(version améliorée)
A n'en pas douter, Poutine était persuadé, il y a peu, que l'enracinement
de l'Etat EI était inéluctable et que les occidentaux seraient
incapables d'en venir à bout. Il s'est alors présenté comme
celui qui pouvait régler la question du Moyen Orient par un système
d'alliances politiques et économiques qui lui permettrait d'être
le champion de la paix, d'accéder au pétrole de Mossoul, au gaz
de la Syrie, et au pétrole iranien, en tenant en respect l'EI.
Pour cela et vis à vis de l'Iran, il lui fallait continuer de soutenir
Assad, même dans un petit territoire, et donc de donner des gages, à
la fois à Assad et à l'EI, en bombardant les opposants à
Assad.
Mais l'EI, fort de ses succès, de ses rapports avec des banques du Moyen
Orient, du pétrole de Mossoul, de sa dite mission vis à vis du
peuple sunnite arabe, a tenu à manifester son indépendance totale.
L'EI a déjà refusé l'alliance avec la Turquie malgré
les appels du pied de cette dernière, et refuse toute allégeance
avec la Russie (cf le crash de l'Airbus 321 et les injures vis à vis
de Poutine). L'EI se place ainsi dans une position de force et fragilise la
stratégie de Poutine.
De la même façon que Al Qaïda a été rapidement
incontrôlable par les USA, l'EI est incontrôlable et se réfugie
dans la grande tradition du terrorisme arabe, mais dans sa version la plus terrifiante,
le terrorisme islamiste. En effet ce terrorisme s'est présenté,
depuis la seconde guerre mondiale, et surtout à partir de 1979 (révolution
iranienne), comme la seule carte jouable vis à vis d'Israël puis
de " l'Occident ", en l'absence de toute perspective venue de l'URSS,
ou simplement en l'absence de toute perspective démocratique venue de
" l'Occident ".
Seule carte jouable mais carte de défaite politique pour le monde arabe.
En effet, l'EI joue avec l'isolement de ce dernier et son rejet par les populations
occidentales. Par exemple, loin d'avoir raffermi le soutien aux Palestiniens,
ce terrorisme aboutit à déconsidérer leur cause. Mais ce
faisant, il fait des palestiniens des proies pour l'EI.
Ce terrorisme est en train de changer de nature.
En effet, bien plus inquiétante est l'alliance parfaitement plausible
entre Al Qaïda sunnite et l'EI sunnite, par exemple au Yemen, en Libye,
en Syrie, dans le cadre d'un terrorisme pour le seul compte du pouvoir fascisant
de chefs de guerre intégristes. Au nom de la haine de la démocratie
occidentale, c'est la conquête de territoires entiers contre la liberté
des peuples.
Aujourd'hui, l'EI vise à s'implanter au sein des arabes sunnites révoltés,
de l'Egypte, de la Libye, de la Palestine, de l'Arabie, du Yémen, du
Bangladesh, au nom de la lutte anti américaine et " anti-impérialiste
" et contre l'Occident, mais pour le compte du pire des obscurantismes.
Ceci afin de se placer en position de force face à l'IRAN chiite. De
plus, astucieusement, l'EI vient de lancer des menaces de massacre contre Israël
(le Monde du 5-11-15), et critique l'attentisme du Hamas et du Fatah. L'EI s'apprête
à jouer sur tous les tableaux.
C'est ainsi que le rêve de la " Grande Syrie " arabe refait
surface sous le forme hideuse des despotismes des temps modernes, qu'il s'agisse
des pays communistes ou ex, des pays fascistes ou islamistes
Ces derniers,
redisons le, intègrent complètement le refus de toute démocratie,
et prêchent la servilité des femmes au dernier degré.
Face à cela Poutine aura intérêt à une alliance forte
avec l'IRAN, et paradoxalement avec l'ARABIE pour contrer l'avance de l'EI.
Ceci est sans compter avec de multiples autres problèmes : la partie
des masses arabes qui veulent s'émanciper de l'islamisme, le devenir
des Kurdes, le rejet du despotisme en Turquie, le ras le bol des politiques
d'austérité en Europe
.à travers une lutte des classes
confuse et sans guère de perspective pour l'instant. Mais rien n'est
joué nulle part.
Le 8-11-15 AMC