marx de la meilleure des façons. Mais nous
fait poser la question de la nature de la société sans classes
de Marx : Aucun soviet libre, coercition maximum, avec un prolétariat
dominant qui a absorbé toutes les classes intermédiaires
.
Mais un prolétariat
..soumis
. ? Une vision de l'esprit dont
ni le prolétariat ni la paysannerie n'ont jamais voulu. C'est une certitude.
AMC 7-1-22
LENINE : SA POSITION SUR LA FAMINE DE 1921 ET SUR L' AVENIR DE LA PAYSANNERIE
EN URSS (essai)
(26-12-21 AMC)
Dans son discours de réception du Nobel de la paix (colauréat
avec Maria Ressa), Dmitri Mouratov évoque l'expulsion de 160 intellectuels
par les bolchéviks le 29-9-1922.
Ce fait largement passé sous silence mérite qu'on s'y arrête.
Comme le disent Michel Heller et Dominique Négrel dans un article des
" Cahiers du Monde russe soviétique " (avril -juin 1979), intitulé
" Premier avertissement, un coup de fouet. L'histoire de l' expulsion des
personnalités culturelles hors de l'URSS en 1922 ", ce fait n'a
pas été étudié et constitue une tache blanche, disent-ils,
de la part des historiens soviétiques. .
Cet épisode ne relève pas de la simple anecdote. En effet des
intellectuels qui ne sont pas membres du parti, mais sympathisants, s'adressent
au parti bolchévique et proposent leur aide en juillet 1921 pour subvenir
aux besoins des victimes de la famine, famine qui s'est abattue sur l'URSS cet
été là dans une situation déjà gravissime.
Ils offrent leur aide car ils ont des amis à l'étranger susceptibles
de réunir des fonds et des produits utiles.
Fait exceptionnel, le parti accepte, après beaucoup d'hésitations,
la création d'un " Comité d'aide aux affamés "
dont le président sera Kamenev. Les membres du comité qui sont
des intellectuels connus reçoivent le droit de faire appel à leurs
amis étrangers pour recevoir des secours. Ceux-ci ne savent pas que cet
appel à l'étranger sera utilisé contre eux plus tard comme
argument de leur trahison vis-à-vis de l'URSS, et servira en vue de leur
expulsion.
Passons tous les détails abondants donnés par les auteurs de l'article
ci-dessus, comportant une bibliographie russe, qui puise dans les oeuvres russes
de Lénine et des écrits des témoins de l'époque.
Possédant les uvres de Lénine aux éditions sociales,
nous avons cherché les écrits cités. Ceux-ci ne sont pas
au complet comme ils peuvent l'être dans les éditions de Moscou.
Entre autres l'existence du " Comité d'aide aux affamés "
n'est pas citée.
Celui-ci ne vivra que du 21 juillet 1921 au 27 août de cette même
année. Soit un bon mois. Et sera dissous par Lénine.
Que s'est-il passé ? Il faut plonger dans l'idéologie bolchévique
à travers les déclarations de Lénine pour comprendre
I)LENINE ET LE PARTI BOLCHEVIQUE, SUR LA QUESTION DE LA FAMINE
C'est Lénine dans la Pravda du 21-7-21 qui annonce que cette famine est
aussi terrible que celle de 1891 (plus de 30 millions d'affamés à
l'époque et 2 millions de morts). Cet article dans la Pravda n'apparaît
pas dans les uvres complètes aux tomes 32 et 33 (écrits
de 1921-22), aussi étonnant que cela puisse paraître.
Dans l'article de la Pravda Lénine fait allusion à la famine de
1891.
1)La famine de 1891.
Le rappel de la famine de 1891 n'est pas fortuit. Lénine qui était
étudiant dans la région de Samara à l'époque, vit
se constituer un " comité d'aide aux affamés ", dans
cette année là. Il n'y participa pas, et se prononça contre
une telle aide (p 133 des cahiers). Avec quels arguments ?
La famine de 1891 dont le gouvernement de l'époque est le seul responsable,
dit Lénine, contribua à jeter une partie de la paysannerie vers
l'industrie, aida à la croissance de cette dernière, qui ne pouvait
que rapprocher la Russie du socialisme, (le capitalisme en construction étant
une phase nécessaire)
La famine en décimant l'économie
paysanne détruisait la foi dans le Tsar et Dieu, et poussait le paysan
vers la voie de la révolution, en devenant un prolétaire
(rapporté par un ami de Lénine p 134 des Cahiers)
Léon Werth et Stéphane Courtois rapportent eux-mêmes ce
qui suit, ayant puisé aux mêmes sources : "
.d'après
son ami Béliakov , Lénine " avait le courage de déclarer
ouvertement que la famine avait de nombreuses conséquences positives,
à savoir l'apparition d'un prolétariat industriel, ce fossoyeur
de l'ordre bourgeois. [
] En détruisant l'économie paysanne
attardée, la famine, expliquait-il, nous rapproche objectivement de notre
but final, le socialisme, étape immédiatement postérieure
au capitalisme. La famine détruit aussi la foi non seulement dans le
tsar, mais même en Dieu ? ".
Ces propos sont révélateurs de la pensée de Lénine
qui restera inchangée jusqu'à sa mort. Certains y ont vu les traits
d'un individu inhumain et barbare. Gardons nous d'un jugement moral qui masquerait
la compréhension de ce qui sera le projet bolchévique léniniste
du socialisme en URSS.
Ainsi, à vingt ans, Lénine a déjà une vision téléologique
et doctrinale de la société et de l'histoire, vision abstraite,
mais pas plus que celle de Marx, qui repose sur une philosophie de la nécessité
historique (déterminisme) et implique une absence totale de compassion.
A propos de cette famine de 1891, Lénine nous révèle qu'il
a une idée précise de ce que doit être le développement
économique de la Russie, l'évolution des classes sociales, la
nécessaire disparition de la paysannerie en tant que classe, une idée
sur pouvoir du " seul prolétariat ", et peut-être l'objectif
du parti unique pour entériner ce qui précède
On peut
comprendre alors, face à la violence de ce qui sera imposé, la
proposition de la NEP par Lénine en 1921 comme nécessaire recul,
provisoire, mais simplement recul, pour éviter l'explosion sociale.
Il est du plus grand intérêt d'en savoir plus, et de comprendre
ce que Lénine a écrit sur sa vision du développement historique
en URSS, dont on a juste une petite idée après cette déclaration
sur la famine de 1891.
Quelles furent les causes de celle-ci ?
Soulignons que la fin du servage en 1861 avait eu comme objectif de rapprocher
l'agriculture paysanne russe de l'agriculture occidentale de l'ouest en obligeant
à une réforme agraire qui imposa aux paysans de racheter les terres
de leur ancien propriétaire, ce qui devait provoquer la naissance d'un
grand nombre d'ouvriers agricoles sans terre, prêts à s'embaucher
dans des fermes de type capitalistes avec salariés, ou dans l'industrie
des villes.
Malgré cela la Russie était demeuré un pays dominé
par la petite production agricole, largement communautaire autour du "
mir ", particularité russe, Ce qui ne l'empêchait pas d'être
avant la première guerre mondiale un des plus grands exportateurs de
céréales dans le monde (culture du trèfle sur les anciennes
terres de jachère pour enrichir celle-ci dès 1850. Ce sont les
grands propriétaires qui vendent une partie du surplus à l'exportation)(il
faudrait ici une note sur la révolution agricole de type agronomique
qui a touché toute l'Europe au 19ème siècle). La Russie
reste un pays dit en " retard " d'un strict point de vue capitaliste
par rapport à l'agriculture européenne, qui à la fin du
19ème avait accédé aux engrais chimiques (augmentation
considérable des rendements), avec un mouvement relatif de concentration
des terres.
En 1891 en Russie les paysans n'ont pas de réserves, c'est une mauvaise
année de sécheresse, la paysannerie est demeurée surnuméraire
et elle est accablée par la fiscalité tsariste.
Lénine, jeune marxiste, comprenant à la lettre ses lectures de
Marx, se refuse à secourir la famine
2)Un aperçu de la pensée de Marx :
" De toutes les classes subsistant aujourd'hui en face de la bourgeoisie,
le prolétariat, seul, forme une classe réellement révolutionnaire.
Les autres dépérissent et s'éteignent devant la grande
industrie, dont le prolétariat est le produit le plus propre. La classe
moyenne, le petit industriel, le petit commerçant, l'artisan, le cultivateur
( que Marx désignera sous le nom du peuple ), tous combattent la bourgeoisie
pour sauver leur existence comme classes moyennes. Ils ne sont donc pas révolutionnaires,
mais conservateurs ; bien plus, ils sont réactionnaires, car ils cherchent
à faire tourner en arrière la roue de l'histoire (souligné
par nous). S'il leur arrive d'être révolutionnaires, c'est qu'ils
se voient exposés à tomber bientôt dans la condition des
prolétaires, c'est qu'ils défendent non pas leurs intérêts
présents, mais leurs intérêts futurs
. " en tant
que prolétaires. (Le Manifeste Communiste , 1848, Tome I, La Pléiade,
p 171-172).
Ce texte signifie que les classes sociales constituant le peuple, qui défendent
leurs intérêts immédiats, par exemple le droit d'exister
et de ne pas disparaître, sont réactionnaires.
De ce point de vue, en cas de famine, ces classes n'auraient pas le droit d'être
défendues et secourues. Entre autres les paysans
C'est pourquoi Lénine peut dire qu'" en détruisant l'économie
paysanne attardée, la famine, nous rapproche objectivement de notre but
final, le socialisme, " (parce que la grande entreprise capitaliste agricole
pourrait seule devenir facilement une entreprise communiste ???)
Il s'agit probablement de cela mais nous avons encore besoin d'éléments
d'explications supplémentaires que Marx ne donne pas. C'est Lénine
qui va les donner.
3)La famine de 1921 et le traité de Rapallo.
Selon Heller et Négrel , Lénine impute la famine de 1921 à
la sécheresse, à la mauvaise récolte de 1921, aux conséquences
de la guerre civile, au retard de l'agriculture, au faible niveau des connaissances
en agronomie, aux formes périmées de la rotation des cultures,
à la lutte des propriétaires et des capitalistes contre l'URSS
dans le blocus contre elle
..(p 134 des Cahiers, déclaration du
CC du parti le 21-7-21, introuvables dans les uvres des Edit Sociales
). Nous ne trouvons rien dans les " uvres " sur le " faible
niveau des connaissances en agronomie, sur les formes périmées
de la rotation des cultures ". Il nous paraît indispensable pourtant
de comprendre ce jugement d'autant que, depuis la fin du 19ème, la Russie
a eu accès à la révolution agricole qui a permis de supprimer
la jachère (cf Analyse?diagnostic de l'agriculture de la partie ouest
du district d'Ouvarovo, Russie, Mémoire de Nathalie Coupin et Ivan Logvenoff
sous la direction de: Hubert Cochet (AgroParisTech) 2018 )
Egalement nous ne trouvons pas dans les uvres la décision de la
dissolution du comité d'aide fin août 1921, ni la décision
d'expulsion des 160 intellectuels de l'URSS en 1922.
Mais on trouve dans divers textes, à plusieurs reprises une analyse de
la situation catastrophique de la paysannerie en 1921. Afin de compléter
l'analyse de Heller et Négrel, nous avons cherché et trouvé
des écrits sur cette situation dans les uvres de Lénine
en 1921 et 1922.
Sécheresse, réquisitions forcés, communisme de guerre,
guerre civile évoqués par Trotsky (au 9ème congrès
du parti en 1920).La guerre civile pour lutter contre les blancs a ruiné
le pays, explique-t-il.
Dans " Rapport sur l'impôt en nature " (du 9 avril 1921 p 302
et suivantes Tome 32),
Lénine fait ce rapport 2 mois après avoir subi les assauts de
la population de Kronstadt (28-2-1921) qui a pris les armes contre les bolcheviks
et refuse les réquisitions dans un vote de leur soviet qui s'oppose aux
ordres des bolchéviques. Kronstadt sera écrasé par l'armée
rouge de Trotsky sur la demande de Lénine.
Dans son rapport ce dernier, inquiet, veut convaincre la paysannerie de sa bonne
foi. Il explique très longuement que l'impôt en nature doit remplacer
les réquisitions forcées, en attendant que l'industrie socialiste,
à construire, puisse directement échanger ses produits avec ceux
de l'agriculture socialiste, à construire, dans le cadre de leurs besoins
réciproques. Lénine indique que l'économie paysanne a été
dévastée par la guerre (p 303), puis ruinée par une mauvaise
récolte (celle de 1920), et vouée à la ruine dans certaines
régions. Mais la petite économie paysanne individuelle, arriérée,
va, dit-il, en se groupant progressivement s'organiser en " grosse exploitation
agricole collective " (p 303) (1)
Lénine reconnait que les réquisitions, allant au-delà des
excédents et touchant aux produits indispensables à la vie paysanne,
a provoqué la misère (p 306), mais dit-il, nous étions
dans une forteresse assiégée, et tout le monde a souffert de la
sous-alimentation, pendant la guerre civile. Nos réquisitions ont été
décriés par les mencheviks, les attribuant à la nature
du régime soviétique. C'est inexact dit-il (p 311)
Néanmoins
il reconnait que les paysans ne voulaient plus du pouvoir des bolchéviks.
Ce faisant Lénine annonce le retour à la liberté du commerce
(la NEP), comme étape provisoire, parce que l'économie paysanne
a besoin de concessions, " d'être reposée, revigorée
" après une extrême misère (p 316). Ce langage se comprend
après Kronstadt.
Dans un autre texte : " L'impôt en nature " (21-4-1921) (tome
32) Lénine est très explicite sur ce qu'il entend par socialisme
: " Le socialisme est impossible sans la technique du grand capitalisme,
conçu d'après le dernier mot de la science moderne, sans une organisation
d'Etat méthodique qui subordonne des dizaines de millions d'hommes à
l'observation la plus rigoureuse d'une norme unique dans la production et la
répartition des produits. Nous, les marxistes, nous l'avons toujours
affirmé
Quant aux gens qui ont été incapables de comprendre
au moins cela (les anarchistes, et une bonne moitié des socialistes révolutionnaires
de gauche) , il est inutile de perdre deux secondes à discuter avec eux
(p 354)..(souligné par nous)
.. " L'Allemagne et la Russie incarnent en 1918 avec une évidence
particulière la réalisation matérielle des conditions du
socialisme ". Conditions économiques d'un côté, conditions
politiques de l'autre ;
" Une révolution prolétarienne victorieuse en Allemagne briserait
d'emblée, avec une extrême facilité, toutes les coquilles
de l'impérialisme
.. ".(p 355)
Et la voie serait ouverte vers le socialisme mondial "
" Tant que la révolution tarde à " éclore "
en Allemagne, notre devoir est de nous mettre à l'école du capitalisme
d'Etat des allemands, de nous appliquer de toutes nos forces à l'assimiler,
de ne pas ménager les " procédés dictatoriaux "
pour hâter cette implantation des murs occidentales dans la vieille
Russie barbare, sans reculer dans l'emploi des méthodes barbares contre
la barbarie
" (souligné par nous)
Il faut se " mettre à l'école de l'impérialisme allemand
". (p 355)
Toute la stratégie des bolchéviks est dans le texte ci-dessus:
-le socialisme fondé sur le grand capitalisme d'Etat
-le capitalisme d'Etat lui-même fondé sur la " science "
-l'obligation d'y contraindre des millions d'humains
-avec des contraintes éventuellement barbares
Lénine n'a jamais dérogé à cette vision des choses,
depuis sa jeunesse, vision qu'il faut garder présente à l'esprit.
Ce qui est étonnant , c'est la référence à la science.
Les bolcheviques, quand ils savent qu'ils sont minoritaires, justifient leur
politique par la science. Ils se disent dépositaires de la science, comme
d'autres le sont de la vérité divine. Il est très possible
que Lénine se soit pensé comme étant le garant de la vérité
historique. Il nous reste à trouver des textes sur cette science particulière.
Il n'empêche qu'il est plus que sûr que le prolétariat, comme
la paysannerie, n'ont jamais participé à la révolution
pour réaliser l'objectif de transformer le grand capitalisme industriel
en socialisme !. Nous y reviendrons
Au " 3ème Congrès de l'Internationale communiste en juin
1921 ", Lénine revient sur cette situation où le parti doit
reculer sans perdre le pouvoir dans un pays ravagé par 7 ans de guerre
en continu, des privations des paysans qui sont devenues intenables
Avec
une crise économique qui a pris un tour gigantesque au printemps 1921
(p 518-19 tome 32). Il revient sur la nécessaire (mais provisoire) liberté
du commerce où le paysan doit pouvoir vendre librement ses excédents.
C'est un retour au capitalisme (1bis), dit-il, mais sous contrôle du prolétariat.
C'est du capitalisme d'Etat dans un Etat prolétarien. La même chose
doit se faire au profit de la classe ouvrière, ce qui veut dire accorder
des concessions au capital étranger, sans la moindre dénationalisation,
pour " relever notre industrie ". " Nous faisons ceci pour gagne
du temps
en attendant que nos camarades étrangers préparent
activement leur révolution
. ".(p 522-523).
C'est là que Lénine explique que la tactique des bolchéviques
est d'accorder " la liberté et la démocratie " pure
" à la bourgeoisie ", si le pouvoir des bolchéviks n'est
pas compromis
en tant que concessions utiles parce que " la situation
économique est fragile "
. " Ensuite nous construirons
le socialisme "
et il n'y aura pas de quartier.. (p 527).(2)
" Tout le reste n'est que duperie " termine -t-il dans cette page.
Nous avons un doute sur le contenu de la duperie.
En effet les bolchéviks qui ne cessent de dire qu'ils attendent l'extension
de la révolution mondiale, notamment par l'intermédiaire du prolétariat
allemand, recherchent en même temps avec passion une alliance forte avec
le gouvernement allemand pour une aide industrielle. Les deux sont-ils compatibles
? Oui répond Lénine qui est prêt à se mettre à
l'école scientifique du capitalisme d'Etat Allemand.
Un an après le discours ci-dessus sur les nécessaires concessions
à faire pour garder le pouvoir, la Conférence de Gênes se
tient du 10 avril au 19 mai 1922 entre les pays occidentaux dont l'URSS. Et
le traité secret de Rapallo du 16-4-1922 est signé entre l'URSS
et l'Allemagne, laquelle bien qu'écrasée au traité de Versailles,
est une puissance impérialiste au même titre que la France et la
GB
.. (3)
Ce traité peut-il se comprendre comme un adieu à la révolution
allemande et à la révolution mondiale, sauf si une guerre permettait
à l'URSS de conquérir des pays au socialisme par les armes ??
4)Conclusion sur l'avenir du Comité. Questions sur le rôle de
la famine
Le Comité d'aide aux affamés ne peut vivre que par l'aide de
l'étranger, il n'y a aucune réserve en URSS. Il fonctionne immédiatement
sous l'égide de la Croix Rouge. Il était sous le contrôle
" l'Inspection ouvrière et paysanne ", mais les membres du
comité signent avec des associations étrangères des demandes
de secours, avec la surveillance de Kamenev.
Radek, un fidèle de Lénine, insinue que la bourgeoisie cherchera
à s'introduire en URSS par cette voie ; Le 21-7-21 le comité est
dissous sur ordre de Lénine, et une majorité de ses membres se
retrouvent en prison, ou en résidence surveillée (texte de Michel
Heller p 145-146). Pourtant de l'aide américaine arrive, mais elle ne
permettra de sauver que 35% des affamés au lieu de 70% prévus
(p148)
.On parle de 5 millions de morts
Passons sur les diverses péripéties qui eurent lieu alors. Les
intellectuels furent tous expulsés dans l'année qui suivit, avec
la promesse d'être fusillés s'ils tentaient de revenir. Gorki qui
soutenait le comité et tentait d'intercéder en sa faveur, fit
partie du lot ; sauf qu'il eut l'autorisation de revenir, ce qu'il fera en 1928.
Les bolcheviques ont donc refusé de secourir les affamés avec
l'aide de l'étranger, à un moment où les prémices
de pourparlers étaient posés avec l'Allemagne en vue d'une collaboration
industrielle. Cette attitude est conforme avec celle de Lénine en 1891
à Samara. Lénine n'a pas changé d'un pouce son jugement.
La famine fait partie de l'histoire du communisme dans tous les pays où
celui-ci fut proclamé. La famine semble faire partie d'une politique
toujours dirigée d'abord contre la paysannerie. Ce n'est pas un hasard.
La paysannerie révolutionnaire n'a jamais été pour sa prolétarisation
et sa disparition ! La paysannerie est une classe rebelle par nature qui tient
à son indépendance absolue. Le meilleur exemple est la révolution
paysanne mexicaine de 1910, passionnante histoire et point aveugle pour les
marxistes.
Exemples de famines dirigées principalement contre la paysannerie :
URSS 1918, 1921, 1932-1933 en Ukraine (pays grand producteur de blé !)
plus de 5 millions de morts,
Chine : famine du grand bond 1958-1962, plus de 30 millions de morts
Cambodge sous les Khmers rouges : 1975 1,7 million de morts
Corée du nord communiste entre 1994-98 : famine organisée, nombre
de morts inconnus
Mozambique sous le FRELIMO entre 1977 et 1981, mise en place de politiques agricoles
coercitives vis-à-vis des paysans : disettes en continu
Ethiopie de Mengistu socialiste : famines 1984-85 suite à des transferts
de populations autoritaires + la sécheresse, nombre de morts inconnus
.
Il nous importe pour finir de comprendre dans le détail le cheminement
" scientifique " de la pensée de Lénine concernant le
développement historique des sociétés , l'inéluctabilité
du capitalisme comme du socialisme. Ce qui justifie au passage des méthodes
particulières pour forcer leur réalisation.
Lénine s'explique à ce sujet très bien dans un texte de
1895 qui va guider toute son action.
L'un des textes le plus explicite est un texte de jeunesse de Lénine
qui a 200 pages et date de 1895. C'est un texte de critique du populiste russe
STROUVE (les Amis du peuple) qui se réclame d'un marxisme qui lui est
propre.
Le populisme est selon Lénine une pensée stérile car elle
est contraire à l'évolution historique en prétendant qu'il
peut être fait échec aux effets les plus pernicieux du capitalisme.
Lénine utilise contre Strouvé la même méthode que
Marx a employée contre Proudhon qui avait écrit " la philosophie
de la misère " et que Marx avait transformé en " Misère
de la philosophie " dans une diatribe destructrice.
Lénine y est fort bavard comme il le sera toujours, triplant ses discours
de redondances, parfois utiles, parfois ennuyeuses. Peut-être a-t-il inauguré
le système des discours fleuves qui interdisent en fait toute réplique.
On peut résumer.
Dans une introduction sur les " amis du peuple " de 1894 (p 350 tome
1), Lénine explique que les populistes réclament des réformes
économiques qui protègeraient le peuple contre le développement
du capitalisme pour garantir les intérêts de celui-là. C'est
illusoire, dit-il, c'est une fausse piste
Les populistes veulent " se porter au secours du peuple ". Or on ne
doit pas retarder le développement capitaliste mais l'accélérer
(en devenant tous prolétaires ???)
Aller en sens contraire de cela est un comportement " petit bourgeois "
" réactionnaire ". Les populistes demandent des crédits,
des achats de terre (pour compenser celles qui ont été confisquées),
des améliorations techniques, des artels (associations volontaires de
travailleurs), des labours en commun
contre les calamités de l'industrie
(379 à 382), c'est illusoire.
Les petits producteurs sont hors d'état de comprendre qu'ils sont une
classe de transition
que le capitalisme n'est pas accidentel mais un produit
direct issu de la lutte des forces sociales opposées, et qu'il est inutile
de vouloir revenir en arrière. Lénine reprend l'image de "
faire tourner la roue d' l'histoire à l'envers " du Manifeste Communiste
(p 384).
Lénine s'oppose au point de vue du petit producteur, et des paysans communautaires,
car il est pour un collectivisme industriel (p 392 à 401). L'idéologie
du petit producteur n'a rien à voir avec le marxisme.
L'assujettissement au capital est nécessaire à l'organisation
capitaliste.
Il se moque de la défense de la " communauté rurale "
et de l'expropriation paysanne de la terre du fait de la mainmise du capital
sur la production. Oui les moyens de production qui sont expropriés en
vue d'exploiter les paysans constitue un développement capitaliste normal
(
Il vaudrait mieux demander des droits en tant que prolétaires plutôt
que la restitution des terres ou la demande de terre ????..). Les populistes
disent que les marxistes veulent enlever la terre aux paysans .
Lénine est contre la défense des industries artisanales, contre
la demande d'améliorations du sort des artisans, contre des coopératives
comme si le développement capitaliste ne devait pas poursuivre son évolution
Pour en finir avec l'usure et la servitude, il faut, dit-il accélérer
le développement capitaliste, et non pas punir celui qui se livre à
l'usare
.
Ce ne sont pas des individus malfaisants qui asservissent la paysannerie, c'est
le capitalisme qui poursuit sa nécessaire ascension.
L'exploitation capitaliste est impersonnelle ; elle détruit toutes les
illusions
La production marchande est celle des producteurs isolés qui sont liés
entre eux par le marché, et qui doivent trouver en face d'eux des possesseurs
d'argent pour leur acheter leurs marchandises. C'est un système arriéré
(donc non capitaliste ?). La coopérative n'est qu'un palliatif pour lutter
contre la concentration du capital et non une solution.
L'histoire est celle de la lutte de classes, des rapports sociaux et non des
individus
Lénine explique ce qui est progressif dans le système capitaliste,
comme dans le Manifeste communiste : la destruction de tous les anciens rapports
sociaux et familiaux : le clan, la communauté territoriale, la famille
Auj les producteurs peuvent prendre en main leur propre sort dit-il
( en
faisant quoi ? en devenant des prolétaires ???)
" La liberté est la nécessité devenue consciente "
(Engels) (savoir que l'on doit devenir un prolétaire exploité
et s'organiser pour réaliser le socialisme ??)
Lénine écrit cette phrase :" loin d'impliquer le fatalisme,
le déterminisme offre au contraire un terrain propice à une action
raisonnée " (souligné par nous)( p 454)
.( Quelle est
cette action raisonnée ?? S'organiser en tant que prolétaire pour
transformer le capitalisme en socialisme ?
Conclusion et commentaires
Aucun libéral de l'époque n'a contesté la description ci-dessus
qui est fidèlement la transcription de la pensée de Marx, sauf
que ce dernier ne l'a pas fait aussi précisément, car il se serait
fait huer dans l'AIT (association internationale des travailleurs) où
l'anarchiste Bakounine l'aurait accusé d'être à la solde
des capitalistes.
1)La pensée de Marx concernant le développement historique,
comme celle du jeune Lénine sur le même sujet, est une pensée
libérale dont le seul caractère subversif est qu'elle contient
une théorie de la prise du pouvoir, ce qu'avait parfaitement vu l'économiste
Italien Pareto. Le prolétariat (le Parti, rectifiera Bakounine) a vocation
à prendre le pouvoir par une action organisée. Pareto pense que
c'est possible. Et il met en garde ses amis libéraux.
2)Outre cela, c'est une pensée déterministe, comme l'écrit
Lénine, même si les marxistes s'en sont défendus. Il est
intéressant qu'il l'écrive. La description qu'il fait de l'évolution
historique est en effet déterministe. Le développement capitaliste
y est inéluctable selon lui, il n'y a pas d'autre voie.
Or c'est une pure construction intellectuelle qui ne se vérifie pas dans
l'histoire des peuples, si celle-ci n'est pas violentée par le capitalisme.
On ne va pas ici entrer plus avant dans la critique, Castoriadis l'a amplement
fait, les anthropologues l'ont fait déjà au 19ème siècle.
C'est toute la querelle sur la nature de l'évolution (unilinéaire
ou multilinéaire) et de la notion de " progrès ". Cela
a été démontré maintes fois : il n'y a aucune raison
de croire qu'une seule évolution historique est possible. C'est une pensée
européenne " égocentrique " devenue force objective
par la guerre et la dévastation. Rien de tel nulle part ailleurs au niveau
de la pensée (en particulier asiatique et chinoise avant l'arrivée
du communisme), même si les communistes se sont acharnés à
l'imposer avec les libéraux, et même si le capitalisme a contraint
les peuples par la violence à fixer ses normes comme étant universelles.
Les droits de l'homme oui, mais le libéralisme et le communisme non.
L'objectif de se saisir du grand capital industriel est une idée abstraite,
dictatoriale, mais confondue aujourd'hui dans l'inconscient des peuples avec
" l'abondance ". Cependant concrètement l'abondance ne fait
partie d'aucune revendication populaire, d'autant que concernant le communisme,
ce sont les termes " disette et famine " qui apparaissent pour le
désigner.
3) La pensée bolchévique est une pensée ultra minoritaire.
Elle n'a pas pu irriguer en tant que telle une révolution. La révolution
de février 1917 s'est nourrie de la pensée des socialistes révolutionnaires,
des anarchistes, des menchéviks, et de la tradition populaire des conseils
ou soviets. La vocation des bolchéviques a été d'usurper
une révolution qui s'est imposée sans eux. S'en étant emparée,
ils lui ont imposé leur idéologie par les armes, en appelant cela
" la révolution d'octobre ". C'est une pensée minoritaire
qui s'est dite " scientifique ".
Aucune des révolutions qui ont échappé dans un premier
temps au marxisme, celle de 1905 en Russie, de 1910 au Mexique, de février
1917, de 1949 en Chine, de 1959 à Cuba
. et toutes celles qui ont
brièvement fait leur apparition (par exemple en 2011), avant de devenir
communistes ou d'être écrasées, n'ont mis en avant la "
collectivisation agricole et industrielle ". Elles ont la plupart du temps
restitué, consolidé ou réclamé la production communautaire
contrôlée par le peuple, mot détesté par les marxistes
car ce dernier fait allusion à des classes sociales populaires qui entendent
se conserver en tant que telles et non pas disparaître, ou qui entendent
échapper à l'exploitation.(4)
L'idée même de l'obligation d'aller vers une évolution historique
déterminée, inéluctable relève non pas d'une utopie
mais d'une passion cachée pour la dictature.
Une fois la révolution russe de février 1917, et ses soviets,
confisqués par des bolchéviks minoritaires, l'adhésion
du peuple pour le collectivisme n'a jamais existé (5).
Le peuple russe est resté longtemps fidèle à une idée
de la révolution telle qu'il l'avait vécue en 1905 et en février
1917 autour des soviets, et à laquelle il a associé par illusion
le nom de Lénine, puis parfois le nom de Staline.
Allons plus loin, le collectivisme a été détesté
par les grandes masses ouvrières et paysannes, car il signifie la perte
de tout pouvoir de contrôle par les ouvriers et paysans, malgré
un mot qui exprime l'usurpation du sens. Lénine en a été
bien conscient. Par rapport à tout ce qu'il avait imaginé, il
a vite compris que l'URRS risquait de voler en éclats si le gouvernement
ne rétropédalait pas à toute vitesse en 1921 concernant
d'abord l'organisation de la production agricole. D'où la NEP et le retour
au marché
Mais malgré cela, et parce qu'on ne contraint
pas à terme un peuple à produire ce qu'il n'a pas décidé
de produire, l'URSS est demeuré l'exemple de la disette en continu de
tous les produits utiles, de la famine pendant de longues années, puis
des soupes populaires sous Staline lesquelles ont permis au régime de
subsister plus de 70 ans.
Conclusion sur le bolchévisme
Pour finir, Lénine nous donne un aperçu de ce fut le bolchévisme.
C'est une idéologie qui est une construction intellectuelle, comme toute
idéologie, à partir des idées de Marx, qui ne repose
sur aucune réalité sociale revendicative. Aucune force
sociale ouvrière ou non, ne revendique, au 19ème siècle
et 20ème siècle, la nécessité de construire le socialisme
sur le grand capitalisme industriel. Aucune revendication ne s'y attache. Le
socialisme peut s'attacher précisément à tout autre chose
que le capitalisme.
Le bolchévisme va donc faire ses armes, c'est-à-dire prendre
le pouvoir, à partir d'intellectuels fous de pouvoir, sur la base d'une
confiscation de révolutions authentiques (Russie, Chine, Cuba..) qu'ils
veulent transformer en capitalisme d'Etat.
Il est nécessaire de constater que contrairement à ce que pensait
Marx, l'idéologie peut devenir, dans certains cas, une force matérielle
qui peut provisoirement forcer le cours de l'histoire, en trompant les grands
masses, et finalement contre leur désir.
Ce peut-être une force dévastatrice, sur tous les problèmes
de la vie, sur le cours de la vie et sur l'esprit humain. En faire le bilan
est une nécessité absolue
Notes
(1) " La grosse exploitation agricole dite " collective "
" est le " collectivisme agricole " imposé à
la paysannerie russe. Malgré le terme " collectif " utilisé
de façon tronquée, ce collectivisme n'a rien à voir avec
la tradition du " mir ", communauté rurale traditionnelle,
partie de la culture paysanne russe, qui redistribue les terres paysannes, contrôle
l' assolement et les rotations des cultures, pour éviter la misère,
entretient les greniers, crée l'école du village, s'occupe des
impôts pour le pouvoir central
.(proche de la forme tribale d'organisation
de tant de peuples, forme décriée stupidement comme archaïque
!)
Les bolchéviks ont fait semblant de croire que les paysans étaient
naturellement prédisposés au collectivisme (illusion crée
par Marx dans ses écrits sur le mode de production asiatique), qui n'a
rien à voir avec le mir. Par contre l'existence traditionnelle du mir
a naturellement conduit les grandes masses populaires russes à s'organiser
en " soviets ", transformés immédiatement dans les villes
en organes administratifs par les bolcheviks.
L'appellation " soviétique " par les bolcheviks est un subterfuge
mensonger.
(1bis) Dans ce texte, comme dans bien d'autres, Lénine appelle du nom
de " capitalisme " le rétablissement du marché pour
les paysans. C'est une appellation frauduleuse, et Lénine le sait. Ce
qu'il appelle " la petite production marchande " à juste titre
n'est pas le capitalisme.
Pour le coup c'est Marx qui parle le plus intelligemment de la petite production
marchande, en disant que son objet n'est pas la " fructification "
du capital, typique du capitalisme, même y aurait-il un ou deux "
domestiques ". Tout au plus, dans les sociétés de petite
production marchande, il y a l'accroissement possible du patrimoine familial.
De ce point de vue le " marché " n'est nullement l'expression
du capitalisme, mais l'expression de toute société marchande,
petite, grande ou capitaliste
Dans le texte sur la critique du populisme, Lénine introduit l'idée
que la production marchande est " arriérée ", cf notre
texte.
(2) Lénine met dans le vocable " bourgeoisie " tout ce
qui n'est pas le prolétariat
ici il s'agit des paysans qui
obtiennent provisoirement la liberté du commerce. Il parle de "
démocratie pure " à propos du mot d'ordre des SR et des mencheviks
qui ont clamé " des soviets mais sans les bolcheviks " (p 491
tome 32). Il les traite de capitalistes. En effet en " démocratie
pure " les bolcheviks se feraient jeter des soviets. ! Les " réactionnaires
" ne peuvent que se regrouper autour de la démocratie, indique Lénine.
Celle-ci ne fait que masquer, selon lui, la dictature de la bourgeoisie.
Lénine rejette donc la démocratie parce que celle-ci ne serait
pas favorable aux bolchéviks au sein de soviets libres, comme elle ne
leur a pas été favorable dans la Constituante de 1918. Il montre
dans ce texte qu'il en a une conscience aiguë. Lénine oppose la
" vérité " des bolchéviks, " sa vérité
" minoritaire, à une potentielle volonté majoritaire dans
les soviets
.
(3) Le gouvernement soviétique a fait la proposition de la conférence
de Gênes le 28-10-1921 à Lloyd Georges, qui en reprend l'idée.
En effet la Grande Bretagne voulait pacifier les relations de l'URSS avec la
France (très rétive) et la GB, car il craignait plus que tout
un rapprochement de l'URSS avec l'Allemagne. L'URSS le sait mais compte sur
Lloyd Georges. Les craintes de ce dernier se révèlent justifiées.
Sous le contrôle de Lénine, déjà malade, le traité
secret de Rapallo est signé pendant cette conférence le 16 avril
1922 entre l'URSS et l'Allemagne.(On lira l'intégralité du traité
et ses clauses militaires secrètes dans " wikipedia ")
Lénine donne à l'avance (un an avant) le 13 juin 1921 dans le
discours au 3ème congrès de l'IC, (p 489 tom 32) le pourquoi de
cette signature: " La base matérielle du socialisme ne peut être
que la grande industrie mécanique, capable de réorganiser l'agriculture
elle aussi
.. C'est (par exemple°) l'électrification dans tout
le pays
. "
Lénine écrit maintes fois sur ce sujet entre autres dans "
Mieux vaut moins mais mieux " (2 mars 1923)(tome 33) " Nous ne sommes
pas assez civilisés pour passer au socialisme ". L'URSS a besoin
des éléments techniques les plus avancés de l'industrie.
Pour les acquérir l'alliance avec l'Allemagne était nécessaire.
Puis dans le discours lors du 4ème congrès de l'IC (tome 33, Lénine
dit que le passage au socialisme n'est possible que sur la base de la grande
industrie existante en Europe et aux USA.
Dans " Lloyd Gorges et le traité de Rapallo " de Francis Conte
(revue d'histoire moderne et contemporaine tome 23 n° 1 Janvier 1976
p 44 à 67) il est expliqué que l'URSS milite fortement en
1922 pour un rapprochement avec l'Allemagne, indirectement favorisé par
Lloyd Georges. L'URSS a besoin d'une armée puissante avec des moyens
modernes. L'auteur rapporte le souci très juste de Trotsky et de Rakovski
de renforcer l'Armée rouge et de la tenir toujours prête à
intervenir.
Après octobre 1917, la révolution, dans la tête des bolchéviques,
semble devoir s'effectuer désormais essentiellement par les armes, tant
la défense du pouvoir bolchévique a aguerri l'armée rouge.
C'est tout à fait compréhensible après les attaques violentes
des armées blanches de 1918 à 1921, soutenues par la GB, les USA,
la France. L'armée rouge est prête à tout
Francis Conte ne semble pas connaître le contenu du traité de Rapallo
qui pourtant est clairement établi : renonciation réciproque aux
réparations de guerre. Collaboration industrielle et militaire. Ouverture
en URSS d'écoles, de centres d'entrainements et de fabrication d'armes,
de chars avec l'Allemagne
Ceci contrevient au traité de Versailles
Le traité de Rapallo en avril 22 se situe dans le cadre des concessions
annoncées par Lénine avec le capital étranger, entre autres
l'Allemagne nationaliste. Lénine ne construit-il pas " la Nation
bolchevique dans un seul pays " avec l'aide conjointe de l'industrie allemande
et de l'appareil du Komintern ??!
(4) )Le peuple : paysans, artisans, petites entreprises, commerçants,
boutiquiers, ouvriers, artistes en tous genres
Toutes ces classes qui
ont fait la Commune de Paris, et dont se réclament encore aujourd'hui
bien des peuples combattant la dictature. La Commune de Paris n'a jamais été
le fait du seul prolétariat, loin de là.
5) Le collectivisme agricole et industriel est un mot d'ordre étranger aux peuples
Les revendications les plus immédiates des peuples qui se soulèvent
sont :
-la terre aux paysans. Organisation, communautaire ou pas, libre. Travaux collectifs
libres.
-les usines aux ouvriers, gérées par les ouvriers
-éviction des grands propriétaires dans l'agriculture et l'industrie
-liberté de produire et de vendre
-protection de la production par l'Etat
-Prix agricoles garantis pas l'Etat (Inde : le mouvement paysan a obtenu gain
de cause après un an de blocage de New Delhi à partir d'octobre
2020
.Un mouvement d'ampleur historique que les marxistes ont totalement
négligé)°
-contrôle des prix, blocage des loyers
-protection des pauvres
-santé publique pour tous
-école publique pour garçons et filles
-indépendance totale des juges professionnels dans des tribunaux publics
Jamais un seul mot sur le collectivisme !
( Cette appréciation est déjà terrible en 2018. Les textes précédents ne font que confirmer ce qui suit)
Nous n'avons pas renoncé à l'idée du changement révolutionnaire de la société et des humains. Si cette idée s'est incarnée dans la réalité du communisme, ce fut hélas une tromperie, plus même une escroquerie. Ce ne fut qu'une chappe de plomb terrifiante sur la vie même, sur le changement, sur la pensée, sur l'imaginaire, sur la création et l'art. Ce fut la torture et le goulag, l'élimination des paysans, des poètes, des intellectuels et une exploitation terrible des ouvriers. Un retard social qui engendra le nationalisme nazi...Ce fut "minuit dans le 20ème siècle" et cela continue....
Nous n'avons de ce fait plus aucune relation sérieuse avec de dits révolutionnaires "marxistes".
Nous pensons que le communisme ne fut que ce qu'il devait être, et que de ce point de vue Bakounine avait vu juste en disant au 19ème siècle "La dictature du prolétariat ne sera que celle du parti des marxistes". Il fut une dictature partout où il fut proclamé.
Une précisioin. La réalité du communisme s'est appuyée, à partir de Marx, sur a)la dictature du prolétariat (c'est à dire du Parti), b)le mépris de la paysannerie par Marx, c)La prééminence de l'idéologie sectaire sur les capacités révolutionnaires des masses (telles qu'elles se manifestèrent en Russie), d) le rejet de la démocratie à la base, e) la croyance dans le processus tout puissant de l'industrialisation...
En raison de cela, le communisme ne fut qu'une dictature. Et ce n'est pas la conséquence d'une "Illusion utopique" comme dit François Furet. Ce n'est que la conséquence de la façon dont hélas Marx voyait la société future. Il en avait une vision dictatoriale... appelée communisme.
Historiquement la base de la réflexion communiste dans le mouvement ouvier, c'est, même si cela déplait, la recherche de la pureté idéologique excluante, c'est à dire la DIVISION entre les forces qui devraient combattre l'ennemi : la bourgeoisie.. C'est terrible de le dire, mais il faut le dire. Et cela remonte bien à Marx. Celui-ci, de son vivant considérait que seule son analyse théorique et ses objectifs devaient triompher, parce que parés du qualificatif "scientifiques". Il affirmait en quelque sorte le primat de l'idéologie sur le combat concret et unitaire contre l'ennemi. Cette idée a parcouru tout le 20ème siècle et court encore.
Marx a ainsi considéré qu'il devait détruire Proudhon, en tant que philosophe et en tant qu'économiste. Après avoir profité de lui, et lui avoir pris tous ses contacts, il s'est acharné à détruire son aura après s'être introduit dans les milieux intellectuels et ouvriers anglais grâce à lui. Il écrira ainsi en 1847 le terrible "Misère le la philosophie" en réponse à "la Philosophie de la misère" écrit par Proudhon. C'est un pamphlet effrayant de brutalité qui va déstabiliser Proudhon. Tous les marxistes vont s'en inspirer quant au fond et quant à la méthode : pas de quartier pour celui qui n'est pas dans la ligne du chef, pas d'échange, pas de tolérance, pas d'amitié.... On retrouve cette façon de polémiquer dans toutes les organisations se réclamant du marxisme. C'est la proclamation de la VERITE affirmée contre "l'erreur" et le rejet de celui qui "se trompe" dans les rangs de l'ennemi.. Marx par exemple dit ainsi pour résumer ".... Proudhon n'est pas allé au-delà de l'idéal du petit bourgeois..... Il n'imagine rien de mieux que de nous ramener au compagnon, ou tout au plus au maître artisan du Moyen âge....."
C'est par la suite que Marx propose en 1864 la création de l'Association Internationale des travailleurs (AIT). Celle-ci après sa fondation va spontanément vers des orientations proudhonniennes ou Bakouniniennes. Les marxistes y sont minoritaires. La stratégie de Marx est d'évincer les orientations qui ne sont pas les siennes, entre autres par un moyen bureaucratique très simple: le lieu des congrès. Les anarchistes sont interdits dans certains pays. C'est le Conseil Général où Marx a la majorité (on passe ici sur cette question) qui décide des lieux des Congrès. C'est principalement de cette façon que les anarchistes se font exclure. Or c'est une orientation essentielle dans le mouvement ouvrier dans certaines régions et certains pays. L'AIT va se détruire d'elle-même, surtout après l'échec de la Commune de Paris qui sera mal capitalisé...
La 2ème internationale se constituera ensuite sans les anarchistes. Plus d'organisations où le débat serait possible. L'absence de discussion avec les organisations social-démocrates transformera bien souvent les anarchistes en sectaires, et tendra à les exclure des organisations ouvrières, sauf en Russie où ils sont traditionnellement au coeur de la population. C'est pourquoi les bolcheviks viseront à leur élimination physique totale.
L'histoire du communisme et des communistes se continuera sans fin sur la pratique de la division. Les socialdémocrates sous l'impulsion de Lénine se diviseront, non pas pour être plus forts, mais, sous couvert de la "ligne" pure et dure, pour assurer à un petit groupe le pouvoir, les bolchéviks... Les hommes se diviseront entre eux, s'assassineront, et leur tâche consistera à diviser toutes les organisations et syndicats dans lesquels ils se retrouveront, idem des trotskystes. Division entre eux mais division face au pouvoir de la bourgeoisie avec constance depuis plus de 100 ans.
L'enjeu ? Prendre le pouvoir avec l'arme de l'idéologie. A qui le pouvoir doit-il appartenir ? Au peuple dans les organsiations que celui-ci se sera données ? Dans des perpectives d'auto-organisation ? Ou est-ce le parti dit d'avant garde qui s'appropriera le pouvoir ?. Ou tel petit groupe qui aura la vérité sur l'autre ?
Cet enjeu n'a jamais changé. Et a évolué parfois jusqu'au grotesque.
Nous voulons dire ici un mot des trotskystes qui à moment donné, après l'assassinat de Trotsky surtout, vont représenter l'espoir d'un renouveau de la pensée communiste. Outre les écrits de ce dernier on consultera, le livre "le parti bolchevique", qui représente le mieux ce courant dans les années 60-70 en France par ex. Ce livre tente de justifier la disparition des soviets après octobre 17 en raison des difficultés politiques et économiques, de même pour le parti unique....Il couvre d'insultes les anarchistes. Mais il ouvre, pour l'époque, une perspective de possibles corrections du monde communiste.
Cet espoir sera immense. Feu de paille. Hélas, les trotskystes sont des bolcheviks. La critique de Staline leur sera facile. Ce sera leur fond de commerce. Ils bâtiront leur audience sur ce thème, et appliqueront à la lettre la ligne de Lénine. Organiser la division face au pouvoir de la bourgeoisie pour garder leurs petits pouvoirs; et être incapables de gérer une bataille unitaire, quand la chance est de leur côté. C'est par exemple le 10 mai 1968, dont nous parlons par ailleurs (dans la rubrique "Extrême gauche"). Tout cela parce qu'ils ont peur que les masses emportent leur "ligne" aux oubliettes pour faire autre chose que le but de cette "ligne": théoriquement la révolution à la sauce bolchévique. Ce dont ils ne veulent finalement pas, car ce sont in fine des conservateurs..
Sept 2018
Le 2 mai 1989, le premier minsitre de la Hongrie : Miklos Németh, réformateur, fait démanteler le grillage barbelé et le système d'alarme électrique qui fermaient la frontière avec l'Autriche depuis 1966. Tout au long de l'été les allemands de l'est quittent leur pays par cet endroit.
Cela va précipiter la chute du mur de Berlin.
Le gouvernment hongrois donne ainsi un signal fort à Gorbatchev secrétaire général du PCUS en mars 85..
En août 89 des allemands de l'est se réfugient à l'ambassade de RFA en Tchékoslovaquie. Pas besoin de visa.
En RDA on se préparait à célébrer le 40ème anniversaire du pays en ignorant ce qui se passait. Le 30-9-89, la RFA annonce que les réfugiés de RDA ont le droit de venir en RFA. La RDA décide de fermer sa frontière vers la Tchékoslovaquie. La situation devient explosive, l'état d'urgence est pronocé, La ville de Dresde s'enflamme. Voitures de police en feu. Grandes manifs, par ex à Leipzig.
Honneker, Hanx Modrow, Egon Krenz de la RDA tentent des consultations et la discussion, c'est trop tard. La RFA accepte tout citoyen venu de la RDA.
ON va vers les premières élections libres en RDA en mars 90. C'est la fin du communisme...
En URSS: Gorbatchev tente des réformes démocratiques mais garde le rôle dirigeant du PCUS (libération de prisonniers, pluralisme politique, liberté d'expression, nouvelle Assemblée législative qui élit Gorbatchev Président en mars 90..). Il met fin à la guerre avec l'Afghanistan en mai 88.
Mais les élections de 91 portent à la tête de l'URSS Elsine qui dissout le parti, et dont l'objectif est le capitalisme et la société de consommation qui fait rêver les soviétiques. Coup d'Etat.
Le culte de la consommation va changer le pays.
La bureaucratie se transforme immédiatement en bourgeoisie. Et rachète les usines. La liberté ne profite qu'à elle parce qu'elle a de l'argent (prédation du système depuis des années)
De 90 à 98 : crise sociale aigüe, cartes de rationnement. Crise morale et politique: l'URSS perd son statut de grande puissance.
Le PCUS disait :" Nous mènerons d'une main de fer l'humanité vers le bonheur" rapporté par Aliekévitch dans "la fin de l'homme rouge".
Pouvait-on réformer l'URSS ? Grande question.
2019
Le grand bond de 59 à 63 fait 30 millions de morts par la famine d'après les historiens chinois.
Révolution culturelle de 66 à 76
Défaite des USA à Dien Bien Phu en 1954
Authentique révolution confisquée par l'URSS qui met au pas Fidel Castro.
confisquée par l'armée et un régime policier jusqu'en 91: ten tative d'extermination de la paysannerie, famine.
Déportation de la population dans les campagnes; famine et régime de terreur. Pol Pot jusqu'en 79
Après une guerre civile. 900 000 morts
Il s'agit de trouver un bon trader qui peut en moins de temps qu'il ne faut
pour le dire, en une nano seconde, grâce à un algorithme, prendre
des positions qui font s'effondrer les marchés: soit à Chicago,
soit à NY.
En effet la justice US venait le 21 mai 2015 d'accréditer l'idée
que Mr Sarao, de chez lui (en GB), avait provoqué tout seul le chute
de la bourse US le 6 mai 2010, le Dow Jones ayant perdu en 20 mn 5%... cela
ayant suffi pour que Mr Sarao s'en mette plein les poches, avant d'avoir rétabli
la situation...
La théorie révolutionnaire ne devrait plus chercher à
"construire le parti" ( le parti hypothétique...), mais à
recruter des traders pour faire chuter les bourses sans redresser la situation
pour le compte d'une poignée de dits révolutionnaires qui savent
tout......
Chute des bourses, chute des entreprises, chômage massif sur toute la
planète au même moment (application du chaos engendré par
le libre échange généralisé, selon Marx). C'est
l'effondrement. Les révolutionnaires "qui savent" se saisiraient
de la situation, prendraient le pouvoir... ça éviterait que les
masses aient le temps de se poser des questions, et le tour serait joué.
Il suffirait ensuite d'apprendre aux masses à construire "l'homme
nouveau", l'humain homogène qui ne permettrait aucune hétérogénéité...
dans une bonne société despotique à outrance....Génial
non ? Mais justement, il se trouve qu'une grande partie de la jeunesse ne veut
plus ni idéologie, ni partis.... par instinct de survie !
2018
A l'heure où une forme de barbarie saisit le monde (guerres, armes de
destruction massive, marchandisation à outrance de tout ce qui est humain...),
une partie de l'extrême gauche trouve intéressant de nous proposer
de ré-ouvrir la perspective du communisme.
Une chose est de revenir aux écrits de Marx en examinant ce qui, parmi
eux, peut nous aider à comprendre la réalité capitaliste
et son fonctionnement, une autre est de nous re-proposer le communisme sans
même analyser les raisons de l'affreuse réalité que sa réalisation
concrète nous a offert en URSS, dans une multitude de pays et au Cambodge
par ex !! et qu'elle nous offre encore, en Chine, en Corée du nord
par exemple et ailleurs. Il nous est impossible d'accepter cette proposition
sous le prétexte que le " vrai " communisme est à venir.
Analysons d'abord le " faux ", si tant est qu'il l'était, et
pourquoi c'est le " faux "
.qui s'est généralisé
!
Nous observons que beaucoup considèrent le problème déjà traité; l'affaire serait donc close. Pas du tout. Si les monstruosités quant à la réalité de l'URSS ont été établies... très partiellement, la discussion théorique n'a pas eu lieu.
Curieusement la Chine ne fait pas partie des interrogations les plus fondamentales sur le communisme. La Chine ne serait-elle pas communiste ? En quoi ne le serait-elle pas ? Parce qu'il s'agit d'une dictature d'un parti unique de notables privilégiés qui sont prêts à s'entretuer ? Parce qu'il s'agit d'un capitalisme d'Etat féroce ? Parce que le proléariat n'a aucun pouvoir ? Parce qu'il n'y a pas l'ombre d'une justice pour le petit peuple ? .... Quelle analyse les marxistes font-ils ?? Quand donc la nature de l'Etat chinois se serait modifiée ?
2012
REVOLUTION SOCIALE OU INSURRECTION ARMEE ?
(ce que nous écrivions ci-dessous en 2012 est repris par nous intégralement
en 2018. Nous ne changeons pas un iota..)
Nous avons déjà dit quelques mots sur la différence entre
ces deux phrases dans les pages qui suivent. Nous reportons le lecteur à
la définition d'une révolution sociale ci-après.
Notre objet ici est de montrer que les bolchéviks ont transformé
la notion de révolution sociale en une insurrection armée, en
raison de leur décision de prendre le pouvoir par les armes en octobre
1917 dans une Russie irriguée de soviets issus de la révolution
sociale de février, dont ils ne voulaient pas. Celle-là a été
appelée la " révolution d'octobre ".
Leur grand souci a été d'éliminer les soviets au plus vite en les transformant en rouages administratifs soumis au Parti. Il leur a fallu quelques années pour ce faire, mais ils y sont arrivés
Cette distinction, entre révolution sociale et une insurrection armée,
a été faite depuis de nombreuses années par un certain
nombre d'historiens. Mais ce qui n'a pas été analysé, c'est
la conception de la révolution qui s'en est suivie. A partir d'octobre
1917, les bolchéviks, comme les marxistes en général, ont
toujours pensé la révolution en termes d'insurrection armée,
fondée plus ou moins sur un mouvement populaire, avec à sa tête
le fameux parti dit révolutionnaire, minoritaire mais porteur de la vérité
scientifique, donc " l'avant-garde ", pour établir un régime
de type soviétique. Mais les termes employés pour désigner
cette insurrection sont demeurés les mêmes : la révolution
sociale. Ainsi les marxistes ont toujours joué sur les deux tableaux
en nous abusant sur les mots.
Cette supercherie politique et idéologique a eu des conséquences
importantes.
En effet il se peut qu'une République authentique des soviets ne se soit jamais prononcé pour un socialisme de parti unique ! Le parti unique par définition devait en finir avec les soviets, puisque les soviets éaient l'expression de l'ensemble du peuple russe, dans toutes ses composantes; et que les votes se faisaient à la majorité, sans contrôle d'un parti.
Les soviets auraient pu coexister pendant longtemps avec plusieurs partis, un parlement, un gouvernement qui aurait été mandaté par les soviets et le parlement.... Situation difficile peut-être selon notre conception de la centralisation, mais éminemment intéressante pour l'expression des besoins réels de la population. Double pouvoir peut-être, mais pourquoi pas ?
Quand Lénine expliquait, après octobre 1917, que l'URSS périrait
si l'Allemagne ne faisait pas sa révolution sociale de type bolchévique,
il entendait en fait que le parti communiste allemand, ou l'internationale communiste
(IC) aux ordres du PCUS, devait organiser l'insurrection armée avec des
ouvriers et des soldats déterminés en Allemagne, aidés
de l'appareil de l'IC, en vue de changer le régime social de l'Allemagne.....
dans la perspective de protéger l'URSS. Il n'entendait nullement un soulèvement
populaire qui généraliserait l'équivalent des soviets en
Allemagne, et un pouvoir de type authentiquement soviétique qui........aurait
pu isoler les bolchéviks.
Derrière le discours, il faut voir les intentions et la réalité.
Cet objectif se doublait d'un autre. Depuis longtemps, déjà pendant
la guerre (voir " Staline " de Souvarine) Lénine pensait
que le nationalisme allemand constituait le meilleur barrage contre l'impérialisme
anglais et français. Si ce nationalisme était contenu, dirigé,
modelé, par un parti communiste allemand prosoviétique visant
à construire une Allemagne industrielle forte, le bénéfice
serait total pour l'URSS : une Allemagne industrielle qui serait la locomotive
du communisme soviétique, et qui ferait face aux dangers de l'ouest de
l'Europe. Radek s'emploiera, au nom de l'IC, à convaincre les nationalistes
allemands dans cette optique, en participant à leurs meetings. Sauf que
ces nationalistes n'étaient pas précisément de gauche !!
Cette vision n'était pas celle de Rosa Luxembourg, qui, dès 1918,
sans comprendre les visées de Lénine, sentait que le Parti que
Lénine voulait construire en Allemagne était contraire à
la démocratie ouvrière. La " révolution ", tiraillée
et manipulée par des objectifs contradictoires, échoue fin 1918
et Rosa Luxembourg est assassinée le 15-1-1919 avec Karl Liebknecht.
Assassinés par l'extrême droite officiellement. Mais qui y avait-il
derrière ? Qui oserait encore aujourd'hui poser cette question à
part nous ??
Le PCUS et l'IC, dominée par ce dernier, poursuivront l'objectif de Lénine,
et construiront un appareil public de l'IC à l'usage des PC occidentaux,
et un appareil secret à usage strictement allemand, visant cette fameuse
insurrection armée avec le consentement et l'appui des nationalistes
allemands qui voulaient leur revanche. La protection de l'URSS est à
ce prix (voir Margarete buber-Neumann. La révolution mondiale ou l'histoire
du Komintern de 1919 à 1943). On est loin de l'idée de l'extension
de la révolution sociale en Europe et ailleurs. On peut même considérer
que l'IC n'a pas cet objectif. Le meilleur défenseur de cette ligne après
Lénine sera Staline.
La compréhension totale de cette stratégie tragique et la découverte
du mensonge des mots (voir le " dévoiement du sens des mots "
dans la rubrique " le Monde d'Orwell ") conduit à penser que
le seul objectif des apparatchiks bolchéviques était le pouvoir
sans partage en URSS d'une petite oligarchie qui a cru très certainement
que l'URSS pourrait devenir une grande nation industrielle supérieure
aux nations capitalistes existantes, à l'aide de la " science marxiste
" revisitée par un " Frankenstein " bolchévique.
Il s'agit évidemment d'une tromperie majeure qui a empoisonné
le monde ouvrier du 20ème siècle et l'avenir des sociétés
occidentales et du Tiers monde. Une tromperie qui a tué L'IDEE, ce à
quoi le gouvernement de Thiers n'était pas parvenu en écrasant
la Commune de Paris en 1871.
Tout cela pour aboutir à quoi ? Protéger, in fine, le monde industriel
capitaliste.
Mai 2012 AMC
UNE EXPLOSION SOCIALE PREVISIBLE EN CHINE ?
(Le Monde du 20-11-13, ainsi que le film "A Touch of Sin)
Les réformes économiques se font toujours plus en faveur d'une classe et d'une caste de privilégiés, étroitement imbriquées. Une répression politique toujours plus grande y est associée tant la peur est grande dans les plus hautes sphères.
La corruption est si importante que les plus hautes instances du pouvoir ressemblent à s'y méprendre à la classe aristocratique d'avant la révolution de 1949, qui abusait du peuple, des paysans, des femmes, comme bon lui semblait (cf le film "A Touch of Sin").
Les pires défauts de la société hautement industrialisée se cumulent, sans aucun contre-pouvoir: exploitation à outrance, productivité du travail destructrice, répression violente, pollution dévastatrice, refus de tout contrôle et de toute critique, prostitution organisée des femmes au profit du parti, fortune insolente des dirigeants face à la misère des petites gens même si une classe moyenne a émergé pour maintenir la paix sociale....Tous les éléments sociaux sont réunis pour qu'il soit envisageable d'imaginer une explosion sociale proche....
NOS QUESTIONS
Nous proposons ici de tenter de faire la clarté sur un certain nombre de faits, et de concepts, qui ont été totalement obscurcis, en premier lieu par les bolchéviks. Cela a largement contribué à obstruer l'analyse, et donc la conscience politique..
De très importantes questions, dont les marxistes ne débattent toujours pas, ou peu, se traitent par le non-dit. Ces questions sont souvent les mêmes que celles qui sont posées aux défenseurs du capitalisme. Exemples:
-La disparition des soviets en URSS dans l'année qui a suivi la prise du pouvoir par les bolchéviks; leur inexistence en Chine. Pourquoi ?
-Les grandes famines comme mode de contrôle politique (en 1919 et 1920, puis en 1935-36 en URSS; de 1958 à 1962 en Chine)
-La dite "progressivité de l'histoire", postulat fou de Marx, et sa conséquence, à savoir l'Occident comme civilisation la plus avancée de l'histoire, qui doit être suivie du Communisme. Les libéraux ont la même idée de la progressivité de l'histoire.
-L'arrogante idée de la domination totale et sans risque de la nature et du droit à l'irrespect le plus total vis à vis d'elle.
-L'industrialisation de l'agriculture comme terrible conséquence !
-Le mépris vis à vis des classes sociales fondatrices des sociétés traditionnelles: les paysans et les artisans.
-La grande industrie comme produit soi-disant le plus élevé de la science et des techniques, ou comme produit aussi le plus barbare ??
-Le rôle du prolétariat dans l'histoire, par voie de conséquence.
-La question du travail exploité et aliéné: les salariés doivent-ils accepter, sur le plan théorique, même pour quelques heures par jour, le travail à la chaîne débilitant , et la continuation de la séparation du travail intellectuel et du travail manuel ?
-Le mépris vis à vis de la démocratie à la base: le bolchévisme n'est pas caractérisé comme ayant liquidé les soviets démocratiques de février 1917, pourtant il a accompli ce rôle. Ce fait est considéré comme secondaire.
-La présentation du stalinisme comme étant distinct du bolchévisme. Selon nous c'est le bolchévisme qui a été fondateur du stalinisme.
- Le léninisme formulé par Lénine comme principe de soumission de l'individu au parti, le parti d'avant garde se substituant aux masses, est à la base du parti unique et de la dictature.. Ce point de vue est abandonné par certains mais pas du tout par de nombreux marxistes qui sont prêts à de nouvelles dictatures.
-L'absurdité de l'idée de l'unité entre théorie et pratique dans le marxisme, tel qu'énoncé par Marx
-l'idée tout aussi absurde que rien ne peut être modifié sous le capitalisme (alors que des choses considérables ont été modifiées) et qu'il faille attendre la "révolution" pour transformer le monde. Ce qui est une façon de ne rien vouloir changer du tout.
etc
Totalement imprévisible, aucune révolution sociale n'a jamais
été organisée à l'avance ni prévue. Parce
que grâce à l'irrationalité des humains, cela est impossible.
Il n'y a aucune confusion à faire entre une révolution sociale
et une " insurrection armée" organisée par un parti
et un petit groupe minoritaire. Les révolutions sociales sont de grands
mouvements sociaux, qui mettent en branle les foules, elles se produisent inopinément,
sans un parti " d'avant- garde " et sans théoricien, qui en
organiserait le déclenchement et le déroulement. Mais elles sont
hélas toutes confisquées par des brigands aventuriers dits révolutionnaires
qui ont assez de charisme pour se mettre à leur tête, et les dénaturer.
Leur première tâche est de supprimer toute forme de démocratie
à la base, comme les soviets par ex.
On peut relever à travers le temps quelle furent les exigences fondamentales
des révolutions, sans pour autant que toutes les révolutions mettent
en avant ce qui suit (la révolution de 1789, la Commune de Paris, la
révolution mexicaine de 1910, la révolution russe de 1905, la
révolution russe de février 1917....)
-La démocratie, la parole et l'écrit libres, la République,
l'égalité des citoyens, assez rarement l'égalité
des hommes et des femmes, les libertés individuelles, la fin de l'absolutisme
ou de la dictature, la fin de l'occupation par des forces étrangères,
l'ouverture des prisons, l'ouverture des archives de la police politique, la
destitution de la police politique, une constitution, la séparation des
pouvoirs, une justice au service du peuple, l'élection d'une constituante
démocratique, la mise en jugement des prédateurs,
-Le droit à la terre, la restitution des terres confisquées par les grands propriétaires fonciers ou des féodaux, la restitution des territoires confisqués, la terre à celui qui la travaille, la liberté pour la production individuelle, suppression des impôts féodaux. Les paysans passent à l'action généralement et se saisissent des terres
-l"occupation des usines si on est à l'époque des usines
-la fin de l'accaparement des biens de première nécessité, le contrôle des prix,
-pour une révolution future, on peut imaginer : l'abrogation du libre échange, le contrôle des capitaux et des banques, la fin des bourses, l'abrogation de tous les brevets sur les semences, sur les médicaments, sur les découvertes concernant les besoins prioritaires, la mise hors la loi de tous les lobbys accapareurs , la nationalisation des laboratoires pharmaceutiques, le contrôle public sur la recherche médiale, la dissolution des grands monopoles, la gestion collective (collective et non pas étatique) des services publics, le contrôle collectif des impôts (mise sous tutelle du service des impôts), une justice totalement indépendante des pouvoirs politiques, sans robe et sans apparat, L'EGALITE ABSOLUE EN DROITS ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES, l'ouverture de tous les dossiers " secrets " de la police et de l'Etat, l'ouverture des archives .. etc
(La question essentielle qui se posera sera le choix entre la gestion collective, et la gestion publique)
Les révolutions sociales mettent donc généralement
en mouvement plusieurs classes sociales, ayant un intérêt commun
pour un temps, qui transcende des intérêts opposés. Les
classes sociales qui partent à l'assaut d'un système sont toujours
les classes populaires, et elles prennent évidemment les premiers coups
ou tous les coups. Aucune loi historique ne dit comment ces révolutions
doivent se dérouler. Elles sont donc contradictoires et présentent
des aspects doubles ou triples. La révolution n'a pas de caractère
de classe unique, même si elle met en jeu en premier lieu les intérêts
du peuple. Elle met en lumière des conflits de classes vifs. C'est pourquoi
les termes de " révolution prolétarienne " n'a pas de
sens, ou alors il s'agit d'une " révolution " dans la révolution,
par construction intellectuelle. Mais les " révolutionnaires "
rêvent de les contrôler et font croire à leur contrôle
possible. Ce contrôle a lieu le plus souvent après coup.
Ce n'est que rarement le prolétariat tout seul qui se soulève,
sauf dans les pays communistes : les ouvriers des usines ont donné le
signal de la révolte sociale contre le pouvoir des communistes, à
Berlin est en 53, en Hongrie en 56, en Tchékoslovaquie en 68, en Pologne
à Gdansk en 81..
Les révolutions sociales provoquent donc souvent des guerres civiles ouvertes.
Les grandes confusions qu'elles présentent, résident apparemment
dans le fait que ceux qui les déclenchent et sont le plus agissants de
façon spontanée, dans un coup de colère sociale, ne sont
pas ceux qui,à terme, exploitent le peuple et en bénéficient.
En France en 1789, les paysans ont occupé les terres, contesté
la propriété des féodaux, les impôts. Pour tenter
d'endiguer la colère populaire, les féodaux ont renoncé
d'eux-mêmes à leurs privilèges (la nuit du 4 août).
En ville, le petit peuple a mis en question le chômage, la pénurie
des biens alimentaires, les prix, la séquestration du blé par
les spéculateurs, l'arbitraire féodal; il s'est souvent saisi
des denrées alimentaires, et a ouvert les prisons. Mais c'est la bourgeoisie
au total qui en a récupéré les fruits, même si une
partie de la paysannerie a pu bénéficier des terres.
La révolution de 1789 fut autant paysanne et anticapitaliste (les communes
paysannes), ouvrière et anticapitaliste, que bourgeoise créatrice
du capitalisme avec la loi Le Chapelier. Le conflit de classes qui s'y déroula
évolua violemment en faveur de la bourgeoisie qui voulait s'approprier
le parlement pour y faire voter le budget et contrôler les impôts.
La proclamation de la Commune de Paris en 1871 est une réminiscence des
créations des Communes dans plusieurs régions de France en 1789
: affirmation du pouvoir communal qui entérinait l'appropriation des
terres par les paysans et l'abolition des impôts royaux et féodaux.
La Commune de Paris a réuni toutes les couches sociales de Paris, sauf
la grande bourgeoisie, et n'a jamais touché à la banque de France,
mais lui a demandé de l'argent. Ce ne fut nullement une révolution
prolétarienne, mais une révolution profondément populaire.
En Russie, les paysans se sont appropriés les terres, ont mis le feu aux châteaux, les ouvriers ont occupé les usines des villes, les ont proclamées comme étant les leurs; le peuple s'est alors organisé pour son autodéfense, son ravitaillement dans les soviets. Les partis existants ont accompagné l'activité des masses mais n'ont pas joué un rôle déclencheur. Les propriétaires terriens et le tsarisme (ce dernier portant à bout de bras les débuts du capitalisme) ont été défaits. Une bourgeoisie peu importante tenta de se rassembler autour de Kerenski pour garder ses biens, continuer la guerre contre l'Allemagne au profit de la triple alliance. Les ouvriers, artisans, habitants des villes ont spontanément en Russie crée des soviets. Le premier à Pétrograd en 1905.
Puis dans toute la Russie en février 1917. Les soviets n'ont pas eu
le temps de se saisir correctement de la question de la guerre en 1917 en Russie
tant elle était compliquée. On ne connait même pas l'état
de la discussion en leur sein. La désertion massive des soldats du front
indiquait bien que la guerre n'était que celle des grands de ce monde.
Mais l'Allemagne voulait une paix séparée, pour s'approprier une
partie de la Russie et attendait d'envahir l'Ukraine. Il était donc impossible
de conclure une paix séparée (ce que les bolchéviks feront
cependant dans la paix de Brest Litovsk qui livra l'Ukraine aux allemands et
déclencha le début de la guerre civile). Il eût fallu que
l'Allemagne se couvrît elle-même de soviets.
. Kerenski travaillait
bien pour la bourgeoisie, mais pouvait-il résoudre cette question ??
La révolution cubaine pourrait sembler faire exception, puisqu'un petit groupe de guérilleros organisés à l'extérieur donne à penser qu'il aurait joué un rôle déclencheur dans la révolution en 1959 . En réalité, il y avait à Cuba une situation révolutionnaire que les masses ont mis à profit lors de l'arrivée de Fidel Castro et Che Guevarra. Cela est si vrai que Guevarra, faisant une erreur d'analyse, ne parviendra pas à soulever les masses au Congo, puis en Bolivie, en appliquant la même méthode que pour Cuba. Il en mourra.
Tout ceci veut bien dire que la révolution sociale d'une part ne commence
pas comme les révolutionnaires l'imaginent, et d'autre part qu'elle n'a
jamais eu un caractère de classe unique et homogène. On retrouve
ceci récemment dans les révolutions sociales qui se sont produites
au Maghreb depuis 2011, contre des dictatures insupportables , un pouvoir corrompu
et sanguinaire. Elles ont bien été des révolutions sociales
à n'en pas douter, mais des révolutions du peuple tout entier,
souvent toutes classes sociales comprises, dont une partie de la bourgeoisie
qui a financé la guerre civile. Ce sont les petites gens qui l'ont déclenchée,
ainsi que les ouvriers de quelques secteurs en pointe, les jeunes chômeurs,
les femmes. Ces révolutions sont actuellement confisquées par
une bourgeoisie, dite islamiste, qui est restée à l'écart
pendant les émeutes, et est en réalité liée au capitalisme
international. Elle est déjà très à l'aise avec
le gouvernement US, peut-être en vue d'une autre forme de dictature, ou
d'un parlementarisme bourgeois de type occidental. La forme religieuse a l'aval
du peuple comme garantie d'une pseudo honnêteté. La bourgeoisie
devra compter sur le peuple pour la soutenir ou non
Ceux qui distinguent les révolutions sociales bourgeoises (parce qu'ayant
ouvert la voie au pouvoir de la bourgeoisie) et les révolutions dites
" prolétariennes ", réécrivent l'histoire.
Asssad avec l'aide de Poutine a écrasé la révolution en Syrie. Après 6ans, le pays est dévasté. La révolution est vaincue. C'est la chose la plus terrible qui se soit passée ces dernirèes années dans le monde
La fiction selon laquelle les révolutions auraient donc été
dans l'histoire d'abord bourgeoises, puis prolétariennes, n'a jamais
existé, sauf dans l'esprit des bolchéviks qui ont appliqué
aux révolutions sociales le schéma idéologique de Marx
sur la succession obligée des modes de production dans l'histoire, où
le communisme devait apparaître en fin de parcours comme étant
inéluctable et très proche. Cette fiction s'appuie aussi sur l'idée
de Marx selon laquelle la paysannerie ne peut être révolutionnaire.
Par conséquent, elle disparait de son schéma, comme classe agissante.
La bourgeoisie par contre aurait été, selon Marx, une classe agissante
et révolutionnaire. Moins agissante que la paysannerie pourtant ! Puis,
toujours selon Marx, le prolétariat devait inéluctablement éjecter
la bourgeoisie pour accomplir enfin toutes les tâches démocratiques
dont l'humanité a besoin. Le " Manifeste communiste " fait
l'apologie du caractère révolutionnaire de la bourgeoisie pendant
une certaine période ; et les " thèses d'avril ", ou
" lettres de loin ", de Lénine, en 1917 déclarent que
seul le prolétariat peut maintenant accomplir ces tâches, d'où
le terme de " révolution prolétarienne " pour justifier
en fait la prise du pouvoir par les bolchéviks. En réalité
Lénine confond sciemment le déclenchement de la révolution
avec sa confiscation, non par le prolétariat mais par un parti, dans
le cas de la Russie.
L'INVENTION DE LA "REVOLUTION D' OCTOBRE" 1917
Ce ne fut pas une révolution, ce fut une insurrection armée d'un petit groupe, se prétendant l'avant garde, pour prendre le pouvoir, sur la base d'une révolution sociale existante, celle de février.
Nous y revenons ci-dessous, mais nous le disons de suite. La "révolution d'octobre" fut une confiscation de la révolution de février, mais entraîna des milliers de communistes derrière elle, qui crurent à cette légende. Ils travaillèrent pour cette dite révolution, mais tout ce qu'ils firent fut confisqué (voir les écrit de Emma Goldman qui vécut cette terrible confiscation).
A partir de là, Lénine va réinventer sur le plan théorique, la révolution sociale, uniquement comme insurrection armée, ne reposant sur rien, et surtout pas sur des soviets, ou alors à partir d'une assemblée nommée arbitrairement "soviet", sans quelle soit le fait du peuple. Par exemple en Allemagne en 1919, en 1923, puis en Hongrie en novembre1918.
(En Hongrie, dans une situation très confuse et dans un pays de propriétaires fonciers et de paysans, après la guerre de 14-18, le Comte Michel Karolyi se détache de la royauté, provoque une révolution démocratique et proclame le République.
Mais en novembre 1918 s'était constitué un Conseil national central des ouvriers de Budapest. Une sorte de double pouvoir existait donc. Se crée un parti communiste qui fusionne avec le parti socialiste.
Bela Kun se saisit du pouvoir et proclame la République des soviets en mars 1919, et institue la terreur rouge, il restera 3 mois . Et se fera démettre par une population en colère. La réaction ne tardera pas. C'est le réactionnaire Horthy qui prend la place.)
La question de la confiscation est déjà ébauchée
dans ce qui précède. Dans le déroulement même de
la révolution sociale, il y a bataille de classes pour le nouveau pouvoir.
La question du pouvoir a toujours été réglée jusqu'ici
en faveur d'une classe qui se pose comme dominante au détriment d'une
autre, ou d'une fraction d'entre elle, ou de l'armée si celle-ci n'a
pas été défaite, ou d'un parti organisé qui se pare
du qualificatif de " révolutionnaire ", ou d'un parti religieux.
Dans la Russie d'octobre 1917, c'est le parti de Lénine, le parti bolchévik
qui s'empare du pouvoir en octobre en se parant de la qualité d'être
le représentant du prolétariat, ce que Bakounine avait prédit
au 19ème siècle. Il y a bp à écrire sur cela, car
Lénine a utilisé le mot d'ordre " tout le pouvoir aux soviets
", pour les masses, en expliquant en même temps dans son parti, qu'il
fallait préparer l'insurrection pour réaliser " la dictature
du prolétariat ". En outre les critiques contre les soviets et leur
gestion dite déplorable étaient de mise au sein du parti. Souvarine,
encore largement léniniste, lorsqu'il écrit son " Staline
", donne des détails importants sur la façon dont les bolcheviks
jugent les soviets, et ne supportent pas les contradictions, les difficultés
de la confrontation des points de vue, la lenteur à résoudre des
problèmes, et surtout l'absence de centralisation. Ils décident
" l'insurrection " comme par hasard avant le congrès des soviets
.et
s'approprient immédiatement la direction des soviets !
Au Mexique en 1910, les paysans se laissent confisquer le pouvoir par la bourgeoisie.
L'intervention des USA n'y est pas pour rien. L'assassinat de Zapata a lieu
en 1919 et met fin à un éventuel pouvoir populaire.
En 1936 la révolution espagnole du peuple des villes et de la paysannerie
fut balayée par le PC armé par l'URSS.
La révolution paysanne chinoise de 1949 a été confisquée par le PC.
La révolution cubaine nationale et paysanne de 1959 fut confisquée dès 1960 par le PC, et condamnée à la monoculture de sucre au profit de l'URSS, ce qui entraîna des pénuries endémiques de nourriture. Et combien d'autres furent confisquées par des PC alliés à des partis nationalistes ou des Etats : Corée, Vietnam, Mozambique, Mali, Somalie, Algérie où les révolutions nationales pour l'indépendance se sont combinées avec des révolutions sociales, rapidement mises au pas.
La révolution sociale iranienne de 1979 a, elle, été rapidement
confisquée par le parti religieux de Khomeiny pour devenir une dictature.
Cet exemple est particulièrement intéressant. Les commentaires
sur les évènements d'Iran mettent en lumière les confusions
idéologiques entretenues par certains marxistes. Les trotskystes de l'OCI
ont annoncé à l'époque, avant tout le monde : " La
révolution prolétarienne a commencé en Iran ". Pourquoi
? Parce que le pays s'était couvert de sortes de comités populaires
qui se sont proclamés souverains et qui ressemblaient étrangement
à des soviets, lesquels regroupaient le petit peuple et les jeunes comme
en février 17 en Russie. Or rien ne dit que les soviets, s'ils avaient
perduré en Russie, auraient donné naissance au pouvoir du seul
prolétariat. Khomeiny en Iran a orienté ses fidèles (les
pasdarans) à entrer dans les comités populaires. Ceux-ci les ont
laissés entrer en groupe et non de façon individuelle, ce qui
fut une terrible erreur. Les pasdarans ont rapidement mis au pas tout le monde
et ce fut une terrible répression contre le peuple et la petite bourgeoisie
qui dura plus de trois ans. Ce fut bien une révolution sociale du peuple
et en aucune façon prolétarienne. L'OCI n'a jamais reconnu son
erreur théorique.
Dans le même temps, comme la réflexion sur la démocratie,
et sur la question du peuple, n'a jamais été à l'ordre
du jour nulle part lors de l'expérience de l'URSS, l'usurpation s'est
trouvée validée. Et le " parti unique ", comme parti
du prolétariat ou parti des révolutionnaires ( !), s'est généralisé
dans tous les pays communistes, et bien au-delà, dans tous les pays de
dictature.
Le peuple n'a, en règle générale, jamais pu, sauf de façon
temporaire, se donner de façon viable ses propres organes de pouvoir,.
Il y eut ainsi une première brève tentative, la Commune de Paris,
qui fonctionna comme un grand soviet populaire, mais trois mois seulement. Cette
exception inspira peut-être le soviet de Pétrograd en 1905, et
les soviets de février 1917 jusqu'en octobre. Ce pouvoir, à peine
organisé, fut confisqué.
De nouvelles tentatives eurent lieu : le soviet de Budapest en 1956, des ébauches
en Pologne, puis les Assemblées populaires en Argentine en 2001, ainsi
que tous les comités populaires de village en Palestine, mais rapidement
contrôlés par le Fatah.
Ceci signifie que le peuple cherche la voie du contrôle d'une révolution
sociale où il est toujours très fortement partie prenante, par
la forme des " conseils ", mais n'a pas encore trouvé le moyen
de préserver ceux-ci. L'une des raisons est l'obligation pour le peuple
d'aller travailler dur. Or travailler, diriger un conseil ou le contrôler,
est extrêmement difficile.
La question d'un pouvoir populaire (paysans, ouvriers, petits salariés
des services de l'Etat , artisans, petits commerçants, colporteurs, artistes
de rue
) et de son organisation démocratique et durable, dont dépendent
toutes les révolutions sociales, constitue en effet le problème
le plus difficile à résoudre.
La question du pouvoir populaire a toujours suscité la détestation de la classe dominante, la bourgeoisie entre autres, et une égale détestation des partis communistes ou dits d'avant-garde. Egalement de la part des intellectuels qui opposent souvent le pouvoir du savoir des techniciens et savants (débats mémorables au sein du PSU à ce sujet) à l'ignorance du peuple. Les intellectuels devraient seulement être appelés à faire part de leurs connaissances, dans une égalité absolue avec les autres couches sociales. Ces connaissances, complétées des savoirs ouvriers et paysans, pourraient donner lieu à une richesse créatrice considérable. Il serait alors possible de régler toutes les questions difficiles, si le temps était donné pour ce faire.
Or précisément, ceux qui produisent ce qui est nécessaire
pour la vie de la société, sont ceux qui ont le moins de temps,
sont le moins disponibles, sont le plus harassés. Et si on leur donnait
un statut spécial, ils deviendraient vite des bureaucrates.
Il faut donc que cette question se double de celle de la démocratie à
la base, de celle de l'instruction, du temps disponible pour tous, du turn-over
obligatoire dans l'exercice des responsabilités. Toutes choses qui ont
déjà été discutées largement, mais non résolues.
Historiquement, pour Marx, le peuple, c'est-à-dire les classes anticapitalistes
par essence, définis par lui comme étant les paysans, artisans,
petits commerçants (on se demande bien pourquoi pas les ouvriers ?),
fait " tourner la roue de l'histoire à l'envers " (cf notre
site), en raison du schéma précité ci-dessus. Marx protestera
avec véhémence contre l'idée de donner le pouvoir au peuple
dans le programme de Gotha, écrit par Lassale écrit en 1875, en
expliquant que l'expression ne voulait rien dire. Evidemment, le peuple n'a
pas sa place dans la succession des modes de production telle qu'il la voyait
; il ne serait pas susceptible d'être révolutionnaire " jusqu'au
bout " comme les ouvriers, selon lui. Et surtout, peut-être, il n'était
pas susceptible obligatoirement d'aimer la grande industrie et le machinisme.
Cette appréciation de Marx sur le peuple relève de l'idéologie.
De ce fait, Marx est contre la démocratie à la base avancée
par Bakounine dans l'AIT (l'association internationale des travailleurs ). Cependant
c'est Marx qui a écrit que " ce sont les masses qui feront l'histoire
". Ceci est tout à fait capital par rapport ce que vont en faire
les bolchéviks. Entre autres Lénine.
C'est ici que l'idéologie achève de se substituer totalement à
l'analyse de la réalité. L'idéologie est une théorie
a priori collée sur la réalité, qui sert à tordre
celle-ci pour l'adapter à une philosophie progressive de l'histoire (d'origine
purement occidentale), à des désirs imaginaires, à un pouvoir
déjà constitué, ou à un désir fou de pouvoir,
ou tout cela en même temps.
Marx, comme Lénine plus tard, auraient tous deux été horrifiés
qu'il puisse être dit qu'ils faisaient de l'idéologie. L'un comme
l'autre avaient la certitude que leurs théories s'appuyaient sur l'analyse
scientifique des faits, et que le marxisme était précisément
une théorie scientifique dans son entier. Les marxistes ont dit et répété
qu'il y avait unité de toute la théorie de Marx, ce qui est non
seulement inexact, mais impossible. Il n'y a pas un seul écrivain ou
théoricien, qui ne se laisse pas aller, à côté de
ses travaux scientifiques ou même à l'intérieur de ceux-ci,
à des hypothèses aventureuses, imaginaires, produit de ses fantasmes
et illusions. Les marxistes ont fait des écrits de Marx une théorie
scientifique homogène, exactement comme l'église a déclaré
la bible sainte, produit de la parole de Dieu, donc Vérité.
Revenons à Lénine qui, s'appuyant sur les difficultés de
militer en Russie sous le tsarisme, a construit une théorie du révolutionnaire
professionnel obligatoire en tous lieux et en toutes circonstances, et de fil
en aiguille, a construit l'idée du " parti en avant des masses "
dans son " Que Faire " de 1902, qui ne s'appuie que sur une expérience
particulière et limitée, mais qui est surtout le produit d'un
désir de pouvoir excessif.
C'est là que l'on trouve l'impossible pouvoir à la base, théorisé
par lui, et la nécessité pour le prolétariat de s'appuyer
sur les intellectuels de la bourgeoisie devenus révolutionnaires. Les
masses, écrit-il contrairement à Marx, sont spontanément
trade-unionistes, elles ne sont pas révolutionnaires. Seul le parti d'avant-garde,
" exprimant consciemment le processus inconscient vers la révolution
", fera la révolution jusqu'au bout en appliquant la théorie
scientifique de Marx. Il n'y a que le parti qui puisse empêcher la confiscation
de la révolution par la bourgeoisie, définir les mots d'ordre
pour l'avenir. C'est le parti qui peut et doit décider de l'insurrection
finale et mener celle-ci. Cela ne s'est jamais produit, sauf en octobre
1917 dans un coup d'Etat du parti bolchévik, mais Lénine reconstruit
la réalité et balaye ainsi toute possibilité de pouvoir
à la base, les soviets.
Lénine s'est trouvé à son retour en Russie face à
des milliers de soviets. Il conçoit donc le projet de les bolchéviser
donc de les scléroser, tout en se réclamant d'eux.
Il faut quand même indiquer ici ce que Souvarine relate de la position
des bolchéviks face aux grandes grèves d'octobre de 1905 à
Pétrograd : tandis que les social-démocrates fondent des "
municipalités révolutionnaires " parce que c'est ce que veulent
les grévistes, les bolchéviks à l'intérieur du parti
social-démocrate, y opposent le mot d'ordre de " gouvernement révolutionnaire
" contre celui énoncé ci-dessus, mot d'ordre abstrait qui
oriente déjà la question du pouvoir vers la centralisation.
Puis dans le mouvement, les grévistes fondent le soviet des députés
ouvriers qui comprendra des sans parti
. Les bolchéviks exigent
du soviet une adhésion explicite du soviet au parti social-démocrate,
ce qui évidemment n'a pas lieu, car ce serait la négation du soviet
(p 76-77 dans " Staline " de Boris Souvarine. 1935). Cette attitude
est celle de tous les communistes ou trotskystes depuis lors..
Lénine en 1917 préconisera la centralisation des décisions
qui ne peuvent venir que du parti, sans contestation possible. Il faudrait revenir
longuement sur les débats entre Lénine et Plékhanov, avec
lequel il fut presque toujours d'accord jusqu'à la prise du pouvoir en
octobre 1917, et avec Martov avec lequel il était ami. Sa vision mécaniste
et autoritaire des écrits de Marx a été fortement dénoncée
par eux. Mais le charisme de Lénine l'emporta, et surtout, probablement
le ralliement de Trotsky à ses vues, qui avait été Président
du soviet de Pétrograd ! Les ouvriers furent délogés
des usines au nom du pouvoir central du prolétariat dans le parti !
Toute la tradition marxiste reprendra ce thème qui justifie que tous
les pouvoirs soient donnés au parti dit d'avant-garde, lequel instaure
donc le parti unique et la dictature " du prolétariat " par
le parti.
Cette théorie sur le parti d'avant-garde s'appuie en plus sur une vision
du communisme qui n'est ni la justice, ni la démocratie, ni la satisfaction
des besoins humains, ni l'égalité, mais tout à fait autre
chose de bien plus abstrait. La vision humaniste du communisme fut un habillage
destiné précisément
. au peuple.
Quand on cherche une définition du communisme, il faut revenir à Marx et aux ajouts de Lénine. Il est important de revenir à la définition théorique dont personne ne parle et pour cause. Certains "humanistes" marxistes définissent le communisme comme étant, dans les textes et pour l'avenir, l'appropriation collective des moyens de production par les masses, en vue de définir ensemble une société juste, égalitaire, où les besoins humains seraient satisfaits prioritairement. Nous disons: c'est faux; il n'a jamais été défini ainsi, sauf à reconstruire, avec des petits bouts de phrases piochées un peu partout, ce qui n'a pas vraiment été pensé de façon synthétique, en premier lieu par Marx.
Le communisme selon lui comporte plusieurs volets :
C'est essentiellement un mode de production "supérieur" au
capitalisme, qui reprendra "les aquis positifs du capitalisme" (lettre
de Marx à Vera Zassoulitch), c'est à dire la grande industrie,
l'automatisation, la rationalisation du travail, la productivité; le
tout mesuré par le niveau des forces productives (dont on ne sait ce
que c'est de façon claire), sous la direction du prolétariat en
vue d'une appropriation sociale des moyens de production (par l'Etat);
une domination totale de la nature par la science, et une absence de réflexion
sur la grave question des besoins. Marx a bien expliqué qu'il n'étudiait
pas "l'économie politique des valeurs d'usage" mais le capitalisme,
et il ne revient pas fondamentalement sur cette question en évoquant
le communisme. Ses écrits sont émaillés de propos intéressants
sur les besoins humains, mais il n'a jamais défini le communisme comme
ouvrant la voie à "L'economie politique des valeurs d'usage, définie
et gérée par le peuple, au moyen de la science contrôlée
par le peuple".
a)-Un mode de production supérieur.
Marx rêvait, sur la base des "acquis positifs" du capitalisme (son niveau technique, scientifique, son industrie gigantesque..) construire une société supérieure, le communisme, en transférant les moyens de production de la sphère privée, à la sphère sociale où le prolétariat aurait le pouvoir (relire "le Manifeste communiste" très intéressant à cet égard).
Marx indiquait que le capitalisme était, de son point de vue, la civilisation la plus avancée dans l'histoire, mais devait être dépassé par le communisme, sous peine de sombrer dans la barbarie. Il avait classé les sociétés en sociétés inférieures ou archaïques, et en sociétés supérieures, selon le niveau atteint de leurs forces productives. Son schéma était purement occidental et fondé incontestablement sur un déterminisme historique (les passages obligés). Néanmoins, l'utilisation du concept du "mode de production asiatique", dans ses textes sur l'Inde, lui avait permis d'imaginer des entorses à la description de sa succession historique des modes de production. Il n'en a été fait aucun usage par ses successeurs, sauf très tardivement par un historien anthropologue du PCF dans les années soixante.
Le communisme consistait en effet à dépasser le capitalisme, à promouvoir l'industrie à la vitesse V, à l'aide de la science et des techniques capitalistes mal utilisées, ou barbares. Le mot d'ordre de base était l'accroissement de la productivité du travail à un niveau inégalé ( Cf les écrits de Lénine, puis deTrotsky, dans " la révolution trahie " par ex).
La démocratie et la justice furent le cadet des soucis des bolchéviks, car de leur point de vue, une industrie de très haut niveau allait tout résoudre, c'est à dire l'ensemble des problèmes humains. " Le communisme se fondera sur l'électricité et les soviets" (soviets bolchévisés naturellement) écrivait Lénine.
En conséquence, nécessairement les bolchéviks devaient
confisquer la révolution de février avec ses soviets, qu'ils regardaient
de travers, surtout Lénine, car ces soviets se posaient de mauvaises
questions, conformes à la pensée du petit peuple, et allaient
à pas de tortue. Tandis qu'eux, les bolchéviks savaient quelles
directions prendre. C'est bien pourquoi les paysans et les artisans, anticapitalistes
par essence, ne les intéressaient pas. Le but des bolchéviks n'était
pas d'abord de satisfaire les besoins humains en demandant l'avis des humains,
mais de s'appuyer sur les conquêtes industrielles du capitalisme pour,
grâce à la " science", promouvoir une industrie qui fonctionnerait
toute seule et irait vers la maîtrise totale de la nature (la terre, l'environnement,
les animaux, les hommes).
b) L'appropriation n'a jamais été définie comme devant être collective.
Marx voyait dans les nationalisations le pont vers le communisme. Les bolcheviks ont été obligés de surfer sur le mot "collectif" pour se faire entendre des masses : "Propriété collective" , "collectivisation". En réalité ils n'avaient en tête que l'étatisation, par un Etat dirigé par eux.
Marx a employé une fois, dans le cadre de l'AIT, l'expression "travailleur collectif" en raison de la présence de Bakounine. Il se méfiait en réalité de la propriété réellement collective, qui était très souvent la propriété paysanne. Pour la simple raison que la paysannerie lui semblait devoir être dépassée en tant que classe sociale, par un prolétariat agricole agissant sur de très grendes surfaces avec les techniques les plus modernes.
De fait, les seules propriétés agricoles furent en URSS la propriété directement étatique, le sovkhose, et la propriété gérée par le parti et son bureau politique, le kolkhoze. La propriété des moyens de production industrielle était étatique, aux mains d'une nomenclatura dont les membres s'assassinaient entre eux.
En fin de compte les rapports de production dits collectifs par l'intermédiaire
de l'Etat ouvrier et paysan et du parti, ne furent que des rapports de production
étatiques.
Lénine ne mettra pas longtemps cependant à écrire, dès 1921, qu'en réalité l'URSS était à la tête d'un capitalisme d'Etat dirigé par un gouvernement "ouvrier et paysan", et que le communisme était encore lointain .
c)-Le caractère supérieur du communisme devait se concrétiser dans le très haut niveau des forces productives , dans des rapports de production nouveaux .
Les forces productives relèvent d'une inconnue chez Marx, bien qu'elles
furent un enjeu idéologique considérable par la suite (cf la
rubrique sur les forces productives dans notre site) entre autres pour Trotsky.
Tout d'abord, on cherche vainement une définition des forces productives
dans les uvres de Marx. On peut comprendre, d'après les textes,
qu'il reprend la définition qu'en donne l'allemand List en 1848. Le capital
(les moyens de production capitalistes) y tient la place essentielle, à
côté des ressources naturelles utilisées et les forces productives
humaines, non pas en général mais salariées.
Marx explique lui-même que les sociétés traditionnelles
ont vécu des millénaires sans capital (différent du patrimoine).
C'est à partir de là qu'il parle de l'immobilisme des sociétés
paysannes dans l'histoire, particulièrement dans les sociétés
asiatiques, en raison de l'absence de croissance des forces productives.
Pourtant Marx voit l'histoire comme celle du développement des forces
productives. C' est une vue purement occidentale, qui ne concernait absolument
pas l'Asie par exemple, ni l'Amérique latine, ni l'Afrique ; c'est aussi
une vue purement capitaliste. Cela laissait supposer que le communisme ferait
encore croître les forces productives ! C'est à notre avis réduiret
le communisme à n'être qu'une simple continuation du capitalisme.
Rien ne dit dans ce schéma que cette progression doive s'arrêter.
Marx n'a pratiquement rien écrit sur le fonctionnement du communisme,
sauf qu'à moment donné ce dernier n'aurait plus besoin d'Etat.
Selon ce schéma, encore une fois, la classe paysanne ne pouvait avoir
un rôle révolutionnaire, puisque sa fonction traditionnelle et
historique n'est pas de faire croître le capital, mais de fournir une
production utile aux besoins.
d)-La progression des forces productives ne peut se faire, selon Marx, que sous
l'égide d'une classe dominante révolutionnaire, le prolétariat,
qui prend la place de celle qui ne peut plus la réaliser dans des rapports
de production devenus trop étroits.
En réalité le prolétariat sera représenté
par le parti d'avant-garde (Lénine), c'est-à-dire son bureau politique,
c'est-à-dire son chef. Dans le cadre évidemment d'un parti unique
impossible à contrôler puisqu'il constituait la négation
de la démocratie.
Cette vision globale des choses ne pouvait qu'aiguiser au centuple les appétits
de pouvoir d'une petite caste, qui passerait par-dessus bord la morale la plus
élémentaire. Elle ne pouvait donc que produire, dans la bataille
pour le pouvoir, une société de terreur. Et ceci à l'insu
probable des bolchéviks au départ.
Mais la machine, une fois lancée (parti unique, guépéou,
soviets maîtrisés, étatisation massive
), a broyé
les hommes, produit des monstres, dont le NKVD, produit des famines gigantesques,
jusqu'à l'effondrement. Tout ceci n'étant qu'un produit de l'idéologie,
et pas obligatoirement au départ un produit d'une malhonnêteté
constatée . L'affirmation de Trotsky sur la trahison de la révolution
est probablement une vue de l'esprit, une continuation d'un raisonnement idéologique.
Un parti unique lancé sur une idée folle agit bien au-delà
de la trahison. Il agit pour le pouvoir.
e) L'homme "nouveau".
Les bolcheviks disaient vouloir faire émerger l'homme nouveau de la révolution. Un homme débarrassé de ses aliénations, un homme qui ne serait plus exploité, un homme qui pourrait se livrer à ses facultés créatrices. C'est ce qu'ils annonçaient. C'est sur ces bases que des milliers de citoyens russes, les ouvriers, les intellectuels, les savants, les artistes, les poètes, ont embrassé la cause du communisme; puis finirent par millions dans les prisons, les goulags, ou moururent d'une balle dans la tête.
L'un des premiers à avoir formulé cette idée de l'homme nouveau fut Babeuf au tout début du 19ème siècle. Son idée fondamentale était qu'il fallait forcer le changement, en obligeant l'homme à de nouvelles attitudes, quitte à instaurer pour un certain temps un régime non démocratique.
A quoi pouvait-on obliger le citoyen dans l'esprit des bolchéviks ? A en finir avec la propriété individuelle et son idée même, à en finir avec la tradition, avec la religion, avec la culture paysanne, avec la pérénité des classes paysannes, artisanales et commerçantes...Il lui fallait rompre avec le passé. Il convenait d'obtenir de lui qu'il sache que la voie communiste était celle de la science, de la productivité, que la collectivité devait se fondre dans la "propriété sociale", que le prolétariat était la seule classe d'avant garde, et que la voie de l'avenir passait par l'obéissance au parti bolchévique.
Dans ce cadre, l'instruction était vue comme un apprentissage à ces nouvelles idées, et non comme un apprentissage à la critique. Le doute était exclu. Celui qui doutait était une ennemi potentiel et faisait perdre du temps. Or il fallait aller vite puisque l'objectif était de dépasser le capitalisme en un temps record.
Le poète Essenine qui se suicide en 1925 est vu comme le poète du passé, qui, comme l'indique un autre poète, Maïakovski, préfère mourir plutôt que reconstruire l'avenir. L'ironie voudra que Maïakovski se suicide lui-même en 1930. Ce rappel nous semble significatif.
En réalité que signifie "l'homme nouveau" ? Dans une société de parti unique, où la voix de l'opposition est étouffée très rapidement, où les humains sont soumis à des normes de comportement et d'acceptation, l'homme nouveau doit être discipliné et assujetti à une nouvelle aliénation. Il doit rompre avec ses racines, avec sa culture propre et ses convictions religieuses, avec l'art traditionnel; il doit "s'homogénéiser" sinon il est dangereux.
Ceux qui ont cru, comme le poète juif Peretz Markish, que la nouvelle société serait plurielle, ouverte et tolérante, riche de ses différentes cultures, dans le but d'une créativité nouvelle qui ferait le lien avec le meilleur du passé, périrent. Après bien d'autres comme Mandelstam mort dans un goulag en 1938, Markish fut condamné à mort pour nationalisme alors qu'il était pour la renaissance du yiddish. Il fut assassiné d'une balle dans la tête en 1952.
Cette évocation de la situation des poètes, qui ne purent entre autres tolérer les famines organisées contre la paysannerie, en dit long sur l'homme "nouveau".
Dans une telle société où la délation devint vite une exigence du système, l'homme nouveau émergea de la promotion des minables, des corrompus, des incultes et sans morale, des bourreaux, dont le prototype fut le salarié de la guépéou, de la tchéka, du NKVD, ou les juges.... Celui qui voulait penser librement, devait se taire, ou vivre dans la misère. Il suffit de lire "J'ai choisi la liberté" de Kravchenko sorti en 1947, puis le récit de son procès, "J'ai choisi la justice" en 1949.
f) la suppression du travail humain.
Dans le cadre du communisme théorique, où la machine doit remplacer l'homme, il va de soi que le travail humain devient inutile et que la société doit aller vers les loisirs..... Selon Marx, si le capitalisme ne peut intégralement automatiser la production, c'est parce que la plus-value disparaîtrait, faute de prolétaires. Il faut donc conserver des prolétaires dans le capitalisme. Mais dans ce mouvement, la valeur des marchandises (produits et services) tend normalement vers 0. Etant entendu que la valeur de la monnaie peut à l'inverse faire croître les prix. La suppression de la monnaie restituera un prix à la valeur même du produit, selon Marx.
Description purement théorique. Dans la réalité, le communisme réintégra l'esclavage humain par le travail gratuit dans les goulags. La demande de main d'oeuvre gratuite réglementait le nombre de condamnés au goulag (cf Kravchenko). De même le communsime institua la pire des exploitations, rarement atteinte dans le capitalisme, mais à laquelle aspirent aujourd'hui les néolibéraux dans la "stratégie du choc".
Mais lzes écrits de Marx sur la journée de travail de quelques heures par jour en fit rêver plus d'un. En effet, Marx voyait très clairement se volatiliser le travail pour produire ce qui est nécessaire à la vie. La diminution continue de la durée hebdomadaire du travail, produit type de la lutte des classes ( ne parlons pas des 35h trivialisées ou édulcorées par Martine Aubry en 1998 et 2000, par la flexibilité des horaires), a été prise comme exemple de cette tendance, et a été à notre avis sciemment confondue avec le temps de travail nécessaire pour produire.
Dans cette discussion, le travail salarié propre au capitalisme est volontairement confondu avec le travail humain tout court.
Selon nous, et dans la perspective de retravailler ce point de façon très sérieuse, la suppresssion du travail humain est la chose la plus folle, la plus barbare qui ait jamais été pensé, mais dont nous n'avons pas conscience, car nous confondons également le travail humain dans son éthymologie (la recherche, la création, le travail critique, le développement conjoint du travail intellectuel et du travail manuel dans la recherche du mieux être collectif, l'art, l'utilisation maximum de notre cerveau pour plus d'humanité et de développement de soi-même...) avec le travail esclavagiste, avec le travail salarié capitaliste, avec le travail aliéné de production de marchandises dangereuses et débilitantes....
Sans compter que pour restaurer tout ce qui a été détruit par les sociétés capitaliste et communiste, pour réparer ce qui a été désertifier, pour remettre en état les cerveaux et le psychisme des jeunes générations, il faudra déployer des quantités de travail dont nous n'avons pas idée.
Nous devons constater que ce n'est pas le capitalisme qui s'est effondré, mais le communisme.
Nous constatons également que la question de ce que la science, au service des besoins humains, pourrait produire, n'est jamais abordée ou très rarement par les marxistes, comme si la science ne pouvait se distinguer de la grande industrie et du productivisme.
LE GRAND VIDE POLITIQUE A L' EXTREME GAUCHE SUR CES QUESTIONS.
Quels que soient les efforts faits pour faire un bilan, concernant les questions ci-dessus, les différents groupes politiques existants tendent toujours, soit vers l'illusoire gestion du capitalisme, soit vers l'idée que le salut reste dans le communisme. Entre ces deux tendances, un travail de réflexion pourtant intense se développe mais ne donne pas encore lieu à des mouvements importants susceptibles de mettre en cause la "démocratie parlementaire" telle qu'elle fonctionne et d'impulser des "réformes" dès maintenant.
L'effondrement du communisme en URSS en 1989, et par suite de la partie du marxisme ayant donné lieu à cette perspective, aboutit à un vide durable dans ce qu'on peut appeler l'extrême gauche. Mais bien avant cet effondrement, l'attitude cynique d'alliance des bolchéviks avec les nationalistes allemands dans les années 20, avait donné du crédit à l'idée des socialistes allemands vers un infléchissement possible du capitalisme dans un sens favorable aux salariés. En effet, pour résister à la violence bolchévique, ces derniers ont construit un réformisme qui excluait toute action révolutionnaire.
Cette idée du réformisme a été acquise dès avant même l'expérience des dites "trente glorieuses" d'après la seconde guerre mondiale. Et les communistes eux-mêmes ont accrédité, dans cette dernière période, la possibilité de gérer le capital, au travers des nationalisations et d'un Etat tout puissant dont la nature de classe devait s'estomper .....
L'extrême gauche a voulu se construire contre cete dérive, mais sans mettre en cause la politique bolchévique. Cet empêchement à douter de ceux qui étaient censés avoir fait la révolution, alors qu'ils n'avaient fait que l'étouffer, a abouti à un corpus de dogmes propres à conserver le monde en l'état, sans en toucher les fondements. En effet il a fallu cacher le fait que le pouvoir bolchévik a eu une politique de "défense de l'Etat", de son propre Etat, mais jamais une politique d'extension du pouvoir des soviets ouverts à tous, en vue d'une économie de satisfaction des besoins. Jamais.
L'effondrement lui-même a provoqué:
-le rejet de la perspective de la révolution sociale comme solution à la barbarie capitaliste, et il est vrai que cette perspective, répétée comme un leitmotiv par certains, est largement sans contenu.
-la faiblesse de l'analyse de l'évolution du capitalisme: refus de voir la mondialisation comme étant "la stratégie du choc". Ce qui se passe en Europe actuellement est vu comme "une crise" du capitalisme, et non comme une politique délibérée de la direction européenne, pour briser et émietter le salariat ( la situation en Grèce et en Espagne est cependant parlante)
-le rejet implicite de la perspective des "conseils" (soviets en russe), et de la démocratie à la base. Ignorance des soviets en février 1917, en Ukraine, et dans le monde paysan jusqu'en 1929. Méfiance vis à vis de toute démocratie à la base.
-le rejet ou l'inattention portée aux questions d'une internationale: incapacité à imaginer une internationale des travailleurs et des peuples opprimés, toutes tendances confondues. On en reste à l'idée que l'internationale ne peut être que communiste.
-A l'inverse, le "pouvoir des experts" résulte pour partie de l'expérience bolchévique, puisque le pouvoir des bolchéviks a bien été celui des intellectuels marxistes "qui savaient" contre le pouvoir des masses. L'idée de l'incapacité de celles-ci à gérer leurs propres affaires est fortement encrée dans l'esprit de chacun, d'autant que les masses elles-mêmes ont intériorisé l'idée de leur incapacité: confiance absolue dans les responsables, qu'ils soient mandatés ou non.
Ces conséquences seront durables, bien que des pans entiers de la population et de la jeunesse s'orientent vers des solutions inédites de résistance, de démocratie.... dans des combats régionaux et locaux.
Du point de vue de ce qui précède, les mots " la révolution d'octobre " relèvent d' une falsification ou un travestissement de langage ( propre au langage du novlangue à la façon d'Orwell). La révolution sociale s'est produite en février 17 et a donné les soviets plus une situation de double pouvoir : soviets et pouvoir parlementaire pro-bourgeois de Kérenski. Double pouvoir dont le processus a été stoppé par la prise militaire du Palais d'hiver par les bolchéviks, la bolchévisation des soviets, sauf ceux des paysans, tâche qui sera dévolue à Staline à partir de 1929. Le traité de Brest Litovsk entre dans le cadre de la bolchévisation par la remise de l'Ukraine à l'Allemagne qui constitue un crime et le début de la guerre civile.
La consolidation du pouvoir des soviets en Ukraine, l'appel aux soldats allemands
pour constituer leurs propres soviets (ce qu'ils ont fait dès le début
de 1918), c'est-à-dire la recherche de la désorganisation de l'armée
allemande, à l'aide des spartakistes, aurait sans doute été
le meilleur moyen de stopper la guerre. C'est un côté inexploré
de la recherche historique...
La dite révolution d'octobre signifie, selon nous, une confiscation de
la révolution sociale de février par un coup d'Etat des bolchéviks.
Mais l'ensemble des problèmes relatifs à la révolution
de février 1917 ayant été posés dans le cadre des
dogmes des bolchéviks, et ceux-ci s'étant donné l'auréole
de la réalisation de la révolution, il n'a jamais été
permis d'en discuter sérieusement.
Une question essentielle est celle du traité de Brest Litovsk voté à une très courte majorité. Les éléments relatifs à ce problème pourront être donnés dans une autre rubrique.
L'engouement des masses pour le communisme a été extraordinaire.
Il convient de comprendre pourquoi. Les bolchéviks s'en sont pris aux
religions, opium du peuple, en oubliant que Marx disait également d'elles
qu'elles exprimaient la grande souffrance du peuple.
Le formatage des esprits, sur un imaginaire de la révolution russe,
a surtout bien marché en Occident, loin de la réalité de
la délation, de la terreur, de la famine et du goulag. Il a été
peu contesté par la droite, celle-ci y trouvant son compte.
Les illusions, orchestrées par les PC, ont constitué une force
immense capable pendant des années de gommer les effets par exemple du
procès Kravchenko en 1949 en France. Bien qu'ayant produit une grande
émotion sur le moment, la main- mise du PC sur la conscience ouvrière
et populaire, le fera vite oublier, avec le soutien d'ailleurs d'intellectuels
renommés.
Soumission, abandon de tout esprit critique et de la recherche libre, c'est
la grande aliénation produite par les communistes pendant plus de 70
ans.
A cette aliénation, s'ajoute celle propre au capitalisme qui a su mettre à la portée des gens d'autres moyens extraordinaires de soumission, et de liquidation de la pensée critique : l'achat de la paix sociale par les " grands acquis sociaux ", le crédit, la consommation de masse, la télévision, les grandes surfaces , le téléphone portable et de tous les gadgets qui traînent autour, dans une réalité où pourtant l'exploitation est prégnante, terriblement efficace .où les emplois disparaissent, où des guerres dévastatrices ont lieu. Une idée du bonheur marchand sur terre.
Le discours indiquant qu'il y a eu erreur dans l'application du communisme
et que l'on pourrait restituer enfin le vrai visage du communisme, est un
discours de paresse intellectuelle. C'est un discours de confort pour qu'en
définitive rien ne change.
C'est le même discours que ceux qui disent " Tentons de réformer
le capitalisme puisque le communisme fut une illusion
.".
Dans les deux cas, c'est une façon de différer la discussion libre sur les fondements du communisme, et d'éloigner la question de la résolution des vrais problèmes entre autres de la démocratie à la base, et la définition des besoins humains aujourd'hui.
Mais le pire est de sous-entendre que si le " vrai " communisme n'était
plus possible, alors plus rien ne serait possible. C'est une vraie science du
discours et une autre forme d'idéologie, celle du verrouillage obligé
des perspectives.
De façon urgente, il faut restituer une " association internationale des travailleurs et des peuples " contre les méfaits de la société marchande, pour une société dont le but sera de satisfaire les besoins humains à l'aide d'assemblées ou conseils populaires, dont les membres seront révocables à tous moments, dans la plus grande diversité. Seules ces assemblées ou conseils décideront que produire, comment produire, pour qui produire. Les partis politiques existeront sauf un parti d'avant-garde qu'il faudra pourchasser !
On peut créer des comités pour la renaissance d'une telle association internationale. Il faut en finir avec l'idée d'une internationale qui ne serait que communiste et qui d'ailleurs a été anéantie par les communistes.
Première version le 27-8-12
corrigée 3 -11-2012, le 18-5-2013
-Le 4-8-1914 : création du mouvement spartakiste en Allemagne
Fin 1916 : mouvements de plus en plus importants contre la guerre en Allemagne
- le 2-12-1917 , les bolchéviks au pouvoir s'empressent de signer
l'armistice avec l'Allemagne. Selon Souvarine, dans son livre "Staline
" et Buber-Neumann, il s'agirait vraisemblablement de soulager le front
Est de l'Allemagne, afin que cette dernière porte des efforts accrus
contre la France. Le discours officiel s'appuie sur la haine légitime
de la guerre pour clamer " A bas la guerre ".
Lénine a déjà de forts liens avec les nationalistes allemands
: ébauche d'alliance en vue de défendre le futur Etat russe, et
de protéger l'Allemagne contre l'impérialisme français.
A l'évidence les bolchéviks ignorent largement les spartakistes.
Ou veulent en faire un groupe inféodé.
6-1-1918 : réunion et dissolution de la Constituante en URSS, ce qui
en dit long sur ce que veulent faire les bolchéviks.
-Le 3 mars 1918, la paix de Brest Litovsk est signée à l'arrachée.
Une attitude internationaliste eût voulu que les bolchéviks s'adressent
à la population allemande, dont une grande majorité aurait été
réceptive à la fin de la guerre. Les bolchéviks se débarrassent
de l'Ukraine anarchiste et la livre à la police allemande, au risque
de famine en Russie.
Boukharine voit dans la signature de cette paix la préface à une
coexistence pacifique qui aboutira à la dégénérescence
de la révolution
C'est l'affirmation inverse de Lénine sur
la certitude de la révolution en Europe qui vaincra ses extrêmes
réserves (p 118 le Parti Bolchévique de Broué)
-le 27-8-18, l'accord sur les clauses de la fin de la guerre, entre l'URSS et l'Allemagne, saigne l'URSS, et se présente objectivement comme un gage de bonne volonté ou de non-agression vis-à-vis de l'Allemagne, contre la population russe.. dans le même temps aussi où l'URSS a besoin de son armée pour lutter aux frontières sud contre ses ennemis situation compliquée où le parti bolchévique s'est isolé dans cette lutte, en perdant l'appui des menchéviks et des SR par la dissolution de la Constituante. Les ennemis sont internes et externes. Voie vers la suppression de toutes les libertés.
-Le 1-10-18 : Première conférence nationale des spartakistes
(voir avec plus de précision ce qu'il s'y dit)
Toute cette année 1918, les bolchéviks font comme si rien ne se
passait en Allemagne, alors qu'ils annoncent l'inéluctabilité
de la révolution en Europe
-Le 28-10-1918, le Reich est renversé en Allemagne pour faire
place à la démocratie parlementaire. Insurrection des soldats
et marins contre la guerre, qui s'étend aux bassins industriels. Création
de conseils ouvriers et de soldats sur le mode russe.
Décalage total entre ces derniers évènements et ce qui
se passe en URSS où les soviets sont quasiment sous contrôle bolchévique,
et où le premier souci du parti bolchévique est la défense
de l'URSS.
-Le 9-11-1918, la République est proclamée en Allemagne.
Un gouvernement appelé Conseil des commissaires du peuple composé
de socialistes de droite et de gauche où se trouvent des spartakistes,
approuvé par un conseil ouvrier de Berlin, est récusé par
les spartakistes, qui signent ainsi leur arrêt de mort et l'effilochement
de la révolution par leur faute.
Explication possible : les spartakistes sont persuadés que l'URSS va
les aider, qu'ils peuvent se permettre d'être sans compromis, n'ont pas
compris la différence entre un Conseil ouvrier et un parti, n'ont visiblement
pas conscience que la population allemande, blessée par la défaite
en cours, est très nationaliste y compris une grande partie des ouvriers,
et n'est pas majoritairement communiste, exactement comme en Russie de 1917.
Ils ont l'illusion qu'ils peuvent gagner la majorité dans un conseil
des commissaires, ce qui est faux. En fait ils sont ignorants sur la façon
dont les bolchéviks, minoritaires, ont pris le pouvoir. Leur récusation
de ce gouvernement fait peur ..
-11-11-1918 : armistice et fin de la guerre
-les 16 au 20-12 1918, au congrès des conseils d'ouvriers et de soldats
en Allemagne, la droite socialiste obtient la majorité, et va vers une
assemblée nationale. Les spartakistes se privent de contribuer à
renforcer les conseils parce qu'ils ont en vue le combat pour devenir majoritaires,
et ils produisent finalement la méfiance contre les conseils.
Il y a en plus malentendu entre les bolchéviks et les spartakistes, et
ignorance de ces derniers sur ce qui s'est réellement passé en
URSS.
Les spartakistes se séparent du SPD et fondent le KPD, parti communiste
qui va se marginaliser et verra l'assassinat le 15-1-1919 de Rosa Luxembourg
et Karl Liebknecht par les Freikops (paramilitaires)
-Dans l'Assemblée constituante élue le 19-1-1919, 45% des voix vont au SPD. C'est la République de Weimar. Une République des conseils se constitue à Munich en Bavière mais sera écrasée par l'armée régulière et les Freikops, sortes milices d'extrême droite nationalistes).
Le KPD s'étiole. C'est sur la base de ce qui précède que les bolchéviks vont s'accaparer ce parti et le mener à la défaite de 1919 à 1933.
janvier 2013
(quelques remarques importantes)
L'interprétation du bolchévisme par les tenants de la révolution
mondiale n'auraient-ils pas fait un contresens historique ? Et ne serions-nous
pas en train de faire les frais de ce contresens ?
N'auraient-ils pas inventé, sous l'effet de la force d'un discours,
une théorie dite émancipatrice, dont le contenu se révèlerait
aujourd'hui conservateur, porteur de soutien aux pouvoirs dominants depuis le
début, créateur de pouvoirs despotiques à tous les niveaux
?
A l'inverse, dans la tradition communiste des premières années,
puis dans la tradition trostkyste, il a toujours été dit que le
bolchévisme portait par définition en lui-même l'extension
de la révolution. Le bolchévisme ne se donnait-il pas pour but
immédiat d'aider la révolution allemande à éclore,
et à se développer ? Ne trouve-t-on pas chez Lénine des
quantités d'affirmations en ce sens ? La révolution russe bolchévique
n'ouvrait-elle pas la perspective de la révolution mondiale en passant
par l'Allemagne ?
De là est née la puissance du discours visant à maintenir
les masses sous la férule du despotisme naissant, et à maintenir
les militants organisés, dans un carcan de soumission intellectuelle
en vue de cette perspective mirifique capable de balayer le désespoir
sur terre.
Escroquerie intellectuelle ?
De ce point de vue, à y regarder de près aujourd'hui, il n'y a
pas eu, sauf dans l'esprit échauffé des protagonistes, d'un côté
les partisans de la révolution mondiale (Lénine et Trotsky) et
de l'autre les partisans du socialisme dans un seul pays (Staline). C'est une
pure construction intellectuelle idéologique visant à étoffer
un combat (ou à donner des arguments) entre des chefs qui voulaient le
pouvoir dans la seule union soviétique.
D'une part Lénine n'a cessé de penser, avant même la prise
du pouvoir par les armes, à la façon dont le futur Etat serait
façonné et défendu. Ses liens avec les nationalistes allemands
précèdent la prise du pouvoir (voir ses relations avec Radek racontées
entre autres par Souvarine dans " Staline "). Son alliance avec Ataturk
contre le PC turc est prémonitoire de ce qui va se passer avec l'Allemagne.
Il faut relire avec attention " le congrès des peuples d'Orient
". Seule compte la défense et la consolidation de l'Etat russe.
On fait valoir la guerre civile qui aurait modifié les espoirs de départ.
Mais cette guerre civile serait à ré-examiner à la lumière
de l'extinction presque immédiate des soviets , et à l'empêchement
de les étendre hors des frontières. Il fallait construire des
partis communistes intransigeants et sectaires et non pas des soviets. La paix
de BrestLitovsk de 1918 ne se faisait-elle pas sur le dos des soviets d'Ukraine,
en vue de leur écrasement ?
D'autre part, le bolchevisme est contradictoire, dans sa conception même,
avec l'extension de la révolution ; il s'agit au contraire d'un rétrécissement
de l'action révolutionnaire et non d'une ouverture. Que contient-il ?
*Une lutte à mort pour le Parti unique
*Une centralisation des décisions vers le seul BP du PCUS contre le pouvoir
dans les usines aux travailleurs
*Une limitation des libertés considérable et la destruction des
comités d'usine de février 17
*Le monopole absolu de l'Etat sur les moyens de l'information : papiers et imprimerie.
*L'Imposition d'un seul modèle de production ("industriel prolétarien
", étatique, centralisé) nécessitant une police politique
féroce.
*Le refoulement de la créativité des masses au profit de la décision
autoritaire venue d'en haut
*La bolchévisation des soviets et leur transformation en organes administratifs
Des excuses ont été données à cette orientation
: on a parlé de l'encerclement de l'URSS ! Cet encerclement a été
d'autant plus important que l'initiative des masses a été stoppée
et frappée à mort ;
On a parlé de la pénurie ; mais celle-ci a été d'autant
plus importante que les soviets ont disparu, le communisme de guerre faisant
des ravages, reconnu par Lénine lui-même.
On a parlé ensuite des responsabilités de Zinoviev et Kamenev
dans l'échec de la révolution allemande. Mais le flirt avec les
nationalistes allemands (décrit dans le livre de Margarette Buber-Neumann)
est une décision de Lénine, la conception de la révolution
comme " coups de main " et insurrection d'une minorité armée
est le fait du parti bolchévique, et ont fait échouer les velléités
de la révolution, ont permis d'écraser le prolétariat allemand,
et ont attisé le rejet du communisme par la social-démocratie
allemande.
En outre le choix de la grande industrie contre les choix du salariat ouvrier
et des producteurs russes, a induit une exploitation éhontée,
un coulage sans précédent, un modèle de production qui
n'a jamais été le choix des masses.
Enfin, un point largement oublié des controverses : le bolchévisme
a induit également un fonctionnement de parti totalement contraire au
fonctionnement des soviets. Les membres du parti bolchévique intégrés
dans un soviet ne s'en remettaient aux décisions d'un soviet que si celui-ci
votait ce que le parti avait décidé. Jamais un bolkchévik
ne s'est plié à la règle du vote démocratique d'un
soviet. Il n'obéissait qu'à sa position de parti ; donc aucun
soviet ne pouvait fonctionner dans ce cadre- là. C'est bien pourquoi
le PCUS en a fini avec les soviets.
Le fonctionnement du parti bolchévique contredit donc la dynamique du
combat autonome des masses.
Marx avait dit fort justement que les masses feraient la révolution mais
pas le parti. Cette affirmation a été totalement contredite en
URSS.
13-9-13 revu le 11-10-13 AMC
Pas un pays n'échappe à la réalité de ce que fut le communisme réellement, ou le socialismùe, qu'il s'agisse de l'URSS, de la Chine, de Cuba, de la Corée du nord, du Vietnam, du Cambodge de Pol Pot, du Mozambique, de l'Ethiopien, du Mali, de l'Algérie.....Destruction de tout ce qui ressemble à des soviets, Parti unique, terrorisme d'Etat contre les citoyens, camps de travail et de famine, système judiciaire à la botte d'un Etat despotique, prisons secrètes, délation massive, gaspillage, irrespect des croyances religieuses, irrespect des cultures régionales, mépris des peuples dits archaïques, mépris et haine vis à vis des paysans, industrialisation délirante, intrusion dans la vie personnelle, interdiction de la liberté de la presse et de la création artistique, pollution de tous les cours d'eau et de la mer, destruction de l'artisanat et des cultures vivrières.... Toutes les tares du capitalisme avec en prime le fait d'oser l'affrontement avec toute liberté individuelle et de création....Aucun pays dit communiste n'a résité à ce système
Tous les pays despotiques se réclamant de l'Islam imitent gaiement ce modèle: l'Iran, la Syrie, la Lybie....., modèle qui a prouvé son efficacité pour esclavagiser et casser les peuples.
Nous n'avons rien vu d'autre. Si les textes, si la pensée marxiste, avaient ouvert sur autre chose, alors pourquoi donc n'en avons nous jamais connu les prémisses ? A cela personne ne répond. Nombreux sont ceux qui disent "ce que nous avons vu du "communisme" était une tromperie ! On voudrait bien les croire, mais quelles preuves nous donnent-ils de leurs affirmations ?? Sur quoi s'appuient-ils pour nous dire que le communisme est autre chose ? Au fait ce serait quoi le communisme ?
Kravchenko dans "J'ai choisi la liberté" de 1947, nous a donné un premier témoignage terrifiant du communisme, confirmé par la suite par de multiples écrits.
Le dissident chinois, Ai Wai Wai, en 2011, après 81 jours de détention, nous donne la même image du communisme, inchangée après plus de 60 ans. Il confirme que les dictateurs peuvent faire de vous ce qu'ils veulent, car ils sont corrompus, avides de pouvoir, la théorie n'étant là que vous tenter d'accréditer leur bon droit à disposer de vous...
1-9-11